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Sur le fonds Marianne, «vous n’êtes au courant de rien» : auditionnée au Sénat, Schiappa se défausse et agace

Affaire du fonds Mariannedossier
La secrétaire d’Etat est entendue par la commission d’enquête du Sénat sur la gestion du fonds Marianne, créé après l’assassinat de Samuel Paty.
Marlène Schiappa, ce mercredi au Sénat. (Albert Facelly/Libération)
publié le 14 juin 2023 à 9h09
(mis à jour le 14 juin 2023 à 13h23)

- La commission d’enquête sénatoriale sur le fonds Marianne de lutte contre le «séparatisme» auditionne ce mercredi 14 juin à partir de 10 heures la secrétaire d’Etat Marlène Schiappa. Lors de la création du fonds, en 2021, elle était ministre déléguée chargée de la Citoyenneté à l’Intérieur.

- Marlène Schiappa se défend de toute responsabilité dans l’affaire mais de nombreux éléments démontrent le rôle central qu’elle a joué dans le dossier, au point par exemple de personnellement s’opposer à un projet de SOS Racisme.

- Dimanche 11 juin, la Première ministre, Elisabeth Borne a jugé du bout des lèves qu’il n’était «pas nécessaire» de se séparer de Marlène Schiappa, à l’heure où les rumeurs de remaniement s’intensifient.

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Marlène Schiappa file devant les caméras, Raynal tacle un « fiasco ». Après plus de trois heures d’audition devant les sénateurs, la secrétaire d’Etat n’a pas répondu aux questions des journalistes, filant avec les membres de son cabinet vers la sortie. Devant la presse, le président de la commission Claude Raynal a, lui, déploré un «fiasco», pointant du doigt notamment le «désintérêt de l’exécutif sur le sujet». «Malheureusement, le fonds Marianne, non seulement n’a pas servi, mais a desservi la cause du fait de ce non-suivi», conclut le sénateur socialiste de Haute-Garonne.

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Pour Schiappa, la «méthode peut être améliorée» mais elle n’a pas commis de fautes. De son côté, Marlène Schiappa a livré sa propre conclusion des trois heures d’échanges. «Je prends absolument toute la responsabilité qui est la mienne, la responsabilité politique. Je ne m’en suis jamais dédouané. Je l’ai dit à de nombreuses reprises», pose d’abord la secrétaire d’Etat. Mais ensuite, elle assure ne pas croire «qu’on puisse imputerà un dirigeant public la malversation interne d’une structure à laquelle il fait confiance», référence à la structure de Mohamed Sifaoui. Sur l’attribution des subventions : «Je redis que je n’avais pas d’implication personnelle, que je n’ai pas soutenu de dossier, que j’ai en revanche rendu un avis lorsqu’on est venu me solliciter.» Sur la question du suivi : «Il y a des bilans, un suivi étroit du dossier. Ne pas contrôler la sélection ou l’ingénierie d’un projet ne veut pas dire qu’on ne suit pas un dossier.» «La méthode au-delà de l’impulsion peut être remise en cause, améliorée et clarifiée, concède Marlène Schiappa. Quelles que soient les responsabilités que j’ai ou pas à occuper dans l’avenir, je mettrai en œuvre cela.»

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Une conclusion en forme de réquisitoire. Sans se départir de son affabilité, le président de la commission d’enquête conclut les débats avec un certain nombre de reproches. «Si on reprend les choses, on voit que nos travaux ont montré que des contacts ont eu lieu en amont de la création du fonds avec différents acteurs pour préparer des candidatures, ce qui rend la notion d’inéquitabilité tout à fait juste dans le rapport de l’IGA, commence Claude Raynal. Est-ce que la lutte contre le séparatisme ne méritait pas mieux ? Au-delà des responsabilités d’un secrétaire général pointé par l’IGA, continuez-vous à dénier toute responsabilité dans ce fiasco ?»

Puis le sénateur socialiste essaie d’imaginer ce qu’aurait pu être une autre réponse à la mort de Samuel Paty : «un événement, une réponse, une communication. C’est vieux comme la politique. C’est ancien comme méthode. Mais est ce que c’est pertinent ? En s’appuyant sur de nouveaux acteurs qui n’étaient pas encadrés. Vous auriez pu vous contenter d’amener les associations déjà connues sur le terrain à s’intéresser à votre sujet… Est-ce que vous avez conscience que cette opération fonds Marianne fragilise terriblement cette chaîne de compétence associative qui a mis du temps à se mettre en place ?» Rude.

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Marlène Schiappa reconnaît des «dysfonctionnements». Il aura fallu attendre près de trois heures d’audition pour entendre un vrai mea-culpa. «Evidemment il y a des choses qu’on aurait pu faire différemment. Vous arrivez vous-mêmes à lancer une commission d’enquête, c’est qu’il y a eu des dysfonctionnements dans l’organisation et la gestion du fonds Marianne», a convenu Marlène Schiappa. Laquelle estime qu’il «est nécessaire d’avoir par écrit un certain nombre de textes, même s’il en existe déjà, pour encadrer la manière dont les subventions peuvent être attribuées. Peut-être est il nécessaire de les préciser, quant à l’organisation du suivi et mesures de contrôles qui peuvent être mises en place par l’administration.»

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«Il manque le cœur». Comme un résumé de la tonalité globale de l’audition de Marlène Schiappa, le président de la commission d’enquête Claude Raynal assène : «Vous nous parlez d’un projet que vous avez fait naître et derrière vous nous dîtes «je ne le suis pas». Et ça c’est grave. Quand on est sur des actions-symboles, il faut que ça marche du feu de dieu. Là, vous nous faites des réponses techniques, mais il manque le cœur. Vous n’avez pas suivi cette affaire. Une fois que c’est lancé, tout le reste, on a l’impression que ça ne vous concerne pas.» Par Anaïs Condomines, de CheckNews.

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Pour le rapporteur de la commission des finances, il y a eu «du cafouillage, du mélange des genres». Après plus de deux heures d’audition et d’explications plus ou moins claires, le rapporteur de la commission des finances du Sénat dresse un réquisitoire. «Il y a un vrai mélange qui ne sert pas la cause pour laquelle le fonds Marianne a été mis en œuvre, lance Jean-François Husson. Il y a un problème de ligne directrice. On sent du cafouillage, du mélange des genres parfois, entre vous, le cabinet, le CIPDR, des fonctionnaires entrés dans votre cabinet, tout le processus qui se déroule avec le fonds Marianne, le comité de sélection qui sélectionne… Vous nous dites que vous vous tenez à l’écart mais que vous rendez des décisions…» «Chacun est dans son rôle, balaye Marlène Schiappa. Le ministre défend une politique publique, en rend compte et ensuite l’administration suit.»

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Marlène Schiappa ne convainc pas le rapporteur sur SOS Racisme. Sur le cas SOS Racisme, Marlène Schiappa argue du fait qu’il lui a été demandé une appréciation sur l’octroi de la subvention, qui selon elle fait «débat» au sein du comité de sélection. «On me demande de trancher, on me demande mon avis. Je ne le donne pas tout de suite, Le projet SOS Racisme, tout à fait respectable partenaire de l’Etat, il est proposé action en deux temps, l’une sur les réseaux sociaux, l’autre concerne des activités sportives dans certains quartiers. Or, cette proposition d’action est déjà menée et financée par FIPD qui fait exactement ce travail de prévention et de cohésion. J’émets un avis défavorable. Ensuite, le comité de sélection fait une liste dans laquelle ne figure par SOS Racisme.»

Ce à quoi les sénateurs lui opposent le fait que le comité de sélection avait déjà fait le travail de tri et de sélection qui lui incombait – sur lequel Marlène Schiappa serait donc intervenue a posteriori. La ministre répète alors : «On m’a demandé mon avis, ce n’est pas pour autant que je me suis immiscée !» Le rapporteur de la commission des finances clôt le débat, désabusé : «Ecoutez, vous avez bien compris, au moins on a essayé de donner la matérialité des faits…» Par Anaïs Condomines, de CheckNews.

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Sur SOS Racisme, Marlène Schiappa n’a «aucun souvenir des discussions». Claude Raynal pose l’une des questions qui fâchent : l’intervention supposée de Marlène Schiappa dans la non-attribution d’une subvention à SOS Racisme dans le cadre du fonds Marianne. «Vous dites que vous ne faites que valider le résultat du comité de sélection mais en vérité vous influencez le résultat en supprimant cette attribution, lance le sénateur socialiste. Est-ce que c’est suite à des questions personnelles passées entre vous et l’association en question ?» Marlène Schiappa commence à répondre par une précision sémantique : «Je n’ai pas supprimé de subvention à SOS Racisme. Je rappelle qu’on est sur un appel à projet, on ne parle pas de financement ni de fonctionnement.» Certes. Puis : «A titre personnel, je n’avais aucun souvenir du fait qu’il y ait eu des discussions autour de SOS Racisme dans le cadre du fonds Marianne». La secrétaire d’Etat dit avoir dû remonter des mails pour se souvenir de ce qui s’est passé. «Vous n’oubliez quand même pas tout de votre vie ?», s’étonne Claude Raynal.

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Après les sénateurs, Schiappa attendue par la presse. Dans la salle attenante à celle de la commission d’enquête, une télé retransmet l’audition de la secrétaire d’Etat. Journalistes et fonctionnaires du Sénat patientent. Cuisinée depuis deux heures par les sénateurs, Marlène Schiappa devra répondre à sa sortie aux nombreuses questions des journalistes. Par Victor Boiteau.

il y a 793 jours

«Vous êtes en train de nous dire que vous n’êtes au courant de rien». Le rapporteur de la commission des finances bout. Après plusieurs réponses de Marlène Schiappa niant sa propre responsabilité, Jean-François Husson, le rapporteur général de la commission des finances, développe un propos peu amène pour la secrétaire d’Etat. «Après les évènements très graves à l’origine de la fondation du fonds Marianne [l’assassinat de Samuel Paty, ndlr], le gouvernement avait mis en place une communication pour dire qu’il allait agir. Une ministre, lorsqu’elle est en action, décide d’un plan d’action et de combat, s’assure de la mise en œuvre, il ne s’agit pas que ça se dégonfle comme un ballon de baudruche, tance-t-il. Il y a une distorsion assez importante entre les moyens consacrés à l’examen des candidatures sur un temps très court avec une mise en action super rapide.» Puis, un peu plus tard, un sénateur de Meurthe-et-Moselle s’agae, après une nouvelle réponse évasive : «Vous êtes en train de nous dire qu’avec trois membres de votre cabinet vous n’êtes au courant de rien sur une séquence de trois semaines du fonds Marianne ?»

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Pendant ce temps-là… Tandis que Marlène Schiappa est entendue par les sénateurs, Mohamed Sifaoui, coresponsable de la principale association bénéficiaire du fonds Marianne, est lui auditionné ce mercredi matin par la police, qui enquête sur des soupçons de détournement de fonds publics. Cette audition avait été annoncée mardi par Me Bernard Benaiem, l’avocat de Mohamed Sifaoui, après la perquisition du domicile du journaliste par les enquêteurs de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), en charge des investigations. «Il est important qu’il puisse être auditionné rapidement et démontrer, comme il l’a toujours dit, qu’il n’avait rien à se reprocher dans cette affaire», avait alors indiqué Me Benaiem, rappelant «le combat contre l’islam politique depuis trente ans» de son client.

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Un calendrier serré qui interroge. Le rapporteur de la commission interroge désormais Marlène Schiappa sur l’accélération du calendrier de l’appel à projet du fonds Marianne voulu par le cabinet, et qui a pu conduire à une forme de précipitation. Selon le préfet Gravel, la procédure initialement de trois mois a été réduite à cinq semaines. Réponse de la ministre : «Aucune alerte ne me remonte de la part de l’administration quant à ces délais disant que ces délais pas tenables. Le délai de trois semaines pour l’appel à candidatures est serré mais adapté.» Le rapporteur résume : «Vous n’êtes jamais à l’origine de la décision.» Par Anaïs Condomines, de CheckNews.

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Marlène Schiappa assure qu’elle n’a «pas vu le Printemps républicain dans le cadre du fonds Marianne». Plusieurs sénateurs ont adressé des questions à Marlène Schiappa, auxquelles la secrétaire d’Etat répond à présent. L’une d’entre elles porte sur ses liens supposés avec le Printemps républicain, cette association de défense d’une laïcité stricte. «Je n’ai rien contre le Printemps républicain mais je ne suis pas membre du Printemps républicain, recadre Marlène Schiappa. Dans les sous-entendus et commentaires qui ont été faits, on entend tout et n’importe quoi. On m’attribue des amis et des appartenances. Je ne suis pas membre du Printemps républicain. Je pourrai en être membre, ce n’est pas interdit, mais non. Il n’a pas été associé à la constitution du fonds Marianne, pas à ma connaissance. A aucun moment je ne vais voir le Printemps républicain dans le cadre du fonds Marianne.» Le mouvement n’a effectivement touché aucune subvention du fonds créé par Marlène Schiappa. Mais l’association Reconstruire le commun, mise en cause dans l’affaire, a des liens avec deux de ses membres, dont une qui a organisé plusieurs de ses événements, et a été fondée par un sympathisant.

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Claude Raynal, un sénateur pugnace avec Schiappa. Si Marlène Schiappa avait imaginé vivre une promenade de santé face à Claude Raynal, ce sénateur socialiste au visage rond dégarni et à l’épaisse moustache blanche, la secrétaire d’Etat a rapidement pu se rendre compte que ce ne serait pas le cas. Alors que cette dernière se défaussait sur son cabinet, ce dernier l’a repris à l’ordre. «Il est difficile d’imaginer qu’un ministre et son cabinet ne fonctionnent pas en totale confiance. Je rappelle que sur ce sujet la communication de votre ministère a été extrêmement forte», a-t-il grincé. Finalement rien de surprenant pour un parlementaire, par ailleurs ancien maire de Tournefeuille (Haute-Garonne) de 1997 à 2015, en quête de réponse. C’est lui qui, dès les révélations de l’affaire, s’est procuré, en tant que président de la commission des Finances du Sénat, des documents provenant de l’administration ouvrant ensuite la porte à la commission d’enquête devant laquelle Schiappa se trouve aujourd’hui. Par Sacha Nelken.

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Tous les regards sur Marlène Schiappa.

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Marlène Schiappa réaffirme qu’elle n’a pas été en charge de «l’attribution des subventions dossier par dossier». En défense - pour prouver qu’elle ne s’est pas mêlée de l’attribution de crédits au projet de Mohamed Sifaoui - Marlène Schiappa affirme : «Il ne me revient pas l’attribution dossier par dossier de l’attribution des subventions.» Il est pourtant établi qu’elle a infirmé une décision de subvention proposée pour SOS Racisme, qui lui a été proposée à l’issue du comité de sélection. Par Anaïs Condomines, de CheckNews.

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Le projet de Mohamed Sifaoui était-il déjà choisi avant le comité de sélection ? Chahutée par le rapporteur et le président de la commission sur un éventuel fléchage des subventions au projet de Mohamed Sifaoui courant avril 2021, avant même le lancement officiel du projet Marianne - ce qui tendrait à dire que le cabinet de Marlène Schiappa incitait largement la candidature de l’USEPPM, la ministre a botté en touche, finissant par admettre : «Les membres du cabinet tout comme le CIPDR étaient en soutien du projet de monsieur Sifaoui, mais je n’ai pas d’éléments selon lesquels le cabinet aurait arbitré quelque chose avant le comité de sélection.» Par Anaïs Condomines, de CheckNews.

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«Je ne me défausse pas, je ne me dérobe pas». Le président de la commission d’enquête, Claude Raynal, pousse Marlène Schiappa dans ses retranchements. «Quand il y a une position d’un cabinet, notamment écrite, elle engage son ministre, tance le sénateur socialiste. Dans votre propos introductif, vous n’avez mis en cause ou en jeu votre propre responsabilité. Vous dites que c’est l’administration, votre cabinet. Non madame, quand le cabinet prend une position c’est supposé être celle du ou de la ministre. Et heureusement. Car sinon quelle serait la qualité d’une intervention d’un cabinet si ce n’était la voix de la ministre.» Marlène Schiappa répond : «Je ne me défausse pas, je ne me dérobe pas, j’entends endosser toute ma responsabilité et rien que ma responsabilité. J’ai énormément de défauts mais pas celui de me dérober. A ma connaissance, je ne suis accusée de rien. Je suis là pour vous aider à établir la matérialité et la chronologie des faits. Je n’ai pas non plus à préjuger de la culpabilité de quelque acteur que ce soit.»

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Marlène Schiappa trouvait le projet de Mohamed Siafaoui «trop cher». La secrétaire d’Etat détaille un échange de mails avec des membres de son cabinet qui lui écrivent après avoir reçu Mohamed Sifaoui, qui leur présentait son projet de contre-discours. Elle indique avoir répondu - confirmant ce qui a été divulgué dans la presse : «300 000 euros d’argent public pour ce projet ça me paraît énormissime». Elle ajoute : «Je trouvais que ce projet était trop coûteux. Mon impulsion est de dire c’est trop cher !» Il a pourtant été validé dans le processus de validation. Par Anaïs Condomines, de CheckNews.

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«Ce n’est pas impossible que j’encourage à déposer dossiers». Marlène Schiappa qu’il est «tout à fait probable» qu’elle soit passée «saluer» Mohamed Sifaoui le 22 avril 2021, lors d’un rendez-vous avec son directeur de cabinet. «Mais je ne lui ai pas dit que j’allais lui faire attribuer subventions.» L’avez-vous encouragé à déposer un dossier au fonds Marianne. Réponse : «Ça, ce n’est pas impossible que j’encourage à déposer dossiers, je le fais tout le temps…» Par Anaïs Condomines, de CheckNews.