En résumé :
- Le remaniement a bien eu lieu ce jeudi 20 juillet. Les noms sont tombés au compte-goutte dans l’après-midi, avant officialisation de l’Elysée peu avant 20 heures.
- On dénombre huit nouveaux membres du gouvernement. Parmi les grandes manœuvres : Marlène Schiappa, affaiblie par sa gestion du fonds Marianne, quitte le gouvernement. De même que François Braun et Pap Ndiaye, remplacés par Aurélien Rousseau à la Santé et Gabriel Attal au ministère de l’Education nationale. Aurore Bergé laisse la présidence du groupe Renaissance à l’Assemblée pour rejoindre le ministère des Solidarités.
- Un temps annoncé ce jeudi à 14 heures, le premier conseil des ministres du nouveau gouvernement Borne se tiendra à l’Elysée ce vendredi à 10 heures.
- Larmes, soulagements, hommages… D’ici le conseil des ministres, les traditionnelles passations de pouvoir doivent se tenir dans les différents ministères.
Un remaniement, et maintenant ? Avec peu de surprises, les annonces faites au compte-gouttes jeudi 20 juillet ont surtout marqué par l’absence de cap politique fort. Dans ce contexte, l’«expression» présidentielle prévue dans les prochains jours est très attendue. L’édito de Paul Quinio.
«Une équipe d’âmes damnées qui doivent tout à la macronie». Les réactions sur virulentes à gauche, face aux nominations ministérielles égrenées au fil de l’après-midi. Les flèches se sont concentrées en majorité contre Gabriel Attal, transféré à l’Education nationale, et Aurore Bergé, promue aux Solidarités. Un florilège de réactions à retrouver dans notre article.
La passation de pouvoir à la Santé sera pour demain matin. François Braun cèdera les clefs du ministère de la Santé et de la Prévention à son successeur, Aurélien Rousseau, vers 9 heures demain avenue Duquesne. L’ex-directeur de cabinet d’Elisabeth Borne y prononcera ses premiers mots en tant que ministre.
«Il y aura un vrai changement concret et visible dès l’année scolaire qui arrive», assure Attal. Le nouveau ministre de l’Education nationale Gabriel a fixé «trois priorités» au cours de son discours. «Remettre le respect de l’autorité et les savoirs fondamentaux au cœur de l’école», en est une, Attal insistant sur le «respect de la laïcité». «Si on tente de bafouer l’autorité de nos professeurs (...), je serai à vos côtés», a-t-il promis. L’ex-ministre des Comptes publics a aussi juré de faire du remplacement des professeurs absents «une priorité». «Il y aura un vrai changement concret et visible dès l’année scolaire qui arrive», a-t-il souligné sur le sujet, alors que le «pacte» enseignant mis en œuvre par son prédécesseur et promesse du candidat Macron comporte un volet dédié à juguler le nombre d’absences non-remplacées. Dernier axe : que chaque enfant puisse être «heureux» à l’école en promettant «les meilleures conditions d’apprentissage possibles» via notamment l’enjeu du bâti scolaire et de la rénovation thermique mais aussi en luttant contre le harcèlement scolaire, «une exigence morale».
«Il y aura un avant et un après» : Gabriel Attal enfile son costume de ministre. Le désormais ex-ministre en charge des Comptes Publics a donné ses premiers mots à la tête de l’Education Nationale : «L’école est et doit rester la promesse d’un avenir meilleur, mais elle est aussi le trésor fragile d’une nation qui doute et qui espère», a-t-il notamment dit. Gabriel Attal fait sien l’objectif de «rendre à l’école la mission qui est la sienne : construire le futur de chacun de nos enfants, sans exception, et donc bâtir l’avenir de la nation». S’adressant aux enseignants et personnel de l’Education Nationale : «Vous faites le plus beau métier du monde. Ce métier compte plus que tout car en changeant la vie d’un seul élève, c’est le pays tout entier que vous faîtes grandir. Tout ne sera pas résolu en quelques mois, mais je prends l’engagement très concret qu’il y aura un avant et un après.»
Bercy beaucoup : Thomas Cazenave y trouve ses Comptes publics. Il n’aura pas besoin de visite guidée dans les longs couloirs de Bercy. Nommé ministre délégué aux Comptes publics en remplacement de Gabriel Attal, le député de Gironde Thomas Cazenave, 45 ans, rejoint une maison qu’il connaît bien. Cet ancien élève de l’ENA (également normalien et agrégé d’économie et de gestion) y a fait la connaissance d’Emmanuel Macron quand ils étaient tous deux inspecteurs des finances. Notre profil de ce fidèle de la première heure d’Emmanuel Macron.
Nomination de Gabriel Attal à l’Education : «On a besoin d’un ministre qui soit pilote de son ministère.» L’an passé, tout le monde tombait de l’armoire. Pap Ndiaye ? Ministre de l’Education nationale ? Vraiment ? Cette fois, l’annonce était attendue. Gabriel Attal, jusqu’alors ministre de l’Action et des Comptes publics, a bien été nommé, ce jeudi, rue de Grenelle, après plusieurs jours de rumeurs insistantes sur son retour au sein de ce ministère, où il a exercé comme secrétaire d’Etat en 2018. Les syndicats réagissent à la nomination de Gabriel Attal, c’est à lire ici.
Pap Ndiaye transmet le témoin à Attal. «J’aime à penser et dire que le ministère de l’Education Nationale est le plus beau ministère qui soit. Il est celui qui plonge au plus profond dans la nation, dans l’intime de la société et des familles. Il est le visage le plus bienveillant de l’Etat.» Sur le perron du ministère de l’Education Nationale, Pap Ndiaye donne son discours de départ, synonyme de passation de pouvoir, avec Gabriel Attal nouvellement nommé à ses côtés. En tant que professeur d’histoire, il dit avoir une «pensée» pour Samuel Paty et ses collègues en général, «si essentiels pour le pays et son avenir». Ces derniers doivent «retrouver une place centrale dans notre société», mais cette place «respectable ne dépend pas que d’un ministre. C’est un choix collectif que nous avons la possibilité de faire».
Baiser de la mort : Laure Lavalette, députée RN, salue sur BFM la "liberté de ton" de la nouvelle ministre Sabine Agresti-Roubache, qui "était chez vos confrères l'autre jour en disant qu'elle faisait les mêmes constats que Marine Le Pen sur la politique migratoire"
— Etienne Baldit (@EtienneBaldit) July 20, 2023
L’Elysée officialise le remaniement avec huit nouveaux membres du gouvernement. C’est peu dire qu’il se faisait attendre. Le communiqué de l’Elysée listant les noms qui composent le nouveau gouvernement est arrivé dans les boîtes mail peu avant 20 heures, soit plus de quatre heures après les premières annonces dans la presse. Il acte l’entrée de huit nouvelles têtes au sein du gouvernement, comptant 41 ministres au total. Parmi les nouveaux entrants : Aurélien Rousseau à la Santé, Aurore Bergé aux Solidarités, Thomas Cazenave aux Comptes publics ou encore le maire de Dunkerque Patrice Vergriete au Logement. Trois autres membres du gouvernement changent de poste : Gabriel Attal à l’Education, Sarah El Haïry à la Biodiversité, et Bérangère Couillard à l’Egalité femmes-hommes.
Prisca Thevenot va être nommée à la jeunesse et au service national universel. La députée macroniste va intégrer l’équipe gouvernementale, et récupérer le portefeuille de la Jeunesse et du Service national universel, selon son entourage consulté par l’AFP. A 38 ans, l’élue des Hauts-de-Seine succède à la secrétaire d’Etat Sarah El Haïry qui va désormais être en charge de la Biodiversité au sein de la nouvelle équipe gouvernementale d’Elisabeth Borne.
Dans le rétro de 2023
Fadila Khattabi ministre des Personnes handicapées. Et une députée de plus au gouvernement. Après Thomas Cazenave, Sabrina Agresti-Roubache et Aurore Bergé, la présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale intègre, elle aussi, la nouvelle équipe gouvernementale d’Elisabeth Borne. Elle officiera au ministère des Personnes handicapées à la place de la Modem Geneviève Darrieussecq qui aurait demandé à retrouver sa liberté lors de ce remaniement.
Bérangère Couillard remplace Isabelle Rome, évincée de l’Égalité Femmes-Hommes. Inconnue au bataillon, la désormais ex-secrétaire d’Etat à l’Ecologie Bérangère Couillard reste au gouvernement mais change de poste. Voilà l’ancienne députée de Gironde ministre déléguée à l’Egalité Femmes-Hommes. Elle remplace ainsi la magistrate Isabelle Rome qui ne sera restée qu’une petite année rue Sainte-Dominique. Bérangère Couillard pourrait avoir un peu de mal à se faire accepter par son nouveau secteur. Dans une tribune publiée mercredi, le Collectif Ensemble contre le sexisme appelait au «maintien à son poste» de la ministre déléguée chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Egalité des chances Isabelle Rome. «Ces derniers mois de véritables progrès ont été engrangés […] Laissez-nous travailler avec celles et ceux qui y consacrent déjà toute leur énergie.»
Jamais vu un tel bazar au sommet de l’Etat. Des ministres qui d’auto-nomment, des sortants qui s’expriment alors qu’aucune communication officielle n’est intervenue, un conseil repoussé au vendredi. Tout ça pour un jeu de chaises musicales entre affidés. C’est un Gvt déliquescent
— Olivier Faure (@faureolivier) July 20, 2023
Schiappa réagit à son éviction au micro de BFM TV. Sans attendre l’officialisation, Marlène Schiappa a décidé de prendre les devants pour réagir à son éviction du gouvernement. «Je n’ai pas toujours tout réussi mais j’ai toujours essayé de travailler, d’être à l’écoute des femmes victimes de violences sexuelles ou sexistes notamment», déclare la désormais ex-secrétaire d’Etat chargée de l’Economie sociale et solidaire. «J’ai aussi tâché de sortir le monde politique de son vase vénitien pour dépoussiérer le débat politique», a-t-elle justifié rappelant qu’elle n’avait fait «ni Sciences Po, ni l’ENA». Une façon pour cette «marcheuse des premières heures» de mettre en avant son bilan, alors qu’elle est épinglée pour sa gestion du fonds Marianne. Pour sa prise de parole, l’ancienne ministre n’est pas allée chercher bien loin. Elle a simplement recraché les éléments de langage rédigés par son cabinet que Libé a pu consulter.
Enquête
Sandrine Rousseau dénonce un gouvernement de «peur». Invitée à réagir sur BFMTV aux nominations qui tombent au compte-goutte, la députée EELV de Paris décrit un gouvernement «essentiellement de récompenses pour services rendus pendant la période des retraites. On voit entrer dans le gouvernement les têtes qui ont tenu et qui ont redit de manière très disciplinée les éléments de langage du gouvernement», indique Sandrine Rousseau, ciblant notamment Aurore Bergé. Autre enseignement notable selon elle : «On avait à chaque fois des espèces de figures de la société civile» mais «le macronisme n’est pas capable de supporter la liberté de ces personnalités de la société civile. A chaque fois elles sont exclues du mouvement parce que seule la parole le président compte. […] C’est un gouvernement de peur.»
Donc @Ben_Duhamel is the new Alexis Kohler pic.twitter.com/PuJMmFEByi
— Jérôme Guedj (@JeromeGuedj) July 20, 2023
Thomas Cazenave va être nommé ministre des Comptes publics. Le député Renaissance va occuper ce poste, après le départ de Gabriel Attal pour l’Education Nationale, a appris l’AFP ce jeudi de plusieurs sources au sein de la majorité. Battu dans la course à la mairie de Bordeaux, ce marcheur de la première heure, ex-directeur adjoint du cabinet d’Emmanuel Macron lorsque celui-ci était à Bercy sous le quinquennat de François Hollande, se relance avec cette promotion. Par le passé, cet ancien inspecteur des finances a également occupé des hautes fonctions chez Orange et Pôle Emploi.
Analyse Libé : six nouveaux noms, six sortants et un transfert. L’étrange remaniement est toujours en cours, fuite dans la presse après fuite dans la presse. Du jamais vu. A 17 heures, on dénombrait six entrants, dont la surprise Aurélien Rousseau au ministère de la Santé. L’homme avait quitté ses fonctions de directeur de cabinet d’Elisabeth Borne dimanche. Cinq ministres, délégués ou secrétaires d’Etat sont d’ores et déjà remerciés : Marlène Schiappa, Pap Ndiaye, Jean-Christophe Combe, Olivier Klein et Jean-François Carenco. A 34 ans, macroniste pur sucre, Gabriel Attal quant à lui passe du Budget à l’Education.
Patrice Vergriete débarque au logement en remplacement d’Olivier Klein. Maire divers gauche de Dunkerque depuis 2014, ce polytechnicien avait pour priorité de faire de sa ville un modèle de ville durable. En 2022, elle a été classée par la Commission européenne parmi les «100 villes de l’Union européenne neutres pour le climat et intelligentes d’ici à 2030». L’élu local, qui avait soutenu Emmanuel Macron à la dernière élection présidentielle, avait été nommé en janvier 2023 par le chef de l’Etat à la tête de l’Agence de financement des infrastructures de transport.