Sans grand suspense, François Bayrou obtient le prolongement de son bail à Matignon, ce jeudi 16 janvier, après le rejet de la motion de censure déposée par La France insoumise, qui n’a recueilli que 131 voix. La majorité étant fixée à 289, il en aura donc manqué 158. Mais le maintien du Premier ministre ne faisait guère de doute : la droite et le Rassemblement national avaient annoncé qu’ils ne voteraient pas le texte, rendant son adoption numériquement impossible. L’incertitude du jour portait donc davantage sur l’attitude du Parti socialiste, divisé depuis la déclaration de politique générale, et qui a finalement tranché en dernière minute pour ne pas le censurer. Déçus par la prise de parole de Bayrou il y a deux jours, certains parlementaires roses estimaient que celui-ci ne leur avait pas accordé suffisamment de «concessions remarquables» pour justifier, à leurs yeux, de ne pas le renverser.
Un point en particulier concentre leur crispation. Alors que les socialistes exigeaient une «suspension» de la réforme des retraites, pour revenir à l’âge de départ à 62 ans le temps d’en mettre une nouvelle sur le métier, l’exécutif leur accorde de convoquer une conférence sociale, avec une première réunion vendredi, réunissant des représentants syndicaux et patronaux, chargés de trouver en trois mois «un accord d’équilibre et de meilleure justice».
Mouvement fracturé
En l’absence d’accord, c’est la réforme d’Elisabeth Borne et l’âge de départ à 64 ans qui continuerait de s’appliquer. Outre le choix du dispositif, c’est aussi le refus de repasser quoi qu’il arrive par le Parlement qui indispose au PS. Mercredi soir devant les sénateurs, le Premier ministre avait tenté de préciser les choses sous la forme de trois scénarios : «Désaccord, on en reste au texte actuel. Accord complet : on fait un texte de loi. Accord partiel : on traduit l’accord partiel dans un texte d’amélioration de notre système de retraite.»
Un plan qui ne convainc toujours pas tout le monde chez les socialistes. Un bureau national exceptionnel du parti a donc été convoqué quelques heures avant le vote jeudi midi pour arrêter une position commune sur la censure, dans un mouvement fracturé entre ceux qui désirent poursuivre les négociations en dépit de cette déception, et ceux qui veulent en acter l’échec. Alors que l’issue des discussions n’avait pas encore été annoncée à 14 heures, François Bayrou leur a adressé une lettre contenant deux nouvelles «concessions» : le maintien de la taxation des hauts revenus déjà contenue dans la copie de Michel Barnier, et, notamment, l’abandon du passage d’un à trois jours de carence en cas d’arrêts maladie dans la fonction publique. Qui les a finalement rassemblés (à l’exception de huit d’entre eux) pour s’abstenir de voter la censure.