Elle en «acceptera le verdict». Ce dimanche, Christiane Taubira a fait un pas de plus vers la primaire populaire. C’est le dernier épisode d’une série de péripéties qu’a connue cette initiative citoyenne visant à départager les candidats potentiels de gauche par un vote en ligne. Premier retournement : le 8 décembre, la candidate socialiste Anne Hidalgo annonce, après l’avoir boudée, être favorable à l’organisation d’une primaire. Puis, le 17 décembre, Christiane Taubira fait irruption. L’écologiste Yannick Jadot et l’insoumis Jean-Luc Mélenchon, eux, ferment chaque jour davantage la porte. Et ce, malgré les 300 000 signataires inscrits sur le site. Porte-parole de la primaire populaire, Samuel Grzybowski revient sur ces rebondissements et annonce la suite du programme.
Reportage
Que pensez-vous de l’annonce de Christiane Taubira ?
On la salue évidemment. Elle reconnaît notre primaire, qui s’annonce être le plus gros processus de désignation de cette présidentielle. Nous, on veut investir une candidature de rassemblement qui permette à l’écologie et à la justice sociale de gagner. Ça peut être Taubira, ça peut ne pas être Taubira. Rien ne prouve qu’elle est la favorite. Certes, elle a été plébiscitée sur la plateforme à l’époque où il y avait 130 000 signataires, mais ils sont trois fois plus aujourd’hui [du 11 juillet au 11 octobre, les votants ont exprimé leur préférence pour dix personnalités. Christiane Taubira est arrivée en tête, ndlr].
Si elle l’emporte, cela risque de faire une candidature de plus à gauche… N’est-ce pas en contradiction avec votre projet initial ?
Christiane Taubira n’a pas besoin de nous pour se sentir autorisée à concourir à la présidentielle. Elle a juste choisi de jouer le jeu en reconnaissant notre scrutin. Nous n’avons jamais visé une candidature unique. Ce n’est pas possible. Le but, c’est de gagner en avril. Notre pari, c’est de servir de force de propulsion et de juge de paix à gauche. D’abord, le vainqueur de la primaire aura une légitimité populaire et pourra compter sur notre équipe de 8 000 bénévoles pour lui faire campagne. Ensuite, on aimerait que ce vote soit indicatif pour ceux qui doutent, car un Français sur deux n’a pas encore choisi pour qui il va voter à la présidentielle.
Comment faire si Jadot, Mélenchon, et peut-être Hidalgo, continuent à refuser de participer ?
Depuis le 1er décembre, on ne demande plus aux personnalités plébiscitées par les internautes si elles veulent participer ou pas. Le vote aura lieu quoi qu’il arrive. La question n’est pas de participer, mais de reconnaître le résultat du scrutin.
«Tenons-nous la main pour mourir ensemble», a ironisé Jadot ce dimanche. «Ce n’est pas mon affaire», a répété Mélenchon. Tout de même, cela n’amoindrit-il pas votre initiative ?
(Rires) J’ai entendu Jadot parler du «Temple solaire» ! Mais c’est tout le contraire. Ils peuvent soit mourir chacun de leur côté, soit gagner ensemble. Si les candidats réalisaient que leurs divergences – certes profondes – ne sont rien par rapport à la comète qui se dirige droit vert la terre, le changement climatique, ils pourraient changer la donne.
Hidalgo est moins claire. Elle a dit vouloir y participer. Puis qu’elle n’irait pas si Jadot n’y va pas…
C’est vrai, ce n’est pas toujours facile à comprendre. On a cru qu’elle voulait reconnaître le scrutin, et aujourd’hui elle dit qu’elle n’est pas sûre… C’est à elle de prendre sa décision.
Certains disent qu’elle aurait été refroidie par le système de «jugement majoritaire»…
Ce sont des rumeurs. Ses équipes étaient d’accord. C’était la seule condition non négociable pour nous : les électeurs ne votent pas pour leur candidat préféré ou le moins mauvais. Ils s’expriment sur tous les candidats, en lui attribuant un choix parmi les cinq mentions, entre «excellent» et «à rejeter». Le candidat qui a la meilleure médiane l’emporte.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Le 15 janvier, on dévoilera la liste définitive des personnes présentées au scrutin : sur les dix personnalités plébiscitées par les votants, seules resteront en lice celles ayant confirmé leur candidature à la présidentielle. Les votants devraient donc au maximum avoir sept choix, avec Jadot, Mélenchon, Hidalgo et Taubira, Larrouturou, Marchandise et Agueb-Porterie s’ils venaient à se présenter [les trois personnalités restantes ayant déjà annoncé ne pas y aller]. Sera aussi dévoilée la question posée dans le vote. Ensuite, on ne fera pas la campagne du vainqueur s’il ne respecte pas nos conditions, notamment d’intégrer le «socle commun» [le programme de la primaire populaire] dans son projet présidentiel et de porter une dynamique de rassemblement. Les gens pourront s’inscrire jusqu’au 23 janvier à minuit. Le vote aura lieu du 27 au 30 janvier. D’ici là, on va marteler cette idée simple : 85 % des électeurs de gauche veulent une candidature commune. Les candidats auraient pu s’organiser avant, ils ne l’ont pas fait. Maintenant, c’est à nous, citoyens, de choisir.