Quand certains à gauche risquent d’être emportés par le tsunami du vote Rassemblement national, d’autres ont la chance d’être sur des îlots qui surnagent malgré tout. C’est le cas de la dixième circonscription du Val-de-Marne, où Mathilde Panot vient d’être réélue dès le premier tour au nom du Nouveau Front populaire, comme elle l’a annoncé sur X (ex-Twitter). En 2022, l’ex-cheffe de file du groupe La France Insoumise à l’Assemblée avait obtenu 54,84 % au premier tour contre le macroniste Philippe Hardouin (20,79 % des voix), sans toutefois être élue du fait d’une participation trop faible (il faut minimum 25% des inscrits sur les listes électorales pour l’emporter dès le premier tour). Le report en faveur de ce dernier s’était ensuite avéré minimal, lui faisant seulement obtenir 32,37 % au second tour contre un écrasant 67,63 % pour elle.
Le camp présidentiel avait cette fois-ci envoyé dans la bataille Shannon Seban, figure apparue sur les plateaux télé à la suite des attentats du 7 octobre commis par le Hamas en Israël, pour porter la lutte contre une partie de la gauche accusée d’antisémitisme. Déjà candidate en fond de liste pour Renaissance aux élections européennes, elle n’avait pu être élue du fait de leur score médiocre. La jeune femme de 28 ans a porté plainte pour «injure raciste» au cours de la campagne, disant avoir été traitée de «sale sioniste» en marge d’une fête populaire à Ivry-sur-Seine.
«Garde rouge» de Mélenchon
Il est vrai que la circonscription est acquise de longue date à la cause insoumise. Jean-Luc Mélenchon y avait obtenu 45,7 % des voix au premier tour de l’élection présidentielle de 2022, contre 22,6 % pour Emmanuel Macron, et 9,9 % pour Marine Le Pen. Le genre de bastion en or qu’on refile aux affidés du premier cercle. Mathilde Panot est sans conteste de ceux-là. Dans les pas du leader de gauche depuis sa première candidature à la présidentielle en 2012, l’élue de 35 ans a forgé une part importante de l’identité de LFI. Notamment en imaginant la stratégie de conquête des quartiers populaires, inspirée par des méthodes du monde associatif, où elle a fait ses armes comme bénévole à ATD Quart Monde, en parallèle de ses études à Sciences Po Paris.
Populaire auprès de la base, mais peu appréciée des partenaires des autres partis de gauche, Mathilde Panot fait partie de ceux que Jean-Luc Mélenchon désigne souvent comme ses potentiels héritiers. Il lui a confié les clefs de son bureau de président du groupe LFI à l’Assemblée dès l’automne 2021, alors qu’il se lançait pour sa troisième tentative vers l’Elysée. Elle est aussi représentative de la «garde rouge», tel qu’on les surnomme, qui verrouille l’appareil pour empêcher l’existence de voix dissidentes, et qui a sanctionné les députés sortants «frondeurs» comme Alexis Corbière ou Raquel Garrido, en investissant des candidats LFI en face d’eux dans leur circonscription.
Dès leur publication par le ministère de l’intérieur, retrouvez l’ensemble des résultats par circonscription du premier tour des élections législatives 2024 sur le site de Libération.