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Jarnac, un passage obligé pour tout candidat socialiste à la présidentielle

Hidalgo candidate à la présidentielle 2022dossier
Ce samedi, Anne Hidalgo se rend sur la tombe de François Mitterrand pour lui rendre hommage à l’occasion du 26e anniversaire de sa mort. Avant elle, de nombreux candidats PS à la présidentielle ont fait le traditionnel pèlerinage, en quête de filiation.
En 2011, Martine Aubry et Ségolène Royal, toutes deux candidates à la primaire socialiste pour la présidentielle de 2012, s'étaient rendues à l'hommage à Mitterrand, à Jarnac. (Sébastien Calvet/Libération)
publié le 8 janvier 2022 à 8h04

Au Parti socialiste, le temps passe. Beaucoup de militants partent mais certaines traditions restent. Surtout chez les candidats à l’Elysée. Parmi ces coutumes, une se déroule (presque) chaque mois de janvier précédant une présidentielle, le 8 précisément : le candidat du parti à la rose et au poing se rend à Jarnac, en Charente, ville où l’ancien président socialiste François Mitterrand est né et enterré. Comme la plupart de ses prédécesseurs, l’actuelle candidate du PS, Anne Hidalgo, fait le déplacement ce samedi pour le 26e anniversaire de la mort du premier président socialiste de la Ve République. Elle y fera l’itinéraire classique : de la maison natale de «Tonton» au dépôt de gerbe au cimetière des Grands-Maisons.

Jarnac est un passage obligé pour tout socialiste qui souhaite entrer à l’Elysée. «Personne n’est obligé de rien, affirme d’une prudence exagérée l’ancien ministre de Mitterrand Hubert Védrine, aujourd’hui à la tête de la fondation au nom du président socialiste. Mais je constate que le souvenir de Mitterrand est resté très puissant en dépit de nombreuses controverses, son rayonnement est encore très important, les candidats y vont aussi sans doute parce qu’ils pensent que pour le peuple de gauche ça garde une symbolique importante.»

«Une filiation historique»

«François Mitterrand est le leader socialiste le plus historique, une référence. Venir à Jarnac, c’est marquer une filiation», embraye Julien Dray, à qui l’ancien chef de l’Etat avait offert une circonscription dans l’Essonne en remerciement de son travail avec SOS Racisme. En Charente, chaque prétendant du PS à l’Elysée vient invoquer Mitterrand à sa façon, selon le sens qu’il entend donner à sa campagne. «S’ils reconnaissent tous la symbolique puissante de Mitterrand, ils ne se rattachent pas aux mêmes aspects de sa carrière : certains viennent se placer en filiation directe, d’autres prennent plus de distance, certains viennent se placer dans les pas du Mitterrand “classique union de la gauche”, d’autres se retrouvent plus dans la France unie de 1988», explique Hubert Védrine.

En 2011, Ségolène Royal, alors candidate à la primaire socialiste, était venue jouer à fond la carte de la filiation, expliquant depuis Jarnac vouloir «succéder» à Mitterrand. Elle profitait alors d’une interview au Monde pour rappeler les sept années passées dans son entourage à l’Elysée et au sein du gouvernement Bérégovoy. Martine Aubry, elle aussi présente en Charente (la première secrétaire du PS se présentera à la primaire quelques mois plus tard), adressera dans son discours un message piquant à sa meilleure ennemie : «La politique ce n’est pas parler de soi.» Cinq ans plus tôt, en 2006, Royal – qui deviendra quelques mois plus tard la candidate investie par le PS – avait, en revanche, choisi de ne pas se rendre à Jarnac pour l’anniversaire des dix ans de la mort de Mitterrand, laissant en plan les éléphants du parti, tous présents sous la pluie. L’ancienne conseillère à l’Elysée avait alors préféré rencontrer la présidente chilienne, Michelle Bachelet, à l’occasion d’une tournée en Amérique du Sud.

Hidalgo, «dans une sorte d’héritage»

En 2012, le vainqueur de la primaire, François Hollande, avait lui refusé de se placer en héritier du «sphynx». «J’ai ma propre démarche, ma propre histoire, mon propre parcours», avait-il alors insisté depuis le village charentais, tout en multipliant les parallèles entre la vie de Mitterrand et sa propre candidature. En 2017, Benoît Hamon n’avait, en revanche, pas fait le traditionnel pèlerinage, se démarquant, comme Royal dix ans plus tôt, des hiérarques de sa famille politique.

Ce samedi, Anne Hidalgo devrait, à Jarnac, se placer «dans une sorte d’héritage» de l’ancien président, selon son entourage. L’héritage d’une gauche socialiste qui «a su transformer la France», précise-t-on dans le camp de la maire de Paris. Cette dernière n’est pourtant pas la plus mitterrandienne des socialistes. «Elle n’est pas nourrie spécifiquement de la pensée de Mitterrand, ses inspirations sont diverses et, s’il en fait partie, ses filiations se trouvent plus du côté de Jospin ou Delors», souffle un de ses proches. La candidate PS devrait surtout multiplier les parallèles entre la carrière de l’ancien président et l’actualité, en insistant fortement sur le Mitterrand «qui a su unir la gauche», explique son entourage. Elle qui depuis plusieurs semaines répète à l’envi que sans candidature unique, la gauche est amenée à disparaître. Pour l’instant sans succès.