En résumé :
- François Bayrou a surpris lors de sa conférence de presse lundi, en annonçant qu’il allait se soumettre à un vote de confiance le 8 septembre à l’Assemblée nationale, réunie en session extraordinaire. Il abat ainsi une périlleuse carte pour faire adopter son plan d’austérité budgétaire de 44 milliards d’euros.
- L’ensemble des partis d’opposition ont prévenu qu’ils comptent bien faire chuter le gouvernement en ne votant pas la confiance dans deux semaines. Sur le papier, le sort du locataire de Matignon semble scellé.
- Les syndicats de salariés, opposés au budget Bayrou comme au projet gouvernemental de réformer encore l’assurance-chômage, ont décidé d’avancer leur intersyndicale à ce vendredi. La Bourse de Paris, elle, a dévissé face à la perspective d’une nouvelle instabilité politique.
Retour à la case départ. Avec le départ annoncé et probable de François Bayrou le 8 septembre, la gauche – qui a remporté les législatives anticipées de 2024 – se remet à croire à son arrivée à Matignon, après deux échecs consécutifs de gouvernements de droite. Dans un communiqué publié lundi 25 août après l’annonce fracassante du Premier ministre, signé par le PS, les Écologistes, Debout de François Ruffin, l’Après des purgés de LFI et Génération. s, mais sans LFI, le NFP assure :«D’ici 15 jours, le gouvernement de Bayrou sera tombé. Nous sommes prêts !» Prêts à quoi ? L’article de Chez Pol.
Renverser Bayrou puis destituer Macron : Libé fait le point sur la procédure, complexe et improbable, que les insoumis menacent d’engager à l’orée du probable renversement du gouvernement, après que François Bayrou a annoncé la tenue d’un vote de confiance le 8 septembre. Lire notre article
Dans un communiqué, Bruno Retailleau a annoncé que LR refuserait de «s’associer au cartel du déni et aux démagogues qui refusent de voir la réalité en face». Le président LR considère que «voter pour la chute du gouvernement [dont il fait partie, ndlr], ce serait voter contre les intérêts de la France». Le ministre de l’Intérieur annonce que son parti fera des propositions «sérieuses et audacieuses» dans les prochains jours. Invitée de BFMTV, la porte-parole des Républicains, Agnès Evren, «regrette que François Bayrou ait essayé de mettre des irresponsables face à leurs responsabilités». La sénatrice se montre également hostile à une nouvelle dissolution : «Il faut absolument éviter cela et j’en appelle à tous les responsables politiques», considérant que «la dissolution est faite pour résoudre une crise et non pas en provoquer une nouvelle».
Sébastien Chenu enfonce le clou, après que Marine Le Pen a annoncé que les députés RN voteront contre la confiance du gouvernement. «François Bayrou tente une ultime manœuvre, et il rencontrera un ultime échec», prédit Le vice-président de l’Assemblée nationale sur Europe 1. Selon le député RN du Nord, le Premier ministre est «comme un meuble dans le paysage», «c’est l’immobilisme satisfait», considérant «qu’il a toujours voulu durer». Dans la lignée de la présidente du groupe RN, Sébastien Chenu appelle à une nouvelle dissolution : «Retournons vers les urnes, c’est désormais possible. Demandons aux Français le choix de la politique qu’ils veulent mener. La politique ça n’est pas simplement des postures, ça n’est pas simplement durer dans le temps comme le fait Monsieur Bayrou. Ce sont des choix de société.»
Réélue à la tête de la chambre basse le 18 juillet 2024 après les législatives anticipées, Yaël Braun-Pivet se prononce contre une nouvelle dissolution sur TF1 : «non à une dissolution, oui pour un travail en commun, oui pour des concessions, oui pour un effort budgétaire partagé, oui pour la responsabilité». Interrogée par ailleurs sur l’éventualité de la voir remplacer François Bayrou en cas de démission du gouvernement, elle balaye cette hypothèse du revers de la main : «je suis très bien à la présidence de l’Assemblée nationale. Et je crois que ma place est à cet endroit-là et uniquement-là».
La présidente de l’Assemblée nationale considère que «tout parti politique qui aspire aujourd’hui à gouverner notre pays, ne peut pas refuser de réduire la dette», ajoutant que «ce serait totalement irresponsable. Invitée de TF1, Yaël Braun-Pivet appelle François Bayrou à être «prêt […] à faire des concessions» et juge que le gouvernement doit prendre en compte des propositions des oppositions, mais à une condition : «je crois que nous pouvons reprendre des mesures du Parti socialiste et d’autres partis, à partir du moment où nous sommes d’accord sur l’objectif à atteindre, qui est la baisse de 44 milliards d’euros de dépenses de l’état».
Et si après la chute plus que probable de François Bayrou le 8 septembre prochain Emmanuel Macron décidait de dissoudre de nouveau l’Assemblée nationale ? Malgré le fait que le chef de l’Etat ait repoussé cette possibilité il y a une dizaine de jours dans Paris Match, les partis sont convaincus que cela reste une hypothèse au vu de l’ampleur de la crise politique. Pour cette raison, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale Boris Vallaud a expliqué ce mardi matin sur BFMTV souhaiter que son parti soit «prêt» en cas de dissolution. Justement, le PS s’est lancé il y a plusieurs semaines dans la préparation d’un «plan dissolution» qui correspond notamment à la mise en place de chefs de file dans toutes les circonscriptions et à une analyse scrupuleuse des résultats des dernières élections pour tenter d’évaluer le risque que représente le RN localement. Et ainsi identifier là où le PS peut se permettre de se lancer face à d’autres candidats de gauche et, à l’inverse, là où il sera contraint de s’allier.
Les socialistes voteront bien «contre la confiance» à François Bayrou le 8 septembre, a confirmé le patron de leur groupe à l’Assemblée sur BFMTV. «Il faut changer de politique, et ce que je constate aujourd’hui, c’est que pour changer de politique, il faut manifestement changer de Premier ministre puisqu’il n’entend pas changer de politique», a déclaré Boris Vallaud. L’élu des Landes fait savoir qu’il a réuni son groupe parlementaire lundi soir, et que celui-ci va présenter des propositions de budget «pour montrer qu’il existe un autre chemin» que celui défendu par le locataire de Matignon. Ce dernier «ne préparait pas la rentrée et le budget, il préparait sa sortie», a encore dénoncé Boris Vallaud. «Il ne choisit pas le dialogue, il choisit la liquidation. La responsabilité est la sienne, elle n’est que la sienne».
Une nouvelle procédure sera lancée le 23 septembre par La France Insoumise, après une première tentative l’année dernière, a annoncé son leader mardi matin sur France Inter, affirmant que c’est «la seule solution pacifique», face à ce qu’il n’hésite pas à qualifier de «crise de régime». A la question de savoir «s’il va de soi» que Jean-Luc Mélenchon sera candidat en cas de succès d’une telle destitution et donc de la tenue d’une élection présidentielle anticipée, l’intéressé éclate d’un rire sonore. «Non il ne pas de soi», réplique-t-il. «Mais ne vous inquiétez pas, il y aura une candidature insoumise et elle gagnera, ou on va tout faire pour.» Un élément de langage récurrent dans sa bouche depuis plusieurs mois, afin d’entretenir un stratégique suspense sur ses intentions. «Macron est un irresponsable et doit s’en aller. Le peuple français doit choisir entre la politique de l’offre et la relance écologique et sociale», assure encore Mélenchon, laissant entendre que seule une présidentielle pourrait permettre de surmonter la crise en cours.
Sans surprise, la Bourse de Paris continue sa plongée. Après avoir fermé avec une baisse nette de 1,59 %, la place boursière de la capitale ouvre en net recul, avec une perte de 1,45 %.
Invité de France 2, Gérald Darmanin a mis sur la table la possibilité d’une dissolution pour trancher ce qu’il nomme «un conflit extrêmement important entre le pouvoir législatif et l’exécutif». «Il vaut mieux pouvoir trouver un compromis […], pose le garde des Sceaux, mais il ne faut pas écarter cette hypothèse», privilégiée par le président de la République en surprenant tout le monde, après avoir essuyé une défaite en juin 2024 aux dernières élections européennes. Le ministre de la Justice, en apparence en tout cas, croit encore au compromis et espère que la discussion «avec l’ensemble des parlementaires» permettra de «convaincre les forces politiques» de voter la confiance.
Invité de France Inter, le ministre de l’Economie Eric Lombard a maintenu l’objectif de 44 milliards d’économies dans son projet de budget 2026. «Sur les 44 milliards, je suis très ferme», a insisté celui dont le sort devrait être scellé le 8 septembre lors du vote de confiance à l’Assemblée. «Nous avons un engagement pris devant l’Union européenne et devant les marchés financiers de faire un ajustement. […] Nous devrons tenir. Mais sur leur répartition, on peut travailler», a réaffirmé le patron de Bercy, alors que François Bayrou entame ce mardi une tournée de négociations avec les partenaires sociaux, d’abord ce mardi avec la CFDT, puis jeudi avec le Medef.
Au lendemain du coup de poker mal embarqué de François Bayrou, le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau a appelé mardi à «un vrai débat public» sur la dette et les mesures pour en sortir, prônant un effort «juste et partagé».
«Nous ne pourrons pas sortir sans effort de cette situation difficile», estime le responsable dans une interview au journal Sud Ouest, tout en refusant de se prononcer sur le vote de confiance annoncé le 8 septembre à l’Assemblée. «La Banque de France n’a pas à se prononcer sur un vote politique ni sur un mouvement social. Elle peut juste rappeler une réalité économique […] : la solution à nos divers défis passe d’abord par notre travail et sa qualité, […] notre destin économique est entre nos mains.»
Combien de députés faudra-t-il pour ne pas voter la confiance ? Pris dans n’importe quel sens, le calcul est assez clair. Même en faisant le plein chez ses alliés du bloc central, il apparait bien que les jours de François Bayrou à la tête du gouvernement sont comptés.
Le parti fondé par Raphaël Glucksmann ne votera pas plus la confiance que les formations de gauche. Incarnée par Aurélien Rousseau et Sacha Houlié, la formation du député européen, qui envisage sérieusement une candidature à la prochaine présidentielle a estimé dans un communiqué, «avec gravité et lucidité sur les conséquences de cette nouvelle crise politique», qu’il «ne peut que refuser sa confiance a priori à un gouvernement qui s’exonère du dialogue républicain et sincère qui seul permet de construire un chemin».
A force, certains socialistes commencent à trouver ça insultant : peut-on vraiment les imaginer cautionner le plan budgétaire esquissé par François Bayrou ? Alors que le Premier ministre a annoncé un vote de confiance le 8 septembre, et malgré la pression exercée par le gouvernement, qui les appelle inlassablement à la responsabilité, le Parti socialiste refuse de plier. Comme les insoumis et les écologistes qui ont déjà annoncé qu’ils voteraient «pour faire tomber le gouvernement», les socialistes se dirigent vers un vote contre. Du côté du Rassemblement national, les chances de survie de Bayrou à Matignon ne sont pas plus épaisses.
Le Premier ministre a décidé de recourir à l’article 49 alinéa premier de la Constitution. Si la confiance n’était pas accordée, elle entraînerait la chute du gouvernement, la première par ce biais depuis 1955. A lire ci-dessous :
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Certains vont tenter ce mardi matin d’assurer le service après-vente de l’annonce de François Bayrou : la présidente macroniste de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet sera sur TF1 à 7 h 35, en quasi-stéréo avec le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot sur RTL à 7 h 40, puis le ministre de l’Economie Eric Lombard sur France Inter à 7 h 50, avant le ministre chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola sur France Info à 8 h 30. D’autres seront moins tendres : le vice-président du RN Sébastien Chenu sera sur CNews /Europe 1 à 8 h 10 et le patron de LFI Jean-Luc Mélenchon sera au micro de France Inter à 8 h 20.