La vidéo circule largement sur les réseaux sociaux. On y voit le chef de l’Etat, à la sortie du lycée hôtelier de Tain-l’Hermitage, aller à la rencontre de personnes patientant derrière des barrières. Il y est en déplacement pour la deuxième étape de son «tour de France» lancé pour «prendre le pouls du pays», selon la formule de l’Elysée. «Bonjour, merci à vous», lance Emmanuel Macron. Après l’avoir saisi par l’avant-bras, un jeune homme vêtu d’un tee-shirt lui adresse une gifle. Les gardes du corps du Président se saisissent alors de l’individu.
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Emmanuel Macron giflé: un témoin BFMTV filme l'agression d'un autre angle pic.twitter.com/mP907RtTki
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«Le risque zéro n’existe pas»
Deux personnes ont été interpellées par les forces de l’ordre. «L’homme qui a tenté de gifler le Président et un autre individu sont actuellement entendus par la brigade de gendarmerie de Tain-L’Hermitage», indique la préfecture sans donner d’autres informations concernant leur identité ni leurs motivations. Dans cette même vidéo, juste avant la gifle, est hurlé le cri de guerre royaliste «Montjoie Saint Denis !» ainsi que «A bas la macronie». Selon le procureur de la République de Valence, Alex Perrin, cité par France Info, les deux hommes interpellés sont deux Drômois âgés de 28 ans. Ils n’auraient pas d’antécédents judiciaires, «mais cela demande examen complémentaire», a ajouté le procureur.
De son côté, l’Elysée cherche à minimiser l’incident, parlant plutôt d’une «tentative de gifle». «Les serrages de main ont repris dans la foulée. Le déplacement continue», a encore indiqué l’Elysée. «Macron voulait être au contact des Français, à portée de gifle, à portée de baffe, justifie un conseiller de l’exécutif à Libération. On peut dire qu’il va au bout de sa démarche. De toute façon, le risque zéro n’existe pas. On ne pourra jamais éviter qu’un dingue s’en prenne au Président.» Le maire de Tain-l’Hermitage, présent lors du déplacement présidentiel, a indiqué à France Info qu’Emmanuel Macron «a même dit “Laissez-le, laissez-le”, parce qu’il était par terre et que les forces de l’ordre essayaient de le récupérer».
Dans un entretien au Dauphiné publié ce mardi, le chef de l’Etat a évoqué un «fait isolé», commis par des «individus ultraviolents.» . «Il faut respecter les fonctions dans la République et je ne lâcherai jamais ce combat», a-t-il affirmé. Et d’ajouter chevaleresque : «J’ai continué et je continuerai. Rien ne m’arrêtera.» Peu après l’incident, le Président a d’ailleurs poursuivi sa deuxième étape de son «tour de France», dans la ville voisine de Valence. Dans les rues de la préfecture drômoise, il a échangé avec des habitants, des commerçants, et pris des selfies avec certains d’entre eux. Objectif: rapidement passer à autre chose et minimiser au maximum l’incident.
Appel à un «sursaut républicain»
A l’Assemblée nationale, le Premier ministre a pris la parole devant les députés, peu avant la séance de questions au gouvernement, en appelant «à un sursaut républicain.» «Il en va de notre démocratie», a ajouté le Premier ministre. Plusieurs personnalités politiques ont rapidement réagi, comme Jean-Luc Mélenchon : «Cette fois-ci vous commencez à comprendre que les violents passent à l’acte ? Je suis solidaire du Président», a exprimé sur Twitter le leader des insoumis après la polémique sur ses propos tenus dimanche, et les menaces de mort qu’il a reçues.
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En déplacement dans le Grand Est pour les élections régionales, Marine Le Pen a également commenté la scène lors d’une conférence de presse. «Il est inadmissible de s’attaquer à des responsables politiques, mais plus encore, plus encore, au président de la République parce qu’il est le président de la République», a déclaré la présidente du Rassemblement national. «Si le débat démocratique peut être âpre, il ne saurait en aucun cas tolérer la violence physique. Je condamne fermement l’agression physique intolérable qui a visé le président de la République», a ajouté la candidate à la présidentielle sur Twitter.
Un autre candidat déclaré à l’Elysée, Xavier Bertrand, a lui aussi dénoncé la gifle portée au chef de l’Etat. «Je condamne avec la plus grande fermeté le geste inacceptable dont a été victime Emmanuel Macron, a écrit le président de la région Hauts-de-France. Aucun désaccord politique ne justifiera jamais la violence. Le respect des institutions de la République et de ses représentants est un principe cardinal de notre vie démocratique.»
Des chefs de l’Etat pris à partie
La scène rappelle d’autres épisodes, lors des quinquennats précédents, où des présidents avaient été pris à partie lors de déplacements. En février 2012, le candidat socialiste à la présidentielle avait été enfariné lors d’un déplacement à la Fondation Abbé-Pierre, à Paris. «Agresser le président de la République c’est porter un coup insupportable et intolérable à nos institutions. Face à ce geste inqualifiable, toute la nation doit être solidaire du chef de l’Etat. J’adresse dans ces circonstances tout mon soutien à Emmanuel Macron», a réagi l’ancien président socialiste sur Twitter. En 2008, c’était au tour de Nicolas Sarkozy de recevoir un œuf lors d’une visite à Dublin, en Irlande. Leur prédécesseur Jacques Chirac avait, lui, échappé à un assassinat, lors de la cérémonie du 14 juillet 2002. Un jeune militant d’extrême droite avait alors tiré sur le président de la République avec une carabine, ratant son tir.
Alors qu’il était ministre de l’Economie, Emmanuel Macron avait déjà été visé, le 6 juin 2016, par des manifestants hostiles à la loi travail, qui lui avaient jeté des œufs, lors d’un déplacement à Montreuil, en Seine-Saint-Denis. «Casse-toi», avaient alors crié les manifestants. Lors du mouvement des gilets jaunes, l’effigie du chef de l’Etat avait été symboliquement décapitée, en Charente. Selon le Figaro ce mardi, les deux individus interpellés graviteraient dans la mouvance des gilets jaunes.
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