Menu
Libération
Baston

Investiture présidentielle à droite : Muselier et Ciotti gros gnons

Congrès Les Républicainsdossier
Le président de la région Paca reproche à Eric Ciotti sa complaisance et sa proximité avec Eric Zemmour. Il menace de quitter LR si le député remporte le congrès d’investiture.
President of Provence-Alpes-Cote d'Azur (PACA) region, Renaud Muselier casts a vote during the opening session of the newly elected regional assembly, in Marseille, southern France on July 2, 2021. (Photo by CLEMENT MAHOUDEAU / AFP) (Clément Mahoudeau/AFP)
publié le 27 octobre 2021 à 14h03

Le répit n’aura donc pas duré. Ces derniers temps, les Républicains se félicitaient à haute voix – quitte à surjouer – du bon déroulement de la campagne en vue du congrès du 4 décembre censé désigner le candidat du parti pour la présidentielle. Fini les guerres intestines de la primaire de 2016, désormais chaque candidat se vante au nom de l’unité de ne pas se laisser aller à des attaques contre ses petits camarades. Mieux encore, les déserteurs d’autrefois, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, sont revenus au bercail, symbole soi-disant d’une unité totale retrouvée.

Mais c’était compter sans le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, qui mardi est venu électriser la campagne interne. Invité de BFM TV et de RMC, l’ancien secrétaire d’Etat aux affaires étrangères a affirmé que si le droitier Eric Ciotti venait à l’emporter le 4 décembre prochain, il «quitterai [t] immédiatement LR». «Cela voudrait dire que je suis archiminoritaire dans ma famille politique», ajoute-t-il. Un parti qu’il a rejoint en 1998 à l’époque RPR.

Muselier reproche à Ciotti sa complaisance et sa proximité avec le polémiste d’extrême droite multicondamné pour incitation à la haine raciale Eric Zemmour, qui fait chaque jour un pas de plus vers une candidature à l’élection suprême. «C’est bonnet blanc et blanc bonnet», assure sur BFM Muselier après avoir confondu deux fois les deux hommes dans ses réponses à Jean-Jacques Bourdin.

Depuis le début de la précampagne présidentielle, le député des Alpes-Maritimes affirme effectivement qu’en cas de second tour Emmanuel Macron-Eric Zemmour, son choix se porterait sur le second. «Quand vous voyez que Monsieur Zemmour dire que Marine Le Pen est de gauche, on se dit «quel est le niveau de la dérive «? C’est une vraie dérive à l’intérieur de ma famille politique que je combats» développe le président de la région Paca. Lui, voterait Emmanuel Macron sans hésiter affirme-t-il.

«Une droite qui se rétrécit»

Au cœur de la brouille entre les deux hommes également, le positionnement très droitier du sarkozyste de la première heure. Pour Muselier, Eric Ciotti représente «une droite qui se rétrécit, s’affaiblit et nous amène à 8 %», allusion aux désastreuses élections européennes de 2019 où le président du parti de l’époque, Laurent Wauquiez, avait choisi François-Xavier Bellamy pour conduire la liste. «Ses propos dans le cadre de sa campagne ne correspondent en rien à l’héritage de notre famille politique, de ce que nous avons fabriqué avec De Gaulle, Chirac, Sarkozy ou Seguin, ajoute Muselier. Il y a toujours des barrières avec l’extrême droite, il n’y a jamais eu des clins d’œil, des caresses et des mamours.» En proposant, dans sa campagne interne, de mettre fin au droit du sol ou au regroupement familial, Ciotti se rapproche effectivement largement des thèses du Rassemblement national.

Le Niçois a répondu du tac au tac à son désormais meilleur ennemi. «Renaud Muselier est le petit télégraphiste d’Emmanuel Macron. Il soutiendra Emmanuel Macron quoi qu’il arrive», affirme-t-il sur France Info. Et d’ajouter : «Renaud Muselier avance masqué mais en réalité comme certains de ses amis au Sud qui sont passés dans le camp d’Emmanuel Macron, il est totalement macronisé.»

Un mélodrame dont la droite a le secret

Il se joue aussi, depuis les dernières élections régionales, quelque chose de plus personnel entre les deux élus LR. Les alliances en Paca avaient alors constitué un joli champ de bataille. Muselier plaidait pour accueillir des macronistes sur sa liste face au RN Thierry Mariani. Ce à quoi s’était vigoureusement opposé Ciotti, par ailleurs président de la commission nationale d’investiture de LR. Cela avait entraîné un mélodrame dont la droite a le secret. Durant quelques jours, les Républicains retireront leur soutien et leur investiture à Muselier avant de finalement se raviser à la suite du retrait pur et simple de la liste macroniste. Le député des Alpes-Maritimes votera finalement pour le président sortant après avoir un temps affirmer l’inverse.

Depuis, Muselier a gardé la dent dure et n’hésite pas à le faire savoir. Dans la campagne interne pour la direction de l’Association des maires de France (AMF), le président de la région Paca a par exemple choisi de soutenir le maire UDI de Sceaux, Philippe Laurent, plutôt que le maire de Cannes, David Lisnard, qui avait fortement critiqué sa stratégie pendant les municipales.

D’Eric Ciotti, Muselier dit aujourd’hui sur BFM qu’il inspire la «haine», le «rejet», l’«antipathie», la «mesquinerie», la «méchanceté» et la «trahison». L’ancien président des régions de France a d’ailleurs adressé le 22 octobre un courrier à Christian Jacob pour lui demander de retirer à Eric Ciotti les fonctions de président de la commission d’investiture le temps de la campagne, en vertu d’un article des statuts du parti. C’est beau l’unité.