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Grand départ

Le président de la région Paca, Renaud Muselier, quitte Les Républicains

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Alors que Xavier Bertrand a refusé son soutien pour le congrès LR, après ses propos dénonçant une «dérive» de son camp vis-à-vis de l’extrême droite portée, selon lui, par le radical Eric Ciotti, l’élu sudiste a décidé de rendre la carte de son parti.
Renaud Muselier, à Paris, le 6 juillet. (Alain Jocard/AFP)
publié le 24 novembre 2021 à 10h27

La fuite des barons provençaux se poursuit chez LR. Après les maires de Nice et Toulon au printemps, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, a annoncé mercredi matin qu’il quittait Les Républicains (LR). «C’est très réfléchi, je n’y suis pas bien, c’est la fin d’une belle histoire», a-t-il déclaré mercredi matin, visiblement ému, sur LCI. En délicatesse depuis plusieurs mois avec son camp, l’élu juge le parti trop conciliant vis-à-vis de l’extrême droite. «Dans notre famille politique, dans notre histoire, on a toujours eu des tentations avec l’extrême droite, a déploré Muselier. [Aujourd’hui] il n’y a plus cette ligne rouge marquée de façon définitive, c’est une faute morale et ça devient une faute politique.»

Termes «inacceptables»

Ce départ intervient à quelques jours de la désignation du candidat de LR à la présidentielle par les adhérents du parti, les 2 et 4 décembre. Il a été acté par le principal adversaire de Muselier à droite, le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti : «C’est une clarification que je salue, pour une fois il est honnête, ça fait trois ans qu’il travaille pour En Marche», a épilogué le plus radical des candidats à la primaire de LR.

C’est le résultat d’une série de querelles, étalées au grand jour lors des élections régionales de juin. Président sortant de Paca, menacé par le Rassemblement national, Renaud Muselier avait conclu une entente avec La République en Marche. La démarche avait déclenché un psychodrame chez LR, qui avait momentanément retiré son soutien au candidat. Eric Ciotti avait été l’un des plus ardents procureurs de Muselier. Depuis, le conflit n’a jamais cessé depuis entre les deux hommes, le premier dénoncé comme représentant de l’extrême droite chez LR, le second comme agent occulte du macronisme.

Le dernier acte est survenu mardi, avec le refus par Xavier Bertrand, candidat à la primaire de LR, du soutien que venait de lui apporter Muselier dans le Parisien. «Je sais qu’en votant Xavier Bertrand, je vote pour un homme qui n’aura jamais la main qui tremble face à l’extrême droite», y déclarait le président de Paca, renouvelant ensuite ses attaques contre Eric Ciotti et le maire de Cannes David Lisnard, accusé de la même dérive. Dans un geste rare, et humiliant pour Muselier, Bertrand a décliné ce soutien, dont il a jugé les termes «inacceptables», au nom de l’unité de son camp. «Dès le 4 décembre, j’entends faire campagne avec tous les candidats dont mon ami Eric Ciotti», a-t-il rétorqué. Autres favoris de la primaire, Valérie Pécresse et Michel Barnier ont également soutenu Eric Ciotti.

«Faux nez de l’extrême droite»

Muselier en a tiré les conséquences mardi, sur un dernier réquisitoire contre son désormais ancien parti. Eric Ciotti «véhicule les idées de Zemmour à l’intérieur de LR», a-t-il estimé sur LCI : «Une omerta se pose à l’intérieur de ma famille politique, dans laquelle il y a des questions qu’il ne faut pas poser. […] Si jamais vous n’êtes pas au second tour, qu’est-ce que vous faites ?» Plusieurs fois interrogé sur ce cas de figure, Eric Ciotti a toujours affirmé qu’il préférerait le candidat d’extrême droite Eric Zemmour à Emmanuel Macron. Le député des Alpes-Maritimes «est dans l’extrême droite, c’est le porte-parole, le faux nez de l’extrême droite à l’intérieur de notre famille politique, et il somme les autres candidats de le soutenir», a poursuivi Muselier.

Le président de Paca a contesté être «téléguidé» dans sa démarche par le chef de l’Etat. Soutiendra-t-il sa probable candidature ? «On verra. […] Je vais voir si M. Macron est candidat, on va voir qui va gagner [chez LR], sur quelles bases.»

Figure centrale de la primaire

Pour LR, c’est une perte de plus dans le sud. Depuis leurs départs, en mai, les maires de Nice et Toulon Christian Estrosi et Hubert Falco se sont tous deux déclarés pour le président sortant. En 2020, la droite a aussi perdu, dans les urnes cette fois, la mairie de Marseille.

Pour Xavier Bertrand, l’épisode est un marqueur. Le président des Hauts-de-France avait quitté LR en 2017 en dénonçant, lui aussi, la radicalisation du mouvement. Il tente de s’en concilier la base pour remporter la primaire, quitte à sembler contredire ses anciens propos. «Quand Xavier Bertrand a annoncé qu’il quittait irrévocablement LR, c’était parce que la ligne politique de Laurent Wauquiez lui était insupportable, note l’ancien Premier ministre Edouard Philippe dans le Figaro, mercredi. Est-ce que la ligne a changé ? J’ai surtout l’impression qu’il s’y est rangé.»

Pour un député LR, «c’est un mouvement notable de Xavier Bertrand, qu’on a accusé de Macron-compatibilité, et qui se dit : je ne peux pas avoir le soutien et de Ciotti et de Muselier». En choisissant le premier, poursuit ce député, Bertrand peut «gagner deux ou trois points qui pourraient lui octroyer la victoire» dans la primaire de droite.

Quant à Ciotti lui-même, il remporte finalement la bataille interne contre son adversaire Muselier. Il apparaît surtout, de plus en plus, comme une figure centrale de la primaire de droite, où il semblait d’abord promis à un rôle mineur. Performant dans les débats télévisés, «mieux disant» des candidats sur l’immigration, la sécurité et l’identité, thèmes favoris des militants LR, il espère se qualifier pour le second tour de la compétition. A défaut, son soutien pourrait peser lourd en faveur de l’un ou l’autre de ses concurrents. Presque jamais critiqué par ces derniers, il les a vus voler à son secours, mardi, contre Muselier.