Menu
Libération
Rififisc

«Impensable» : une trentaine de députés macronistes se lèvent contre la hausse des impôts envisagée par Michel Barnier

Gouvernement Bayroudossier
Dans un texte publié par «la Tribune» samedi 28 septembre, 27 élus dont Aurore Bergé ou Marie Lebec défendent la stabilité fiscale, signalant une fracture supplémentaire entre le nouveau Premier ministre et le parti présidentiel.
L'ancienne ministre et députée macroniste Aurore Bergé, le 23 septembre à l'Assemblée nationale. (Ian Langsdon/AFP)
publié le 29 septembre 2024 à 8h47
(mis à jour le 29 septembre 2024 à 18h11)

On a connu des oppositions moins virulentes. Dans un texte publié par la Tribune samedi 28 septembre, 27 députés du groupe Ensemble pour la République (EPR) à l’Assemblée ont fait part de leur opposition aux vues de Michel Barnier en matière fiscale. En l’espèce, toute augmentation d’impôts sur les contribuables les plus aisés et les entreprises en bonne santé, y compris «de manière exceptionnelle et temporaire», comme l’évoque le Premier ministre depuis plusieurs semaines. Les arbitrages sur la fiscalité, eux, sont encore en cours. Contacté par Libération, le cabinet de Laurent Saint-Martin, ministre du Budget, affirme que le texte n’est pas finalisé et donc que sa transmission au Haut Conseil des finances publiques pas encore effectuée. Selon nos informations, des articles ont toutefois été transmis au conseil d’Etat avant leur arbitrage afin de les «sécuriser» juridiquement au cas où ils seraient retenus.

Un héritage macroniste

Ces hausses d’impôts pour les plus aisés seraient en revanche un retour en arrière inenvisageable pour cette petite trentaine de députés, emmenés par Mathieu Lefèvre et Charles Rodwell, parmi lesquels Aurore Bergé, Marie Lebec ou l’ancien chef de groupe Sylvain Maillard, tous incarnant l’aile droite du parti présidentiel. «Il nous paraît […] impensable qu’après sept années de baisse d’impôts, ce soit l’alliance du bloc central qui finisse par renoncer à la stabilité fiscale pour les augmenter», écrit le bataillon, attaché à ce qui a fait la marque économique de la macronie, de la suppression de l’ISF à l’établissement d’une flat tax sur les revenus du capital.

La désindexation des barèmes d’impôts sur le revenu sur l’inflation semble avoir été écartée par le ministre du Budget lui-même, en commission des Finances à l’Assemblée mercredi. Mais une hausse exceptionnelle pour les plus riches reste sur la table. «Nous allons faire appel, de manière exceptionnelle et temporaire, à ceux qui peuvent contribuer à cet effort», avait d’ailleurs affirmé Michel Barnier vendredi dans le Journal de Saône-et-Loire. Ce qui pourrait également concerner les grandes entreprises, le Medef disant ne pas s’y opposer, tout en posant ses conditions. Selon le Monde, des réflexions se poursuivent par ailleurs sur l’écotaxe automobile et la fiscalité des logements meublés de courte durée, comme AirBnB.

Fidèles à leur dogme, les élus estiment en revanche que «le rétablissement des comptes passe avant tout par la baisse de la dépense publique», «la création de richesses» et «le plein-emploi». Pour y parvenir, pas de grande innovation non plus : côté optimisation de la dépense, les 27 appellent au «culte de la performance de nos politiques publiques», «la simplification de l’action publique», la «suppression de dizaines d’agences et de comités Théodule» et «la baisse du nombre de fonctionnaires». Le tout, bien sûr, «en préservant nos services publics de proximité».

Sujet de division entre macronistes

Côté création de richesses et plein-emploi, les signataires de la tribune déroulent là aussi un pensum de l’action macroniste ces sept dernières années : il faudrait mener à bout «des réformes courageuses», citant «celle de l’assurance-chômage». La même réforme à propos de laquelle la ministre de l’Ecologie, la macroniste Agnès Pannier-Runacher, bouleversée par sa campagne législative dans les Hauts-de-France, a changé d’avis. Et surtout, les mêmes réformes fort peu goûtées par la nouvelle ministre du Travail, elle aussi issue des rangs d’EPR, Astrid Panosyan-Bouvet.

Ce positionnement des députés ne surprendra personne, puisque plusieurs figures de la macronie, de Gabriel Attal à Gérald Darmanin, avaient mis en suspens leur soutien au gouvernement si ce dernier devait augmenter les impôts. Dimanche, pour sa rentrée politique à Tourcoing, ce dernier a maintenu la menace : «Je sais que nous serons nombreux à ne pas pouvoir soutenir un gouvernement qui augmenterait les impôts : cela serait contraire à tout ce que nous avons fait de positif pour les Français.» Sur le sujet, qui ne rassemble pas tous les macronistes, et en attendant une présentation du budget début octobre par le ministre macroniste Laurent Saint-Martin, Michel Barnier n’a pas varié. Dans le Journal de Saône-et-Loire, il reprenait l’idée d’une augmentation pour les plus aisés, tout en assurant qu’il protégerait «de toute augmentation fiscale ceux qui sont sur le terrain, qui travaillent, qui produisent». Insuffisant pour ces élus.

Mise à jour : le 29 septembre à 18 h 11 avec les propos de Gérald Darmanin.