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Trombinoscope

Szczurek, Hochart, Durox : qui sont les trois sénateurs du Rassemblement national ?

Petit tour d’horizon des nouvelles recrues lepénistes au Palais du Luxembourg : un proche du vice-président de l’Assemblée nationale Sébastien Chenu, un bras droit de Steeve Briois, le maire d’Hénin-Beaumont et une surprise en Ile-de-France.
Christopher Szczurek à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), en 2014. (Aimée Thirion/Libération)
publié le 25 septembre 2023 à 18h59

Une révolution ? Non, sire, mais tout de même une petite nouveauté. Avec trois élus au Sénat, le Rassemblement national (RN) n’a pas créé dimanche la même surprise qu’en juin 2022 à l’Assemblée nationale, mais envoie tout de même le plus gros contingent de son histoire au Palais du Luxembourg. Surtout, le parti de Marine Le Pen reprend pied dans la chambre haute où le ralliement de son dernier sénateur, Stéphane Ravier (Bouches-du-Rhône), à Eric Zemmour pendant la dernière présidentielle, l’en avait exilé. Petit tour d’horizon des nouvelles recrues lepénistes : un proche du vice-président de l’Assemblée nationale, Sébastien Chenu, un bras droit de Steeve Briois, le maire d’Hénin-Beaumont et une surprise en Ile-de-France.

Christopher Szczurek, le fidèle lepéniste version Hénin-Beaumont

Dans un portrait paru dans le Journal du dimanche en 2017, Christopher Szczurek, alors adjoint à la culture de la ville FN du Pas-de-Calais se présentait comme «peut-être mariniste avant d’être frontiste». Une façon, pour ce descendant de mineurs polonais arrivés en France dans les années 1920, qui a manifesté à 17 ans contre la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, en 2002, de mettre à distance l’extrême droite traditionnelle dans laquelle il prétend ne pas se reconnaître. Lui, l’enfant du bassin minier, grandi à Courrières, à côté d’Hénin-Beaumont, est d’abord un pur produit du FN version Steeve Briois et Bruno Bilde, le tandem politique auquel Marine Le Pen doit son implantation locale. Szczurek prend sa première carte du FN en 2007, plaque ses études de droit et suit la carrière du parfait apparatchik, devenant permanent au «Carré» (le siège du parti, à Nanterre, depuis 2008) tout en gardant un pied à Hénin, que Briois remporte en 2014. Adjoint à la culture, c’est déjà lui qui mène la liste FN aux sénatoriales de 2017, pour laquelle il décroche 260 suffrages de grands électeurs. Six ans plus tard, à 38 ans, il en récolte 557. Traitement de faveur : il est le seul candidat à avoir eu droit à une visite de Marine Le Pen, venue lancer la campagne des sénatoriales en juin dernier.

Pour Szczurek, l’entrée au Luxembourg sonne un retour sur la scène nationale : après avoir démissionné de l’équipe de campagne de Le Pen en raison de désaccords avec des proches de la candidate, au bout d’un petit mois de services, il s’était tenu à distance du siège parisien, puis s’était fait sortir du bureau national du RN après l’élection de Jordan Bardella, en novembre 2022, victime collatérale de la guéguerre entre le nouveau président du parti et les héninois Bilde et Briois. Sa première place sur la liste RN du Pas-de-Calais, à laquelle Bardella, magnanime, ne s’est pas opposé, a scellé un début de réconciliation entre les clans. Isolé au Sénat où il ne siégera dans aucun groupe, Szczurek ne devrait pas non plus retrouver une influence démesurée au sein du dispositif frontiste pour autant.

Joshua Hochart, un proche de Sébastien Chenu

A 36 ans, Hochart débarque sous les ors de la Chambre haute en parfait inconnu. Ancien adjoint de sécurité auprès de la police, selon la Voix du Nord, l’homme travaillait à la protection civile, à Denain-Plage, avant d’être recruté sur la liste de Sébastien Chenu pour les municipales de 2020, à Denain, où il est élu avec quatre autres frontistes. L’année suivante, le novice en politique est bombardé directeur de campagne du même Chenu pour les régionales dans les Hauts-de-France. Il n’y manifeste pas un talent éclatant – la liste de l’actuel vice-président de l’Assemblée nationale réunit 23,8 % des suffrages, soit presque moitié moins que les 43,63 % du FN en 2015 – mais s’y fait remarquer par ses dépenses dans une enquête du journal Le Monde. Salaire de 3 000 euros net, téléphone, voiture avec chauffeur et une prime de fin de contrat d’un peu plus de 3 000 euros alors que son adjoint Jean-Philippe Tanguy est, lui, bénévole. Qu’il se rassure : Hochart continuera de très bien gagner sa vie au Sénat.

Aymeric Durox, la surprise du chef en Seine-et-Marne

Etonnant : avec une dizaine de grands électeurs RN dans le département de Meaux et de Fontainebleau, le candidat d’extrême droite s’est attiré 413 suffrages ce dimanche. De quoi faire béer quelques bouches au siège frontiste, qui ambitionnaient plutôt de marquer des points en Moselle ou dans les Pyrénées-Orientales. Mais pas celle d’Aymeric Durox, professeur d’histoire-géographie à Fontainebleau et patron de la fédération de Seine-et-Marne depuis huit ans. «Il s’y attendait : il fait beaucoup de terrain depuis toujours, il s’est tapé toutes les foires à la saucisse possibles et s’est donc fait beaucoup de contacts avec les maires de la ruralité», explique un ex-RN qui le connaît bien. Interrogé par Libé, Durox, lui, voit dans son succès «la déliquescence des LR» dans ce département, franchement ancré à droite, façon RPR, qui a vu s’ébattre Alain Peyrefitte, Jean-François Copé ou Christian Jacob. «Beaucoup d’électeurs sont venus vers nous car sur ma liste de huit personnes, six viennent de l’UMP-RPR, dont moi», précise-t-il. De fait, après une jeunesse échevelée (l’homme reconnaît avoir soutenu Jean-Pierre Chevènement), Durox pointe au petit parti radical valoisien, allié de l’UMP, dont il s’éloigne après le référendum de 2005, auquel il répond «non». Il rompt avec la droite après le traité de Lisbonne, en 2007, vote FN aux européennes deux ans plus tard et prend sa carte en 2015, au moment de sa titularisation au ministère de l’Education nationale. Prof, cultivé, de droite, notre homme n’est logiquement pas mis en avant par le siège du RN, qui lui préfère des profils plus affidés. Il déploie donc son ambition dans son département, s’installe à Nangis où il voit une possibilité de s’implanter aux municipales. Elu conseiller régional en 2021, Durox transforme l’essai deux ans plus tard aux sénatoriales. «Il ne doit sa victoire qu’à lui-même», estime un ex-RN. Le nouvel élu s’est fait un plaisir d’accorder l’une de ses premières interviews à Breizh-info, un site très connoté dans la fachosphère.