A l’heure du déjeuner, dans le quartier Mériadeck, à Bordeaux – un amoncellement de bureaux, de logements et de bâtiments administratifs à proximité d’un imposant centre commercial –, c’est l’ébullition. Avec le retour du soleil, les bancs et les coins d’herbe sont pris d’assaut par les badauds. La météo occupe la plupart des conversations. Interrogée sur les élections qui se profilent ce week-end, une jeune étudiante en arts croisée à la sortie d’une salle de sport hausse les sourcils : «Les européennes, c’est quand déjà ?» Melissa, 23 ans, se rappelle vaguement avoir reçu des prospectus dans sa boîte aux lettres, mais confie les avoir aussitôt jetés à la poubelle. «J’avais pas prévu d’y aller de toute façon, j’y comprends pas grand-chose. Tout ça me paraît très lointain par rapport aux élections nationales», se justifie-t-elle en s’épongeant le front.
«On n’a pas le droit de partir en ordre dispersé face à une extrême droite aussi forte»
Adossé à un mur de la galerie commerciale, un vendeur en pause clope, la trentaine, s’agace, mais avec le sourire. «Ça ne m’intéresse pas. Tous les mêmes», lâche-t-il avant d’écraser sa cigarette et de disparaître derrière des portes automatiques. Quelques mètres plus loin, Benoît, 52 ans, sans emploi, anciennement dans la finance, est plus bavard : «Je regarde pas mal d’émissions comme C dans l’air pour m’informer.