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Investiture

Législatives : à gauche, la candidature d’Adrien Quatennens étrillée par les féministes

Elections législatives 2024dossier
La candidature du député insoumis sortant, investi dans le Nord par LFI sans l’étiquette Nouveau Front populaire, est vivement critiquée. De nombreuses féministes dénoncent une décision qui bafoue les valeurs de la coalition de gauche.
Adrien Quatennens à l'Assemblée nationale, le 11 avril 2023. (Albert Facelly/Libération)
par Mathis Hardouin
publié le 14 juin 2024 à 18h00

Adrien Quatennens vise sa réélection et suscite l’indignation. Son cas a nourri des désaccords lors des négociations de l’union à gauche mais, le 30 juin, il sera bien sur la ligne de départ pour les élections législatives anticipées, dans la première circonscription du Nord. Le député insoumis sortant a tenté d’obtenir l’investiture du Nouveau Front populaire. Il se contentera de celle de LFI : les autres partis de la coalition de gauche ont refusé de se ranger derrière lui, tout en ne présentant aucune candidature concurrente dans sa circonscription. Pour rappel, il a été condamné en décembre 2022 à quatre mois de prison avec sursis pour violences conjugales. Dans la foulée de son jugement, il avait été suspendu quatre mois puis réintégré dans le groupe parlementaire insoumis.

Appel à un «barrage républicain»

«L’investiture d’Adrien Quatennens se pose, ça fait partie des choses que l’on doit discuter», avait lancé Sandrine Rousseau dimanche soir sur BFMTV. Les membres du Nouveau Front populaire ont, semble-t-il, esquivé la question. Depuis que le soutien de La France insoumise au protégé de Jean-Luc Mélenchon est connu, des adversaires politiques de l’alliance de la gauche se sont engouffrés dans cette brèche. Jordan Bardella, le président du Rassemblement national, a rapidement saisi l’opportunité sur BFMTV et le réseau social X (anciennement Twitter), déplorant «un jour de deuil pour les femmes attachées à leurs droits et à leurs libertés». Vanessa Duhamel, conseillère municipale Modem de Lille, et Violette Spillebout, députée macroniste du Nord, ont de leur côté appelé à un «barrage républicain» face à Adrien Quatennens. A gauche, sa candidature a provoqué l’émoi chez de nombreuses féministes.

Une tribune, publiée ce vendredi sur le Club de Mediapart, appelle à manifester le 23 juin pour sonner «les alertes féministes» face au danger de l’extrême droite. Beaucoup d’organisations (CGT, CFDT, France Terre d’asile, Oxfam France…) ont signé le texte qui presse également les responsables politiques de «ne pas présenter des hommes mis en cause ou condamnés pour violences sexistes et sexuelles», sans toutefois nommer explicitement Adrien Quatennens.

«Une insulte faite aux femmes»

Dans un texte envoyé à Libération, Fiona Texeire charge directement la candidature de l’ancien député insoumis et déplore «son maintien acharné». Pour la cofondatrice de l’Observatoire des violences sexuelles et sexistes en politique, l’exemplarité doit primer à gauche afin de battre l’extrême droite. Elle rappelle que la réhabilitation légale d’Adrien Quatennens n’interviendra qu’en 2032 et espère le voir «tirer sa révérence et […] laisser la place à une candidature féministe».

Une candidature de gauche et féministe, c’est ce que porte Amy Bah, dans la circonscription convoitée par Adrien Quatennens. Juriste et représentante du collectif féministe #NousToutes Lille, elle brigue l’investiture du Nouveau Front populaire. Un appel lancé jeudi dans Politis soutient sa demande et juge «inacceptable que, dans un Front Populaire qui promet un souffle démocratique, social, féministe, anti-raciste, il y ait dans ses rangs une personne reconnue coupable de violences». La tribune, signée par un grand nombre de féministes comme l’historienne Mathilde Larrère, l’autrice Florence Porcel ou l’élue parisienne Raphaëlle Rémy-Leleu, interpelle Adrien Quatennens en ces termes : «Le maintien de ta candidature est une insulte faite aux femmes, aux principes d’égalité dont tu te réclames.» Même sans investiture, Amy Bah a confié à la Voix du Nord envisager une candidature «citoyenne» dans la première circonscription du Nord.