«Marine Le Pen n’est pas en terre conquise ici, et ne le sera jamais.» C’est un cri du cœur, celui de Mathéo, 21 ans, stagiaire, et membre du collectif antifasciste du bassin minier, dans le Pas-de-Calais. Pourtant, sa grand-mère, qui votait Jean-Luc Mélenchon, choisit désormais les bulletins Rassemblement national : Marine Le Pen à la présidentielle dès le premier tour, Caroline Parmentier aux dernières législatives. Il s’en désole. «Le premier quinquennat de Macron a fait tellement de mal que j’ai vu les gens basculer, raconte-t-il. Ils se disent qu’on ne peut pas avoir pire, ils sont au-delà de la colère, ils ont de la haine. Macron a réussi à adoucir le RN. Ils pensent que ce sont les seuls qui peuvent le battre.»
Ce mardi soir au Passage à niveaux, un tiers-lieu à Béthune, beaucoup des militants antifascistes rassemblés partagent cette forme de blessure, dans l’intime des familles. Ils sont venus écouter deux sociologues spécialistes de l’extrême droite, pour se former, «se blinder», disent-ils. Sur les tables, des affiches, «Sans fachos, le bassin minier est plus beau», à prendre et à coller, mais pas à Lille, où la présence militante est bien suffisante. Caroline, 52 ans, mère au foyer et fière de l’être, a rompu avec ses tantes. «Elles sont polonaises, françaises par le mariage, et ne jurent que par le RN», rouspète-t-elle. «C’est comme si mes cousins avaient oublié que nous avons subi le racisme», constate Amandine, 34