Quelques jours avant de sauter du navire frontiste, il y a plusieurs semaines, un futur ex-RN désormais chez Reconquête partageait son fatalisme sur les réelles chances de Marine Le Pen. Pour lui, la menace ne venait pas de la concurrence frontale de l’autre candidat d’extrême droite, Eric Zemmour, mais de l’abstention. «Je crois que l’électorat “gilet jaune” du RN est en train de s’échapper, donc notre surface va se réduire. On a vraiment un problème structurel : notre ligne tenait, car on est allés conquérir des gens qui votaient anciennement à gauche. Mais, en fait, nous n’arrivons pas à les garder. Désormais, ils s’abstiennent.»
Notre transfuge n’est pas le seul à dresser un tel constat : nous l’avons vu nous-même sur le terrain à mesure des reportages dans cette campagne. Dans le Nord et le Pas-de-Calais notamment, terres d’élection du RN, sur les marchés, dans les commerces, beaucoup, pour ne pas dire une majorité, d’électeurs issus des classes populaires ont montré leur désintérêt pour cette présidentielle qui semble «jouée d’avance». Selon une récente étude, les ouvriers et les employés, avec les agriculteurs, sont les catégories qui sont les moins certaines d’aller voter le 10 avril. Or elles forment le cœur des acquis lepénistes.