Pendant 30 minutes, pour sa première grande interview à la télé depuis sa nomination, François Bayrou a reconnu la difficulté de ses tractations avec les partis pour former un gouvernement, après une réunion de deux heures trente à Matignon. Il a aussi évoqué la crise humanitaire à Mayotte et assuré offrir une petite ouverture au PS sur la réforme des retraites, en «reprenant» le chantier, mais sans suspendre la loi.
Un gouvernement ce week-end ?
François Bayrou n’a pas encore formé son gouvernement mais le promet pour très bientôt. «Dans le week-end, il faut qu’un gouvernement soit présenté, je pense. En tout cas avant Noël». Il reste plus que jamais convaincu d’un «Himalaya». «Tout le monde spécule sur le chaos, dit-il, moi je crois qu’on peut y arriver, que le chemin existe, c’est peut-être d’un optimisme délirant mais si on ne réussit pas alors c’est la dernière station avant la falaise».
Un budget à la mi-février, le 49.3 pas exclu
François Bayrou a dit espérer l’adoption d’un budget «à la mi-février», alors que les travaux parlementaires ont été interrompus par la motion de censure qui a renversé le précédent gouvernement. «J’espère qu’on peut l’avoir à la mi-février. Je ne suis pas sûr d’y arriver», a déclaré le Premier ministre, qui a précisé qu’il repartirait de «la copie qui a été votée» au Parlement avant la censure. «Je n’utiliserai pas le 49.3, sauf s’il y a blocage absolu sur le budget», a-t-il lâché. Autrement dit, il n’exclut pas d’y recourir. D’où la méfiance du PS qui a dit n’avoir «pas de raison de ne pas» le censurer.
Reprise du chantier de la réforme des retraites
Le Premier ministre refuse une «abrogation» de la réforme, comme le demandent le gauche et le RN. En revanche, il pense qu’on «peut trouver une organisation différente, mais il va falloir trouver des financements». Dans la journée, Matignon informait que le Premier ministre souhaitait «reprendre sans suspendre» la réforme des retraites. «Je dis “on reprend“, et pas “on suspend”, parce que quand on suspend on ne reprend pas ensuite, explique-t-il. Je dis : “je reprends le chantier”, c’est beaucoup.» C’est pour lui «une porte ouverte» vers le Parti socialiste.
Retailleau maintenu à l’Intérieur ?
«Oui. Je pense que M. Retailleau a montré ces dernières semaines et derniers mois qu’il avait trouvé des décisions et des orientations qui répondaient à une partie de ce que l’opinion demande», a-t-il déclaré, alors que le maintien de Bruno Retailleau à Beauvau est une ligne rouge pour le PS, avec qui François Bayrou cherche à nouer un accord de non-censure.
Bilan effrayant des victimes à Mayotte
Sur France 2, le Premier ministre François Bayrou refuse d’établir un bilan définitif des victimes du cyclone Chido. «Ont été recensés 31 victimes mais la crainte de beaucoup est qu’il y a sous les décombres des femmes et homme pris dans les bidonvilles où étaient des SDF souvent en situation irrégulière, ce qui fait craindre un bilan beaucoup plus grave, tout le monde tremble à l’idée du nombre réel de victimes.» Le Premier ministre a espéré que la reconstruction de Mayotte, dévastée par le cyclone Chido, puisse se faire dans des délais «brefs», «peut-être deux ans», une tâche qui sera «surhumaine».
«Eperdu d’admiration» pour Gisèle Pelicot
«Elle est très courageuse, elle a dû affronter le pire du pire, le plus dégueulasse par l’homme avec qui elle partageait sa vie. On peut difficilement imaginer pire comme trahison», a jugé François Bayrou en ce jour de verdict dans le procès de Mazan, se disant «éperdu d’admiration devant cette incroyable audace d’exposer le pire du pire pour les autres».
De la «peine» pour Nicolas Sarkozy
Interrogé sur la condamnation de l’ancien président de la République à un an de port de bracelet électronique mercredi dans l’affaire des écoutes, François Bayrou a partagé sa «peine» : «J’ai affronté Nicolas Sarkozy durement, quand j’ai appris ce verdict ça m’a fait peine pour lui, pour les siens, je sais ce que c’est que de se trouver devant l’appareil de la justice». Il en sait quelque chose, lui qui a été relaxé en février dans l’affaire des assistants parlementaires européens de l’UDF puis du Modem, affaire pour laquelle le parquet a interjeté appel.