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Libération
Dinosaures

Régionales 2021 : les anciennes figures s’incrustent dans l’entre-deux-tours

Nicolas Sarkozy, Jean-Marie Le Pen, Lionel Jospin… A droite comme à gauche, le deuxième tour des élections régionales pousse les vieux fauves à sortir de leur réserve. Des paroles toujours remarquées, au moins dans leur propre camp.
L'ancien Premier ministre Lionel Jospin à Paris, en septembre 2019. (Pascal Rossignol/REUTERS)
publié le 25 juin 2021 à 7h50

A quelques jours du deuxième tour des régionales, les dinosaures se font entendre. Loin de s’avouer submergés par la vague du «nouveau monde», qui a déferlé en 2017, ils estiment que leur voix a encore un écho. Et pourtant, ils reconnaissent volontiers, comme le fait Nicolas Sarkozy dans l’interview qu’il accorde à Nice Matin ce jeudi, qu’ils sont «retirés de la vie politique». Sauf que la politique, chez ces grands fauves, n’est jamais bien loin. Si l’ancien chef de l’Etat sort du silence auquel il s’astreint depuis plusieurs semaines, c’est pour soutenir le candidat LR en région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (Paca), Renaud Muselier. Un homme qui a «toujours été là».

Nicolas Sarkozy se dit «inquiet de la situation». Il faut dire que la menace est grande de voir la région basculer aux mains de l’extrême droite. Thierry Mariani, qui porte les couleurs du Rassemblement national, lui-même ancien ministre des Transports de Nicolas Sarkozy, est donné au coude-à-coude dans les sondages avec Renaud Muselier. Sarkozy en profite pour lancer un appel presque solennel à sa famille politique : «Arrêtez les divisions !» Puis il ajoute : «Si Renaud Muselier perd, vous perdez tous». Pour l’ancien président de la République, l’objectif est tout à la fois de sortir des petites phrases et de la polémique vaine. Mais aussi de parler d’autre chose que des affaires judiciaires qui le concernent. Il attend d’ailleurs le délibéré du procès Bygmalion, dans lequel six mois de prison de ferme ont été requis contre lui, qui devrait tomber après l’été, à la fin du mois de septembre.

Une rencontre prévue entre Jospin et Bayou

Une autre figure de la vie politique est sortie du bois, ce jeudi. L’ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin, bientôt âgé de 84 ans, a jugé bon d’apporter son soutien à Julien Bayou en Île-de-France. L’union large faite autour du candidat écologiste doit rappeler à l’ancien premier secrétaire du PS quelques souvenirs de «gauche plurielle». Selon un journaliste du Monde, une rencontre est même prévue entre les deux hommes vendredi.

Ce n’est pas la première fois que Lionel Jospin prend position. Il y a quelques semaines, il s’était affiché aux côtés de Lamia El Aaraje, candidate PS à l’élection législative partielle dans le XXe arrondissement de Paris qui l’avait emporté face la France insoumise au deuxième tour. En septembre 2020, le candidat déchu de la présidentielle de 2002 avait fait un retour remarqué avec la publication de son livre Un temps troublé.

Si Lionel Jospin a choisi ce timing, c’est aussi sans doute pour contre-attaquer face à l’offensive lancée dès mercredi par un autre ancien Premier ministre socialiste : Manuel Valls. Contre toute attente, ce dernier a annoncé : «Je voterai Valérie Pécresse». Pour lui, l’union des socialistes, des écologistes, des communistes et des insoumis représente «un danger». Celui qui s’est fait élire conseiller municipal à Barcelone et qui n’a pas hésité à manifester aux côtés de l’extrême droite espagnole contre l’indépendantisme catalan, parle même de «faute morale et politique». Une charge qui vise en premier lieu les Insoumis, une fois de plus. Mais la première fois que Manuel Valls appelle ouvertement à voter pour la droite contre la gauche. Davantage inattendu : le socialiste Jean-Paul Huchon, à la tête de la région Île-de-France entre 1998 et 2015, lui a emboîté le pas. Lui non plus ne votera pas pour Julien Bayou, le candidat rassemblant les représentants de sa famille politique. Dans une interview au Point, le rocardien historique déclare : «Je ne peux pas accepter que cette région soit gérée par une telle alliance baroque.» Une sortie qui surprend à plus d’un titre : Julien Bayou et Jean-Paul Huchon appartenaient à la même majorité de gauche et ont travaillé ensemble, tandis que Clémentine Autain fut des années durant adjointe dans la majorité de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris.

«L’échec» du RN

De l’autre côté de l’échiquier politique, c’est le fondateur du Front national en 1972, Jean-Marie Le Pen, qui a aussi donné son point de vue le scrutin régional. Dans une vidéo publiée sur YouTube, appelée «Journal de bord», Jean-Marie Le Pen, 93 ans, estime que la formation d’extrême droite – devenue Rassemblent national – a «subi un échec» lors du premier tour. Il pense avoir l’explication : «Cela est lié au phénomène très banal qui s’est appelé, selon les moments, la dédiabolisation et qui est en fait la dé-lepénisation, qui consistait à retirer au Front national les éléments les plus dynamiques de ses campagnes électorales.»

Il n’est pas dit que le retour de ces dinosaures dans l’arène politique en cette veille d’élection se concrétise par un regain de mobilisation. Notamment dans la jeunesse, alors qu’au premier tour des élections régionales, 87% des 18-24 ans ne se sont par exemple pas rendus aux urnes.