Convoqué par le Parquet national financier (PNF) ce lundi 13 octobre à 14 heures, Nicolas Sarkozy est sorti peu avant 14 h 30 de son rendez-vous où il a appris la date et les modalités de son incarcération. L’ex chef de l’Etat, qui n’avait fait aucune déclaration après cet entretien, sera incarcéré le mardi 21 octobre à la prison de la Santé à Paris, a appris l’AFP de sources concordantes.
Contactés par l’AFP, ni l’avocat de Nicolas Sarkozy, Christophe Ingrain, ni le PNF n’ont souhaité s’exprimer sur la date et le lieu de l’incarcération de l’ex-président, une première dans l’histoire de la République française. En fin de journée, des sources proche du dossier ont cependant indiqué à l’AFP que l’ex-président devrait se présenter le 21 octobre à la prison de la Santé (14e arrondissement) pour y être écroué, confirmant une information de RTL.
La maison d’arrêt de la Santé est une des deux seules en région parisienne, avec Fleury-Mérogis (Essonne), à disposer d’un «quartier vulnérable» (QPV), où sont détenues les personnalités. Mais l’ex-président pourrait aussi y être placé à l’isolement pour assurer sa sécurité.
Un procès en appel dès le premier semestre 2026
L’ex-président de la République a été condamné le 25 septembre à cinq ans de prison ferme pour «association de malfaiteurs» – bien que relaxé pour corruption – dans l’affaire libyenne, qui porte sur le financement de sa campagne présidentielle de 2007. Le tribunal avait de surcroît prononcé un mandat de dépôt à son encontre (à la différence de Claude Guéant et Brice Hortefeux, eux aussi condamnés à de la prison ferme dans le même dossier), soit l’exécution provisoire de sa peine, nonobstant les nombreux appels qui ont aussitôt été effectués. La peine a toutefois été assortie d’un «effet différé», soit une incarcération dans un délai de quatre mois, contrairement à l’homme d’affaires Alexandre Djouhri et au banquier Wahib Nacer, condamnés respectivement à six et quatre ans de prison ferme avec mandat de dépôt immédiat.
Une fois Nicolas Sarkozy incarcéré, le calendrier du procès en appel devrait s’accélérer, peut-être dès le premier semestre 2026. D’ici là, il pourrait et devrait déposer une demande de liberté conditionnelle, mais sans éviter donc un premier passage par la case prison. Il pourrait être logé à celle de la Santé à Paris, qui possède un quartier pour personnes vulnérables (QPV, parfois surnommé quartier VIP), avec des cellules individuelles de 9m2 dotées de douches et plaques de cuisson. Comme une source judiciaire l’avait affirmé à CheckNews, «les conditions de détention seront fixées par l’administration pénitentiaire après échange avec le PNF».
L’agenda judiciaire de Nicolas Sarkozy s’accélère, donc, avec l’arrêt de la Cour de cassation le 26 novembre dans l’affaire Bygmalion, qui concerne cette fois le financement de sa campagne à l’élection présidentielle de 2012, avec doublement du plafond de dépenses autorisées. Si sa condamnation à un an de prison (la cour d’appel l’atténuant avec six mois de sursis sur douze) pour financement illégal de campagne électorale est confirmée par la plus haute instance judiciaire, il sera bon pour un deuxième bracelet électronique. Comme celui qu’il avait arboré une première fois à sa cheville lors du procès libyen après sa condamnation définitive dans l’affaire des écoutes téléphoniques, dite Bismuth (du nom de son pseudo pour utiliser une ligne parallèle, se sachant mis sur écoutes par la justice française). Mais si Nicolas Sarkozy est prochainement incarcéré dans l’affaire libyenne, la pose d’un bracelet dans le dossier Bygmalion serait alors superfétatoire.
Justice
«Je ne veux pas de votre compassion»
Dans le dossier libyen, Nicolas Sarkozy usera de tous les recours, en appel et cassation bien sûr, mais aussi jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme. Dans un entretien au JDD trois jours après sa lourde condamnation en première instance, il proclamait : «Je me battrai jusqu’à mon dernier souffle pour faire reconnaître mon honnêteté.» Et de prophétiser, un brin optimiste : «Je vaincrai.»
En attendant l’incarcération, sa vie mondaine ne s’est pas arrêtée. Il y a eu sa présence au Parc des princes pour le match PSG-Auxerre (victoire 2-0, de quoi réchauffer le cœur de ce fan de foot) le 27 septembre, à peine prononcée sa condamnation, comme si de rien n’était. Puis un coup de fil d’Emmanuel Macron et une visite de Gérald Darmanin le lendemain de sa condamnation selon Mediapart. Et en point d’orgue, le 8 octobre, un «pot de départ» dans un huppé pavillon du bois de Boulogne, ne réunissant pas moins de 150 personnes. Dont Rachida Dati et Emmanuel Moulin, secrétaire général de l’Elysée. Selon le Figaro, Nicolas Sarkozy n’y serait passé qu’une petite demi-heure, sans boire d’alcool évidemment, comme d’habitude, mais en prononçant ces quelques mots toujours très offensifs : «Je ne veux pas de votre compassion mais de votre indignation. Je suis affecté, mais ce n’est que le début de l’histoire.» Mais au risque, comme souvent, d’en faire un peu trop : «Moi, ce qui m’est arrivé, ça peut arriver à tout le monde.» Sauf que tout le monde n’est pas Nicolas Sarkozy, dont le casier judiciaire ne cesse de se garnir.
Mise à jour à 18 heures, avec la date de l’incarcération de Nicolas Sarkozy