Le leader de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, a appelé vendredi 4 octobre à «mettre des drapeaux palestiniens partout où c’est possible», en réaction à une circulaire du ministre Patrick Hetzel sur le «maintien de l’ordre» dans les universités à quelques jours du 7 octobre, date anniversaire des attaques terroristes du Hamas en Israël. Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a justifié cette mise en garde par une série de manifestations propalestiniennes cette semaine à Paris devant Sciences-Po et l’Institut des langues orientales, actions qui vont selon lui «à l’encontre des principes de neutralité et de laïcité».
Le ministre de l'Enseignement supérieur a écrit une lettre pour demander qu'on ne parle pas de Gaza à l'université parce qu'elle est laïque.
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) October 4, 2024
C'est un abus de pouvoir. Parler de géopolitique n'enfreint pas la laïcité. Je demande à la jeunesse de ne pas accepter cet interdit. pic.twitter.com/6W9PslTyY1
La circulaire communiquée vendredi par le gouvernement souligne ainsi «l’obligation pour les présidents d’université et les directeurs d’établissements d’enseignement supérieur de veiller au maintien de l’ordre public au sein de leur établissement», «le principe de laïcité et d’indépendance «de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique» du service public de l’enseignement supérieur» et «leur devoir de signaler au procureur de la République toute infraction dont ils auraient connaissance dans le cadre de leurs fonctions».
Tactique
«C’est un abus de pouvoir», a estimé Jean-Luc Mélenchon lors d’une réunion politique à Paris. Le ministre «dit que comme l’université est laïque, il ne faut pas parler de Gaza», mais «parler de géopolitique n’est pas attentatoire à la laïcité», a-t-il développé. «Je demande à la jeunesse étudiante de s’insoumettre, de ne pas accepter cet interdit», a poursuivi le patriarche insoumis, objectant qu’«à l’université, on parle d’adultes majeurs citoyens […] donc ils disent ce qu’ils veulent, parce qu’on est dans un pays libre». «Alors je recommande qu’à partir du 8 [octobre] on mette des drapeaux palestiniens partout où on peut, de manière que cette personne n’ait pas le dernier mot», a-t-il ajouté.
«Pour que les Libanais sachent qu’on ne les a pas oubliés»
Quelques minutes après, Jean-Luc Mélenchon a également suggéré qu’«un drapeau qu’on pourrait mettre avec celui des Palestiniens, c’est celui du Liban», où les bombardements de l’armée israélienne contre le Hezbollah ont fait plus d’un millier de morts depuis dix jours. «L’armée libanaise ne dispose d’aucun moyen de combat et n’a pas la possibilité de protéger ses propres frontières», a-t-il déploré, jugeant que «c’est une hypocrisie totale à partir de là de dire que le Hezbollah pose un problème».
«Le Hezbollah est une composante du peuple libanais et ce n’est pas à nous de décider qui est une bonne composante et qui est une mauvaise», a-t-il insisté, soulignant que «le peuple libanais a le droit à la souveraineté sur son territoire». Avant d’encourager à nouveau ses troupes : «Mettez des drapeaux libanais, pour que les Libanais sachent qu’on ne les a pas oubliés, qu’on ne les abandonne pas au meurtre [et] à la violence du voisin terrifiant qu’ils ont le malheur d’avoir à leur côté.»
«Des propos dangereux»
«Ce sont des propos dangereux, qui risquent d’importer ce conflit au sein de nos campus», a réagi Eric Berton, président d’Aix-Marseille Université, avec ses 80 000 étudiants, regrettant que «certains veuillent instaurer le chaos pour des intérêts politiques personnels».
«Bien sûr qu’on regrette ce qui se passe à Gaza et au Liban, mais les étudiants juifs sur nos campus n’ont rien à voir avec ce qui s’y passe et l’université doit rester un refuge dans cette tempête», a ajouté l’universitaire. Pour lui, «il faut préserver la sérénité sur nos campus, l’urgence n’est pas de diviser les étudiants».
«Notre jeunesse est déjà très fracturée, entre une jeunesse aisée et une jeunesse en proie à une vraie pauvreté, et c’est ça le vrai combat à mener», a développé Eric Berton, selon qui «le mieux serait de mettre plus d’argent pour la jeunesse, qui a besoin qu’on lui donne le temps de la réflexion, qu’on lui donne les clefs de la connaissance, les clefs d’une démarche intellectuelle rigoureuse, qu’on la protège de la surinformation et des idées toute faites».
Mise à jour à 17 h 27, ajout de la réaction du président d’Aix-Marseille Université.