En grande difficulté depuis les élections européennes et la dissolution de l’Assemblée nationale, la majorité présidentielle a sauvé les meubles au second tour. Qu’ils soient ministres, ministres délégués ou secrétaires d’Etat, 18 membres du gouvernement étaient personnellement engagés dans ces élections législatives anticipées. Six d’entre eux, arrivés troisièmes, se sont retirés, avec plus ou moins de difficulté. Onze ne se présentaient pas, comme Bruno Le Maire, Eric Dupond-Moretti ou Rachida Dati. Les candidatures de ces ministres, tous élus sortants sauf Stéphane Séjourné et Agnès Pannier-Runacher, ne faisaient pas face à la même adversité. Libé détaille leurs résultats.
Ils sont réélus
Gabriel Attal
Porté en tête du premier tour sans difficulté, le Premier ministre a confirmé son avance sur son adversaire du Nouveau Front populaire, la socialiste Cécile Soubelet. De plus de six points, celle-ci s’est accrue de 14 points puisque le Premier ministre, qui présentera sa démission à Emmanuel Macron ce lundi (tout en assurant rester en poste «aussi longtemps que le devoir l’exigera»), l’a emporté avec plus de 58,23% des voix sur sa challengeuse (41,77%), qui n’avait pas les réserves de voix nécessaires pour espérer une remontada. Alors que la question de l’après-législatives avait occupé l’essentiel de ses interventions médiatiques, son mandat de député n’était pas à risque, lui qui, dans cette 10e circonscription des Hauts-de-Seine, bénéficiait des maires des communes environnantes.
Gérald Darmanin
La partie n’était pas si facile pour le bientôt ex-ministre de l’Intérieur, désireux de se réimplanter dans son territoire en vue de la présidentielle 2027. Mais au bout de la campagne, Gérald Darmanin – qui avait bénéficié du désistement de la candidate REV investie par LFI tout en assurant qu’il ne choisirait pas entre LFI et le RN – a fini par conserver son siège, et largement. Emergé de justesse en première position (36,03 %), devant le RN Bastien Verbrugghe (34,31 %), il a très largement écarté le candidat d’extrême droite dans la 10e circonscription du Nord, avec 61,37% des voix contre 38,63%. Elu député pour la première fois en 2012 sous l’étiquette UMP, l’ancien maire de Tourcoing embraye sur un quatrième mandat. De quoi travailler son ancrage local dans un territoire où, en 2022, il avait été réélu député avec près de 58 % des voix au second tour.
Prisca Thévenot
Dure campagne de second tour pour la ministre déléguée chargée du Renouveau démocratique et porte-parole du gouvernement. Si elle l’a largement emporté avec 62,44% des voix contre 37,56 à son adversaire du NFP, en tête au premier tour (39,91 %), devançant de neuf points son adversaire NFP, la jeune socialiste Salomé Nicolas-Chavance, elle a été victime d’une agression alors qu’elle participait «une opération de collage d’affiches électorales» à Meudon, mercredi 3 juillet. Prise à partie par une vingtaine de personnes, la ministre n’a pas été touchée, mais sa collaboratrice et un militant ont été blessés et transportés à l’hôpital. En 2022, elle avait remporté la circonscription avec 66% des voix au second tour et reste favorite dans la 8e circonscription des Hauts-de-Seine.
Marie Lebec
La ministre déléguée chargée des Relations avec le Parlement a confirmé son statut de favorite dans la 4e circonscription des Yvelines. Avec 50,67 % des voix, elle écrase la concurrence, la candidate NFP Céline Bourdon (26,97%) et le LR ligne Ciotti Jean-François Mourtoux (22,35%). Sa réélection a donc été la formalité qu’elle prévoyait d’être, même si l’avance consolidée par cette ex-sarkozyste, élue en 2017 et en 2022 avec près de deux tiers des suffrages au second tour, a très largement fondu.
Aurore Bergé
La ministre déléguée chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, tenante d’une ligne «ni RN, ni LFI», n’avait pas à se faire beaucoup de cheveux blanc pour sa réélection dans la 10e circonscription des Yvelines. Arrivée en tête avec 39,59 %) des voix, elle affrontait le RN de représenté par Thomas Du Chalard (28,22 %) et le Nouveau Front populaire porté par Cédric Briolais (22,40 %) dans une triangulaire. Prévision confirmée au soir du 7 juillet : 49,05% pour la ministre, 32,18 pour le RN et 18,76% pour Cédric Briolais. A rebours de l’ensemble des candidats de l’alliance de gauche, ce dernier a décidé de se maintenir, jugeant que «le risque de victoire du Rassemblement national est négligeable». En effet, les réserves de Thomas Du Chalard se sont avérées bien trop minces, comme celles de Cédric Briolais, tandis que l’ex-présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée a pu compter sur les voix du LR Gaël Barbotin. En 2017 et en 2022, elle s’était imposée avec plus de 60% au second tour. Une avance qui a nettement fondu depuis.
Olivia Grégoire
La ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, l’emporte sans difficulté dans la 12e circonscription de Paris, avec 65,25% des voix contre 34,75% pour la communiste Céline Malaisé. Comme en 2022, elle faisait face, dans cet arrondissement bourgeois englobant une partie des VIIe et XVe arrondissement, à Céline Malaisé (28,96 %) au second tour, dans un arrondissement ou l’extrême droite a réalisé un score canon par rapport à ses standards parisiens (16% contre 12% en 2022). Après les législatives de 2017 et de 2022, celles de 2024 restent propices à l’ancienne porte-parole du gouvernement d’Elisabeth Borne. En 2022, son compteur affichait deux fois plus de voix que celui de Céline Malaisé.
Marina Ferrari
La secrétaire d’Etat chargée du Numérique, élue députée en 2022, a remporté, avec 58,08% des voix, son duel avec l’ex-macroniste passée chez Eric Ciotti, Typhanie Degois. Arrivée au premier tour en deuxième position avec 35,24 % des voix dans la 1re circonscription de Savoie derrière la candidate d’extrême droite, elle a bénéficié du retrait de Christelle Granata, représentante du Nouveau Front populaire, arrivée troisième avec 22,93% des voix.
Thomas Cazenave
En ballottage favorable après le premier tour, le ministre délégué aux Comptes publics l’emporte nettement dans une triangulaire dans la première circonscription de la Gironde. Thomas Cazenave, arrivé en tête au premier tour avec 38% des voix, a gratté cinq points de plus pour consolider sa victoire. Avec 43,2%, il devance nettement l’écologiste investie par le NFP Céline Papin, 35,94% des voix, et le RN Bruno Paluteau, qui recule par rapport au premier tour à 20,86%. En 2022, Thomas Cazenave s’était largement imposé avec 59 % des suffrages au second tour.
Frédéric Valletoux
Le ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention avait viré chichement en tête au premier tour, devançant de 700 voix la candidate RN Ivanka Dimitrova. Mais le barrage républicain a fort bien fonctionné une fois de plus) dans la 2e circonscription de Seine-et-Marne. Au soir du second tour, débarrassé de la concurrence de la candidate NFP Nous Benaïssa Watbote (23% au premier tour), l’ex-patron de la Fédération hospitalière de France écrase son adversaire (59,95%) avec près de 20 points d’avance (40, 05%).
Jean-Noël Barrot
Formalité remplie pour le ministre délégué chargé de l’Europe. Jean-Noël Barrot a éparpillé façon puzzle le RN dans la 2e circonscription des Yvelines, historiquement à droite. Fort de ses 72,69%, le sortant a fait fructifier son premier tour en doublant le nombre de suffrages à son nom. Le désistement de Maïté Carrive-Bédouani, pourtant arrivée deuxième pour l’union de la gauche (25,98 %), n’a pas été sans incidence sur la très large défaite du candidat du Rassemblement national Gaëtan Brault. De quoi accroître encore le score réussi par l’ancien secrétaire général du Modem en 2017 comme en 2022.
Guillaume Kasbarian
Elu depuis 2017, le ministre délégué chargé du Logement s’en sort largement dans la 1re circonscription d’Eure-et-Loir, ancrée à droite, avec 57,57% des voix. Avec 32,89 % des voix au premier tour, il était à la traîne derrière la candidate RN Emma Minot (33,66%, 42,42% au second tour). Dans l’optique de cette finale, le désistement de Jean-François Bridet, candidat du NFP (24,05 %) lui a facilité la tâche. Celui qui s’est fait connaître en portant la loi «antisquat» brigue un nouveau mandat dans la circonscription de Chartres. Il avait obtenu 58 % face à une candidature Nupes en 2022.
Stéphane Séjourné
Joli cadeau que la 9e circonscription des Hauts-de-Seine pour permettre au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères d’entrer à l’Assemblée. Après un bon départ au premier tour (46,07 %, 25 points devant la concurrence), il affrontait l’écologiste Pauline Rapilly-Ferniot, 21,39 % au premier tour. Et pour sa première fois aux législatives, l’ex-président du groupe Renew au Parlement européen et désormais patron du quai d’Orsay n’a pas fait dans la dentelle : 72,63% contre 27,37% pour son adversaire.
Hervé Berville
Le secrétaire d’Etat chargé de la Mer et de la Biodiversité l’a emporté aisément dans la 2e circonscription des Côtes-d’Armor, avec 63,63% des voix contre 36,37% à son adversaire RN Antoine Kieffer (30,96 %). Au soir du premier tour, la chose paraissait moins aisée, Berville devançant de peu son adversaire, avec 33,61 % des suffrages contre 30,96%. Jérémy Dauphin, qui défendait les couleurs du NFP s’était retiré de la course. Pendant l’entre-deux-tours, le député sortant avait donné de la voix pour défendre coûte que coûte le barrage contre l’extrême droite, déplorant la «capitulation morale» des tenants du «ni-ni» : «Il faut être clair : la seule menace réelle est une majorité d’extrême droite qui gouvernerait la France. On ne peut pas avoir de pudeur de gazelles. On fait barrage.»
Agnès Pannier-Runacher
Avec 21,54% des voix, la ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire faisait face à un défi de taille dans la 2e circonscription du Pas-de-Calais. Arrivée loin derrière le candidat RN, Alban Heusèle (37,13%), elle n’était passée au second tour qu’avec 900 voix d’avance sur Alexandre Cousin (20,12 %) son adversaire de gauche. Le désistement de ce dernier – et son engagement dans la campagne de la ministre – s’est toutefois avéré gagnant, puisque la ministre l’emporte aisément, avec 55,84% des voix contre 44,16% à son adversaire.
Marc Fesneau
En ballottage défavorable au soir du premier tour, le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire rempile pour un troisième mandat dans la 1re circonscription du Loir-et-Cher. Avec 60,20% des voix, il a renversé une situation mal emmanchée, lui qui figurait derrière la candidate RN Marine Bardet (35,22 %), maillot jaune de ce premier tour mais largement décramponnée au second (39,80%). Largement vainqueur en 2017, Fesneau avait perdu quelques longueurs d’avance aux législatives de 2022. L’ancien président du groupe Modem à l’Assemblée l’avait emporté avec 56 % des suffrages au second tour. La montée du RN dans le département lui a finalement simplifié la tâche, même si la candidate RN devra aller chercher des réserves de voix peu évidentes au soir du premier tour.
Roland Lescure
Le ministre délégué chargé de l’Industrie et de l’Energie conserve aussi sa circonscription, avec 54,25% des voix contre 45,75% à son adversaire de l’union de la gaucher Oussama Laraichi. Au premier tour, le Franco-Canadien avait arraché la première place (38,84 %) au candidat du Nouveau Front populaire (36,12 %). Candidat à sa réélection dans la 1re circonscription des Français établis hors de France, qui regroupe le Canada et les Etats-Unis, le seul membre du gouvernement à représenter des Français de l’étranger devra batailler pour sauver sa place. Après son élection en 2017 avec 80 % des voix au second tour face à LR, la gauche unie derrière LFI l’avait titillé en 2022, contenant son score à 56 %.
Franck Riester
La crêpe s’est retournée du bon côté pour le ministre délégué chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité, de la Francophonie et des Français de l’étranger sort de deux duels face à l’extrême droite. Arrivé bien loin du candidat LR-RN au premier tour, 10 points de retard sur Philippe Fontana, il a refait son retard avec brio, l’emportant finalement avec 54,40% des voix. Pour cela, il a pu compter sur le désistement de Laurie Caenbergs, représentante du NFP (24,52 %). Après 2007, 2012, 2017 et 2022, l’ancien membre de l’UMP enchaîne donc un nouveau mandat dans la 5e circonscription de Seine-et-Marne.
Ils sont battus
Sarah El Haïry
La ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles était en ballotage défavorable. Le dimanche 7 juillet a confirmé la mauvaise position de cette pourfendeuse du «wokisme», battue par un Roussel – Fabrice, un socialiste – au second tour dans la 5e circonscription de Loire-Atlantique. La sortante, qui s’est illustrée en mettant au même niveau «ceux qui cassent du PD» et «ceux qui cassent des abribus», a obtenu 37,38% des suffrages, pas loin du vainqueur Fabrice Roussel, représentant le Nouveau Front populaire (39,91%). Cette circonscription était le théâtre d’une triangulaire où le candidat LR-RN Bruno Comby a obtenu 22,7% des voix, en recul par rapport à son score du premier tour. La Modem avait été élue en 2017 et en 2022, à chaque fois devant à une candidature de gauche.
Stanislas Guerini
L’ancien ministre, arrivé en deuxième position dans la 3e circonscription de Paris avec 34,42 % des voix contre la candidate de l’union de la gauche, Léa Balage El Mariky (45,60 %), perd son siège. Malgré des réserves de voix pas négligeable, il n’a pas réussi à les réunir pour refaire son retard et échoue loin de son adversaire, avec 46,41% contre 53,59% à l’écologiste. Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques quitte donc un siège qu’il avait remporté en 2017 puis d’un cheveu en 2022. Aux dernières législatives, il avait battu sa vainqueur du jour avec moins de 1000 voix d’avance. Cette fois, la candidate du Nouveau Front populaire a fait tomber la pièce du bon côté.
Elles s’étaient désistées
Dominique Faure
Avec 28,99%, Dominique Faure était arrivée en 3e position derrière le candidat de l’union de la gauche, Jacques Oberti (36,24) et la candidate RN, Caroline Falga-Colomina (30,37 %). Passée proche de la défaite en 2022, la ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité avait arraché la 10e circonscription de la Haute-Garonne à 200 voix près seulement. Après quelques temps d’hésitation, elle a fini par retirer sa candidature. De quoi permettre à la gauche de s’imposer très largement contre le RN (61,07% contre 38,93%).
Marie Guévenoux
La ministre déléguée chargée des Outre-mer avait recueilli 27,11 % des voix dans la 9e circonscription de l’Essonne, se classant en troisième position dans une triangulaire, derrière la candidate de l’union de la gauche, Julie Ozenne (37,60 %) et le candidat RN, Paul-Henri Merrien (29,96 %). Elle a annoncé se désister en vue du barrage républicain, au deuxième tour. Barrage réussi, puisque Julie Ozenne est élue députée avec 62% des voix. Elue à l’Assemblée nationale depuis 2017, Marie Guévenoux avait battu de moins de 1 000 voix la candidature de l’union de la gauche en 2022.
Fadila Khattabi
Dans la 3e circonscription de la Côte-d’Or, la ministre déléguée chargée des Personnes âgées et des Personnes handicapées s’est finalement désistée : en troisième position dans une triangulaire, elle a recueilli 23,81 % des voix. Elle était devancée par Thierry Coudert (35,44 %), candidat de l’union des droites et Pierre Pribetich (29,59 %), candidat pour le Nouveau Front populaire. Désistement efficace, puisque le socialiste l’emporte sans grande marge face au RN (53% contre 47%). Fadila Khattabi avait gagné d’un cheveu en 2022, avec un écart inférieur à 100 voix, devant une candidature de LFI.
Sabrina Agresti-Roubache
Dans la 1re circonscription des Bouches-du-Rhône, la secrétaire d’Etat chargée de la Ville et de la Citoyenneté a été l’une des premières à annoncer son retrait, dimanche 30 juin. Fragilisée par la poussée de l’extrême droite, elle n’avait recueilli que 23,57 % des voix, en troisième position derrière la candidate RN, Monique Griseti (45,19 %), et la candidate du Nouveau Front populaire, Pascaline Lécorché (27,27 %). La ministre avait déjà échappé de peu à la défaite en 2022, après avoir été devancée au premier tour par Monique Griseti. C’est pourtant cette dernière, candidate fantôme aperçue à de maigres reprises dans les rues de Marseille, qui va faire ses débuts à l’Assemblée nationale, large gagnante de son duel avec 55,86% des voix.
Patricia Mirallès
Candidate dans l’Hérault, la secrétaire d’Etat chargée des Anciens Combattants et de la Mémoire a mis le temps mais a fini par se désister avant le second tour. «J’ai eu l’espoir jusqu’à maintenant que le candidat arrivé en seconde position m’appelle. Qui a pu avoir un instant le doute que nous n’étions pas républicains ?» s’est-elle estomaquée. Malgré les lenteurs, l’écologiste Jean-Louis Roumégas, à touche-touche avec le candidate de l’union des extrêmes droites Josyan Oliva au premier tour, s’impose de 10 points avec 55,19%. Après une large victoire en 2017, l’union de la gauche et la dynamique du RN ont également failli la faire tomber en 2022.
Dès leur publication par le ministère de l’intérieur le dimanche 7 juillet dans la soirée, retrouvez l’ensemble des résultats par circonscription du second tour des élections législatives 2024 sur le site de Libération.
Mise à jour le 8 juillet,à 1h40, avec les résultats définitifs du second tour.