Poignées de mains franches, accolades, quelques grands sourires aussi. Au milieu des allées du marché de la citadelle de Blaye (Gironde), entre les carottes, le bœuf et le fromage, la déambulation des militants du Rassemblement national (RN) ne provoque presque plus aucun haussement de sourcil. Sans jamais accéder au pouvoir, le parti d’extrême droite a su creuser un large sillon dans cette commune de 4 800 habitants, au point de s’imposer d’une courte tête (50,58 %) lors du second tour de la dernière présidentielle sur une terre historiquement à gauche. A l’échelle de la onzième circonscription de Gironde, le RN atteint carrément les 58 %.
Plus qu’un vote d’adhésion, de nombreux habitants du Blayais, sur la rive droite de l’estuaire – un important foyer des gilets jaunes – revendiquent «un vote de contestation». Ils dénoncent pêle-mêle une précarisation liée à «la désertification des services publics» ainsi qu’une «fracture territoriale» renforcée par la centralisation bordelaise. «Vous rendez-vous compte que des travailleurs mettent trois heures aller-retour pour se rendre à Bordeaux faute de transports en commun dignes de ce nom ? On nous a abandonnés dans un cul-de-sac», fulminent Isabelle, 54 ans, et Brigitte, 70 ans, deux amies rencontrées devant un