Pétanque, bières et prises de parole… Une quarantaine de jeunes militants se retrouvent dans un parc de Strasbourg pour un apéro avec les candidats de la Nupes. Après s’être opposés pour certains en avril, les voici tous ensemble à faire campagne pour les législatives. Lorsqu’il manque de boisson, c’est d’ailleurs une militante écolo et un insoumis qui partent à vélo recharger les stocks. En plus de rappeler les propositions pour la jeunesse de la Nupes, les candidats sont venus présenter un petit acte supplémentaire dans la convergence des campagnes : un tract unique avec les quatre candidats des circonscriptions limitrophes de l’Eurométropole. Une manière de concerner à coup sûr l’électeur, même s’il ne vote pas là où il reçoit le tract.
Coups de main mutuels
L’accord de la Nupes s’applique de manière simple à Strasbourg : la circonscription qui semble la plus favorable à l’union de la gauche a été laissée aux écologistes. Dans les autres, dont l’une qui semble à portée, La France insoumise est aux commandes. «L’intérêt collectif de l’accord s’appuie sur les forces politiques dans chaque territoire avec les profils qui correspondent», défend Sandra Regol, la candidate EE-LV dans la 1ère circonscription du Bas-Rhin. La numéro 2 du parti a participé à la fin des négociations… et gardé son investiture. En 2020, la mairie a été conquise par les écologistes, tandis que les insoumis n’ont pas réussi à obtenir d’élu au conseil municipal. «On nous a beaucoup fait la critique d’être hégémonique, Strasbourg montre que ce n’est pas le cas», estime Léo-Paul Latasse, un des responsables du parti. Tout en notant que LFI peut apporter son écot. «On leur a apporté notre connaissance des quartiers populaires, par exemple d’y privilégier le porte-à-porte.»
Malgré des coups de main mutuels, «c’est vrai que les écologistes sont beaucoup mobilisés par la circonscription 1», conçoit Emmanuel Fernandes, candidat LFI dans la circonscription 2 du Bas-Rhin. Mais ce nouveau visage dans la politique strasbourgeoise ne manque pas de bras, avec «six à huit actions par jour». Avec un costume de favori, les écologistes jouent gros. Une défaite à Strasbourg face au candidat Renaissance, l’ex-premier adjoint Alain Fontanel, serait interprété comme un plafond de verre national, malgré cet ancrage local. Ce modus vivendi semble convenir à tout le monde. En visite à l’hôpital lors de la campagne, Jean-Luc Mélenchon ne s’y est pas trompé en plaçant l’écologiste Sandra Regol et l’insoumis Emmanuel Fernandes en évidence à ses côtés. Les autres candidats, dans des circonscriptions plus difficiles, étaient relégués au deuxième rang. La visite a aussi donné lieu à la première rencontre entre la maire Jeanne Barseghian et Jean-Luc Mélenchon.
Le PS hors jeu après des scores faméliques
Jusqu’à 2020, Strasbourg était aux mains du PS. Mais avec les scores faméliques et des départs dans tous les sens, ses troupes ont fondu. L’accord de la Nupes n’a pas réservé de circonscription au PS local, qui depuis 2021 est à rebours d’Olivier Faure. Difficile de trouver une ligne directrice. Un an plus tôt aux régionales et départementales, ses cadres s’étaient engagés dans des alliances avec LFI, contre l’avis de la direction, et pour se retrouver face aux écologistes et communistes. Comme dans beaucoup de villes, ce qui reste du PS est divisé sur la Nupes. Néanmoins, le jour où une motion a été présentée aux militants pour soutenir des candidatures dissidentes, le texte a été rejeté. La version adoptée conclut que chacun peut faire ce qu’il veut. «Je ne comprends pas… Tout cela relève surtout des affaires internes et locales», soupire Jean-Marie Brom, figure historique de LFI.
«L’accord permet à d’autres voix du PS de réintégrer le champ de la gauche», met en avant de son côté Sandra Regol. Par exemple Jacques Bigot, l’ancien maire et sénateur d’Illkirch-Graffenstaden, commune voisine de Strasbourg : «J’ai rencontré beaucoup de gens qui votaient PS habituellement et qui votaient Mélenchon. Il y avait cette attente pour une union, malgré la complexité de toute coalition.» Son impression est raccord avec celle de Lucas, 23 ans. Présent au pique-nique de la Nupes, ce «sympathisant socialiste» a été invité par un néo-militant LFI. «Les gens du PS contre le Nupes, on dirait surtout qu’ils veulent sauver quelque chose, mais refonder le PS autour de Hollande n’est pas l’avenir.»