De nouvelles règles pour le référendum ? Emmanuel Macron a écrit dimanche 5 novembre aux différents chefs des partis politiques pour les convier à une nouvelle réunion à Saint-Denis, après celle du 31 août. L’invitation est cette fois pour le 17 novembre et leur propose, notamment, d’élargir le champ de la consultation des Français aux «questions de société», selon son invitation, que s’est procurée Libération et révélée par le Figaro.
«Nos réflexions sur les pistes d’évolution du référendum devront également être poursuivies», écrit dans un premier temps le chef de l’Etat avant de préciser sa volonté de réviser l’article 11 de la Constitution : «Il s’agirait à la fois de saisir des projets de loi relevant de questions dites “sociétales” comme la fin de vie parfois évoquée, mais également de réformes plus larges touchant plusieurs aspects intriqués entre eux, comme c’est le cas des questions migratoires qui relèvent de sujets régaliens, économiques, sociaux ou même diplomatiques.»
Dans une des «annexes» transmises aux chefs de partis et que Libération s’est également procurée, l’Elysée rappelle que «cet instrument démocratique n’est plus utilisé depuis plus de vingt ans». «Nos concitoyens souhaitent aujourd’hui être mieux associés aux grands choix de la Nation», peut-on lire.
Un RIP simplifié ?
Emmanuel Macron propose également d’abaisser à un million d’électeurs, contre près de 5 millions actuellement, le seuil pour permettre l’organisation d’un référendum d’initiative partagée (RIP), instrument créé lors de la révision constitutionnelle de 2008 de Nicolas Sarkozy mais qui n’a jamais pu être utilisé compte tenu des verrous existants rendant toute consultation, en réalité, impossible. Le chef de l’Etat suggère ainsi d’abaisser le nombre de parlementaires requis (93 contre 185) et de «donner aussi aux citoyens la possibilité de prendre l’initiative» de ce RIP, «alors qu’aujourd’hui seuls les parlementaires peuvent lancer la procédure».
Analyse
En revanche, il ne s’agit pas de transformer cette procédure en un «court-circuit ou une voie d’appel des délibérations parlementaires». «Céder à cette tentation c’est opposer le Parlement et le peuple avec le risque, par le jeu d’une telle concurrence des légitimités, d’une confusion préjudiciable à notre démocratie», explique l’Elysée dans cette même annexe. Par exemple, un RIP ne pourrait pas concerner une loi promulguée «depuis au moins cinq ans», ni porter sur le même thème qu’un projet en cours d’examen au Parlement ou «définitivement adopté» mais «non encore promulgué». Ce délai de cinq ans serait aussi valable pour le Parlement qui ne pourrait revenir sur une décision tranchée par le peuple via un référendum.
Une mission «décentralisation» pour Woerth
Autre sujet que le chef de l’Etat veut aborder avec les chefs de partis le 17 novembre à Saint-Denis : «la situation internationale», soit le conflit entre Israël et le Hamas après les attaques terroristes du 7 octobre. Les différents chefs de parti avaient déjà évoqué avec le Président la situation au Proche-Orient le 12 octobre.
Dans le sillage de la dernière rencontre, le chef de l’Etat a aussi confié «une mission relative à la décentralisation à l’ancien ministre et député Eric Woerth». L’élu de l’Oise et ancien président de la commission des Finances de l’Assemblée n’est pourtant pas réputé pour être le meilleur connaisseur des questions territoriales. En revanche, il ne perd jamais une occasion de s’en prendre aux «dépenses» des collectivités locales et à la question de leurs «compétences». La feuille de route tracée par l’Elysée pour lui est «simplifier, clarifier, rendre plus efficace et restaurer la confiance de nos concitoyens». En clair : comment faire des économies.
Le billet de Thomas Legrand
«Hallucinant» pour Tondelier
Dernier point de réflexion mis en avant par le chef de l’Etat dans sa lettre, le cas de «la Corse, la Nouvelle-Calédonie et plus globalement les outre-mer». «Au-delà de ces territoires, des évolutions plus générales pourraient apparaître souhaitables, dans une logique de plus grande différenciation», écrit aussi Macron dans ce courrier.
Invitée, la secrétaire nationale des Ecologistes, Marine Tondelier a déploré sur Twitter (renommé X) que «les questions environnementales et de justice sociale ne [soient] toujours pas à l’ordre du jour». «C’est assez hallucinant en vrai», a-t-elle fustigé, pointant la «déconnexion», d’Emmanuel Macron. Le coordinateur des insoumis, Manuel Bompard, avait déjà dit qu’il ne se rendrait probablement pas à une prochaine invitation, dénonçant une «comédie». «On est toujours disponible pour faire des propositions, avait-il dit. Mais si c’est pour parler pendant des heures et des heures et qu’il n’en ressorte rien, je ne vois pas l’intérêt d’y retourner.»
Leur homologue du Parti socialiste, Olivier Faure, a lui aussi décliné l’invitation, lundi 6 novembre, dénonçant une «mascarade» : «Quand je vois l’ordre du jour, venir valider le deal qu’[Emmanuel Macron] veut passer avec la droite et l’extrême droite.. pardon, mais je ne suis pas là pour tenir la chandelle.»
Mise à jour lundi 6 novembre après les propos d’Olivier Faure