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Libération
Analyse

Guerre Hamas-Israël : Macron fait vœu d’unité

Conflit israélo-palestiniendossier
Dans son allocution jeudi 12 octobre, le Président a souligné la gravité de l’attaque terroriste, où plusieurs Français ont été tués et enlevés, tout en invitant Israël à mener des actions «proportionnées» contre Gaza. Et appelle à l’«unité» nationale pour éviter l’importation du conflit en France.
Emmanuel Macron, à Paris, ce jeudi 12 octobre. (Ludovic Marin/AFP)
publié le 12 octobre 2023 à 21h04

«Un séisme en Israël, au Proche-Orient, et bien au-delà.» Plutôt discret depuis l’attaque du Hamas en Israël samedi 7 octobre, Emmanuel Macron a choisi la solennité d’une allocution télévisée de dix minutes pour s’adresser aux Français jeudi soir. «Israël a connu l’attaque terroriste la plus tragique de son histoire», a-t-il déploré d’emblée, comme pour mieux souligner la gravité de l’événement qui a aussi coûté la vie à 13 citoyens français.

Cinq jours après l’attaque terroriste du Hamas, suivie de représailles meurtrières à Gaza, le chef de l’Etat est à la recherche d’un équilibre. Comment soutenir Israël attaqué et condamner le Hamas sans négliger la situation de la population civile de Gaza, menacée par la riposte de Tsahal ? «Ce n’est pas une guerre entre les Israéliens et les Palestiniens, dit-il. C’est une guerre menée par des terroristes contre une nation, un pays, une société, des valeurs démocratiques.» Le Président s’en prend à plusieurs reprises au Hamas, «un mouvement terroriste» et rappelle le «droit à se défendre» de l’Etat hébreu. Les pays membres de l’Otan ont invité Israël à répondre «de manière proportionnée». Emmanuel Macron souhaite lui aussi «des actions ciblées, mais en protégeant les populations civiles, car c’est le devoir des démocraties». La réponse doit être «forte et juste, forte parce que juste», espère-t-il.

Une «centaine d’actes antisémites»

La condamnation du Hamas ne va pas sans arrière-pensées politiques. Le chef de l’Etat adresse un coup de griffe, sans les nommer, aux dirigeants de la France insoumise. «Rien ne peut justifier le terrorisme. Il ne peut jamais y avoir de “oui, mais”», sermonne-t-il, alors que Jean-Luc Mélenchon et ses troupes ont refusé d’employer le terme d’emblée pour condamner l’attaque du Hamas samedi. «Ceux qui confondent la cause palestinienne et la justification du terrorisme commettent une faute morale, politique et stratégique», tance-t-il encore.

Le Président semble inquiet d’une importation du conflit israélo-palestinien en France, alors qu’une «centaine d’actes antisémites» a été recensée depuis samedi. Notamment «des gens arrêtés à l’entrée d’une école ou d’une synagogue avec une arme blanche», a précisé le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, jeudi. Emmanuel Macron s’emploie donc à rassurer la communauté juive : «La République sera là pour vous protéger et elle sera impitoyable avec tous les porteurs de haine.» 582 écoles, lieux de culte ou de culture font l’objet d’une protection renforcée, selon le chef de l’Etat. Dans une sorte de «en même temps» confessionnel, il souligne aussi «l’inquiétude de nos compatriotes de confession musulmane que les amalgames l’emportent sur la raison».

Insuffisant pour LFI. Sitôt l’allocution terminée, son coordinateur national, Manuel Bompard, a jugé «inacceptable» que le Président ne condamne pas «clairement» les frappes sur Gaza.

Clivage sur l’aide humanitaire

Pour illustrer «l’unité» qu’il appelle trois fois de ses vœux au cours de son allocution, Emmanuel Macron a reçu à déjeuner les onze chefs des partis représentés au Parlement, ainsi que la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. Au cours de cet «échange de respect du pluralisme», il leur a donné la primeur de quelques informations : la présence de quatre enfants parmi les 17 ressortissants français portés disparus et les actions menées par la France pour les libérer. Tant Eric Ciotti (Les Républicains) que Marine Tondelier (Europe Ecologie-les Verts) ont exprimé leur confiance dans les autorités françaises sur ce point. Un clivage gauche - (extrême) droite s’est malgré tout révélé sur la question de l’aide humanitaire à la population palestinienne. Ciotti a demandé son «gel immédiat […] tant que nous ne disposerons pas de garanties solides quant à l’usage de ces fonds et tant que des otages seront détenus par le Hamas». Sans obtenir gain de cause. L’exécutif avait déjà annoncé son maintien en début de semaine.

Quelques heures après ce déjeuner apaisé, Gérald Darmanin a adressé aux préfets une consigne plus polémique. Il leur a enjoint dans un télégramme d’interdire les «manifestations propalestiniennes, parce qu’elles sont susceptibles de générer des troubles à l’ordre public». La police a dispersé une manifestation place de la République à Paris en début de soirée. L’«unité» qui, selon Emmanuel Macron, «nous protégera de tous les débordements, de toutes les dérives, de toutes les haines», a tout d’un vœu pieux.