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Libération
Merci de l'avoir posée

IVG dans la Constitution : comment va se dérouler le Congrès de Versailles ?

Ce lundi 4 mars, députés et sénateurs inscriront dans le texte de 1958 «la liberté garantie à la femme d’avoir recours à l’interruption volontaire de grossesse». «Libération» vous explique le déroulé de cette journée historique.
La salle de l'hémicycle du congrès réunissant les deux chambres du parlement (Assemblée nationale et Sénat) au château de Versailles. (Ludovic Marin/AFP)
publié le 4 mars 2024 à 6h24

Pas de suspense mais une charge symbolique importante : sauf énorme surprise, les 925 parlementaires (577 députés et 348 sénateurs) invités à se réunir en Congrès par le président de la République à Versailles offriront une très large majorité au projet de loi constitutionnelle «relatif à la liberté garantie à la femme de recourir à l’interruption volontaire de grossesse». Passage en revue de cette rare étape institutionnelle, la première depuis 2008 sous Nicolas Sarkozy.

Une séance (plutôt) courte

Honneur à la Présidente. Le Congrès sera présidé ce lundi par celle qui occupe le «perchoir» à l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. Car les députés, élus au suffrage universel contrairement à leurs collègues sénateurs, sont considérés comme les plus proches du peuple. La députée Renaissance des Yvelines lancera donc, à 15h30, la séance, assise sous une reproduction d’un tableau d’Auguste Couder, représentant l’ouverture des états généraux à Versailles le 5 mai 1789. Devant elle, les 925 parlementaires, placés dans l’hémicycle par ordre alphabétique, écouteront d’abord un discours du Premier ministre, Gabriel Attal, puis les représentants des groupes politiques (10 pour l’Assemblée, 8 pour le Sénat) qui se succéderont à la tribune dans l’ordre décroissant de leurs effectifs. Cinq minutes (pas plus) pour chaque orateur. Le vote aura lieu ensuite dans des salles voisines. Le résultat est attendu aux alentours de 18h30.

Un vote «pour» a priori sans surprise

Une fois le projet de loi constitutionnelle voté à l’Assemblée nationale et au Sénat dans les mêmes termes, Emmanuel Macron avait le choix entre un référendum ou la convocation du Congrès. La première option a été écartée pour éviter à la France un débat «pour ou contre l’IVG» et la réactivation de positions réactionnaires archiminoritaires en France. Versailles s’est donc imposé. Il faudra une majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés pour inscrire, après le 17e alinéa de l’article 34 de la Constitution, «la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse». Cela ne devrait poser aucun problème. Sur le papier, le Parlement comptant 925 députés et sénateurs, la majorité est à 555 voix. Entre les votes du Sénat mercredi 28 février (267 pour) et celui des députés (493), on parvient à 760 parlementaires favorables à cette inscription dans la Constitution.

Une modification «scellée»

Après le vote, la tradition veut que le texte adopté soit authentifié par un sceau du Congrès, apposé par un imposant appareil sous forme de balancier à vis, avant d’être transmis au gouvernement. Une cérémonie finale de scellement de la Constitution par le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, pourrait ensuite avoir lieu le 8 mars, journée internationale des droits des femmes, en présence d’Emmanuel Macron, selon l’AFP.

Pourquoi une réunion à Versailles ?

Parce que l’histoire de France est complexe… Le château de Versailles, construit pour Louis XIV et sa monarchie absolue, est aussi un lieu républicain. Ainsi après la défaite de 1870 contre la Prusse et alors que Paris est secoué, en 1871, par la Commune, la représentation nationale y siège entre mars 1871 et août 1879, date à laquelle les députés de la IIIe République installée en 1875, reviennent à Paris siéger au Palais-Bourbon. Sous les IIIe et IVe Républiques, l’aile du Midi du château de Versailles sert à élire les présidents de la République au suffrage universel indirect. Cette salle qui abrite un gigantesque hémicycle aux sièges rouge foncé, dispose de la taille nécessaire pour accueillir plus de 900 parlementaires. Sous la Ve République, 21 révisions constitutionnelles ont déjà été adoptées par le Congrès, lors de seize réunions. Il existe deux autres motifs depuis 2008 pour le réunir : autoriser l’adhésion d’un Etat à l’Union européenne ou entendre une déclaration du président de la République. Cette dernière possibilité a été utilisée quatre fois : d’abord par Nicolas Sarkozy (2009), puis par François Hollande (2015) et Emmanuel Macron (2017 et 2018). Depuis une loi de juillet 2005, seuls «la salle des séances du Congrès et ses accès sont affectés à l’Assemblée nationale et au Sénat» et «les autres locaux nécessaires à la tenue du Congrès du Parlement, sis au château de Versailles, sont, en tant que de besoin et gratuitement, mis à la disposition de l’Assemblée nationale et du Sénat».