Un de plus. Et pas des moindres. Eric Zemmour engrange officiellement ce samedi un troisième soutien en une semaine issu du Rassemblement national de Marine Le Pen : Gilbert Collard, 73 ans, ancien avocat et ex-député Font national du Gard entre 2012 et 2017, parlementaire européen à Strasbourg depuis 2019.
«Je le rejoins pour les idées, pour le débat, pour le goût de la liberté et je reste un homme libre», a affirmé Collard samedi matin sur France Bleu Gard Lozère, assurant n’avoir «rien contre le Rassemblement national ni contre Marine Le Pen, aucune récrimination, aucune vindicte».
Un vieil homme s’approche de Jérôme Rivière (exRN) et lui glisse d’un air entendu «Monsieur les anciens delta sont avec vous». Il ne parle pas du variant mais de l’ancien commando de terroristes de l’OAS responsables d’attentats par dizaines dans les années 60. #zemmour @libe pic.twitter.com/4FvMi1pwur
— Nicolas Massol (@nicolasmassol1) January 22, 2022
L’ex-avocat, qui avait rejoint Marine Le Pen lors de l’ouverture du vieux Front national en «Rassemblement bleu marine», doit accompagner l’autre candidat d’extrême droite, ce samedi soir, dans un meeting à Cannes (Alpes-Maritimes).
«C’est d’abord une campagne d’amitié et de camaraderie», avait commenté Zemmour un peu plus tôt devant les caméras de télévision, avant de déambuler entre les stands du marché cannois. «C’est un ami. On s’échange des idées, des livres depuis très longtemps», a-t-il ajouté.
Fin de marché à cannes, Zemmour et ses copains se jettent un rosé. Clin d’œil sur l’étiquette pic.twitter.com/6fgJqBP89G
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Après les ralliements de Guillaume Peltier issu de LR et du chef de file des eurodéputés RN, Jérôme Rivière et de la figure identitaire Damien Rieu, Gilbert Collard est une nouvelle prise pour le polémiste d’extrême droite, dont la campagne patine depuis la rentrée avec une nouvelle condamnation en justice et un autre procès cette semaine. En revanche, Thierry Mariani, l’autre député européen dont le nom a circulé ces dernières heures comme potentiel transfuge, dément à Libération son intention de changer de casaque : «J’ai pris l’habitude de rester au moins quarante-deux ans dans une formation avant de faire du nomadisme. Rendez-vous donc dans trente-neuf ans», plaisante l’ancien UMP, ex-ministre des Transports de Nicolas Sarkozy qui parie de son côté sur un Zemmour à moins de 10% le 10 avril : «Il fait une campagne à la Bellamy [le candidat de la liste LR aux européennes de 2019 qui avait réuni seulement 8,48% des suffrages exprimés, ndlr]. Avec une énorme couverture presse. On parle de “phénomène”, mais à la fin ça risque de terminer de la même manière. Il croit dans son collectif intellectuel, mais ça n’est pas ça rassembler.»
Zemmour à Le Pen : «L’aigreur est un sentiment»
Au Rassemblement national, la priorité est ainsi de minimiser ces ralliements. «J’ai une vieille expérience des campagnes présidentielles. Que des gens se sentent plus proches d’un candidat plutôt que d’un autre, ce n’est pas critiquable […] Mais en politique aussi, on peut agir avec droiture. La technique du salami consistant chaque jour à annoncer un ralliement, je la connais par cœur», avait réagi Marine Le Pen. Samedi matin, Zemmour lui a répondu : «L’aigreur est un sentiment, le calcul est raisonné. […] Certains font des calculs et choisissent leur parti avant leur pays. Là, c’est le choix des convictions et de la France.» Collard et Zemmour «ont tous les deux voté Mitterrand», se moque-t-on dans l’entourage de la candidate RN : «Drôle d’union des droites !»
Marché de Forville, Cannes. Première vraie déambulation pour Éric Zemmour, qu’on entr’aperçoit parfois entre les perches et les fans, nombreux. Nouveaux soutiens présents : Peltier, Riviere, Muller (Noubelle dircom), Rieu. Collard, rallié hier soir, absent. pic.twitter.com/Hts4tu8OFX
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Collard n’en est pas à sa première tentative de franchir le «Rubicon», comme il s’est amusé à l’écrire sur sa page Facebook vendredi. «Il est dans la contestation permanente et, déjà, aux élections européennes, il avait fait du chantage en disant que si on ne le mettait pas sur la liste, il partait chez Dupont-Aignan, a affirmé le maire de Perpignan, Louis Aliot, dans une interview à France Info. Donc ses convictions sont à géométrie variable. Mais il faut aller jusqu’au bout de cette logique ! Il faut qu’il démissionne de son mandat de député européen qu’il a reçu des électeurs du RN.» Au-delà de la simple question d’«amitiés» entre lui et Zemmour, ce départ de Collard pourrait aussi être motivé par des raisons bassement électorales. Passé du Palais Bourbon au Parlement de Strasbourg en 2019, Collard était en froid avec son suppléant à l’Assemblée, Nicolas Meizonnet, lequel a été choisi par le RN pour concourir en juin dans cette circonscription du Gard aux législatives. Ce que Collard, selon une source interne au parti d’extrême droite, n’aurait pas supporté : «On n’a jamais su si c’était Collard qui voulait se représenter pour encore prolonger sa vie de député, ou placer son copain Christophe Lefèvre.» Ce conseiller municipal de Saint-Gilles, ville où Collard a mené l’opposition au maire de droite jusqu’en 2020, est déjà passé chez Zemmour il y a une semaine.
« Le seul candidat de division c’est Zemmour. S’il n’y avait pas la candidature de Zemmour et un grand rassemblement, on serait devant Emmanuel Macron dans les enquêtes d’opinion, a ajouté Aliot. Aujourd’hui, celui qui pourrait sauver la candidature Pécresse, c’est Eric Zemmour. Si à la fin de l’exercice, ils sont les seuls responsables de la division du camp national et qu’ils nous empêchent d’être au second tour, ils porteront à jamais dans l’histoire. »
Par ailleurs, au sein de l’appareil RN, on insiste sur le fait que, contrairement à Jérôme Rivière, très actif à Strasbourg et Bruxelles, «Collard n’a pas apparu au Parlement depuis au moins six mois, dit un cadre du RN. Pas sûr que son arrivée chez Zemmour soit très bonne en termes d’image.» Elle occupait en tout cas les chaînes d’information en continu ce samedi op.