Vingt jours pour préparer des législatives. Et pour les financer. Alors que les banques, dont les prêts assurent généralement une partie du financement des candidats, peuvent prendre des semaines à accorder ces crédits. Face à des délais aussi courts, les établissements bancaires vont-ils jouer le jeu pour permettre aux candidats de faire imprimer des tracts ou louer des salles de réunion ? La brièveté de la campagne devrait limiter les sommes nécessaires mais il faudra néanmoins les trouver. Chez Les Ecologistes, on estime le budget par circonscription à 60 000 euros, dont la moitié devrait être remboursée par l’Etat. Le député sortant LFI Ugo Bernalicis présume aussi qu’une «campagne en vingt jours ne sera pas si coûteuse que ça». Surtout des tracts et des affiches. «Je pense que beaucoup vont casser leur tirelire et solliciter des prêts et dons auprès des sympathisants et militants», calcule-t-il.
«Chacun fera au mieux dans le respect des exigences qui sont fortes»
Avec un premier tour prévu le 30 juin, le recours à un emprunt bancaire semble plus que compliqué. «C’est sûr que dans ce délai, il sera impossible de faire un prêt dans une banque. Déjà en temps normal c’est compliqué, alors là, je ne vous explique même pas…» observe le sortant. «La principale difficulté sera d’obtenir rapidement un prêt bancaire pour le financement de la campagne», abonde la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Car il faut compter environ cinq à sept semaines pour obtenir un prêt, en temps normal.
«C’est un sujet bien identifié. Chacun fera au mieux dans le respect des exigences qui sont fortes», répond la Fédération bancaire française qui renvoie à la notice explicative pour obtenir un crédit dans le cadre d’une campagne électorale. «L’intérêt de la banque est que vous puissiez rembourser normalement. Elle n’a aucun intérêt à vous refuser un crédit si elle estime que vous pourrez le rembourser. La procédure d’octroi des crédits est spécifique à chaque banque. En fonction de certains critères, dont le montant du prêt, la procédure de décision peut impliquer d’autres instances du groupe bancaire et non pas uniquement le responsable d’agence. […] Le respect des délais de traitement, propres à chaque banque, est primordial : anticipez votre demande de crédit», peut-on lire dans cette note.
«Les partis vont centraliser les emprunts»
La CNCCFP a «échangé à ce sujet avec le médiateur du crédit, qui a été institué par la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique» et qui est chargé de faciliter les négociations entre candidats et établissements de crédits. Elle invite surtout les candidats «à diversifier leurs sources de financement», via les dons (autorisés à hauteur de 4 600 euros, auxquels peuvent s’ajouter 7 500 euros de dons aux partis politiques), des aides payées directement par les formations politiques, des emprunts auprès de personnes physiques ou à un ou plusieurs partis politiques. En l’absence de grands meetings, Jean-Raphaël Alventosa, le médiateur du crédit interrogé par Libération, estime que les élections européennes «n’ayant pas coûté extrêmement cher», les partis ont encore de l’argent et «vont centraliser les emprunts». Lors des élections législatives de 2022, les crédits bancaires ont représenté 16 % des recettes de campagne, les emprunts aux partis environ 11 % et ceux à des personnes physiques 9 %. Le versement personnel du candidat est resté la principale source de recette (environ 30 %), alors que les dons n’ont représenté que 16 %. Des proportions qui pourraient évoluer cette année dans un contexte historique. Jean-Raphaël Alventosa observe aussi une tendance à la baisse des dépenses. «Une bonne partie des candidats va faire campagne sans argent.»