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Libération
Confirmation

Jean-Marie Le Pen a reconnu en 2019 avoir torturé en Algérie, selon «le Monde» : «Je trouve ça normal que l’on extorque le renseignement de tueurs organisés»

Guerre d'Algérie (1954-1962), un conflit historiquedossier
Le fondateur du FN avait admis auprès d’une journaliste en 2019 s’être livré à de telles pratiques lors de la guerre en Algérie, a révélé le quotidien ce vendredi 10 janvier, trois jours après sa mort.
Jean-Marie Le Pen pendant la guerre d'Algérie, en 1957. (Sipa)
publié le 11 janvier 2025 à 18h00

Il l’avait déjà fait près de six décennies avant, avant de se rétracter. Le fondateur du Front national, Jean-Marie Le Pen, mort le 7 janvier, avait reconnu en 2019 auprès d’une journaliste avoir pratiqué la torture en Algérie, sans utiliser le mot, selon des déclarations publiées par le journal le Monde vendredi. «Moi je trouve ça tout à fait normal, naturel, que l’on extorque le renseignement de tueurs organisés», avait-il expliqué le 4 décembre 2019 à la journaliste du Monde, Ivanne Trippenbach. «Je le fais sous les ordres de mon capitaine. On prend les risques qui sont liés à la guerre», avait-il ajouté, au cours d’un entretien enregistré à son domicile de Rueil-Malmaison.

Au cours de cette interview, l’ancien finaliste de l’élection présidentielle de 2002 avait justifié ne pas être gêné par une telle pratique contre des personnes «qui frappaient aveuglément dans les restaurants, les bals, avec des bombes». «Il manquait plus que ça, qu’ils lèvent le doigt en disant : “et les droits de l’homme ?” Ben oui, mais vous ne respectez pas les droits de l’homme, donc on va vous appliquer vos méthodes. Le type doit vous dire où sont les bombes, c’est lui qui va fixer la durée de son supplice. On ne fait pas ça par plaisir. S’il parle, son malheur s’arrête», avait-il dit.

L’ancien soldat du 1er régiment étranger de parachutistes (REP) de la Légion étrangère avait reconnu en novembre 1962 dans le journal Combat avoir «torturé parce qu’il fallait le faire» à Alger en 1957, avant de faire publier un démenti, et de contester au fil des années s’être livré à de telles pratiques. Des accusations de torture étayées par différentes enquêtes, et «une quinzaine» de témoignages recueillis de 1957 à 2002, selon l’historien Fabrice Riceputi, auteur en janvier 2024 du livre Le Pen et la torture.

«La torture et les exécutions sommaires ont été très nombreuses»

Au lendemain de la mort du fondateur du FN, l’historien Benjamin Stora a réaffirmé lors d’une interview le 8 janvier sur France Info qu’il était possible que Jean-Marie Le Pen ait torturé lors de la bataille d’Alger, citant les témoignages recueillis par la journaliste du Monde, Florence Beaugé, en 2002, tout en soulignant que Jean-Marie Le Pen «n’était qu’un exécutant de la bataille d’Alger». «Ce n’est pas un décideur, un décideur politique de la bataille d’Alger, ce sont d’autres décideurs qui sont importants à mes yeux et qui restent importants. Ce sont ceux qui étaient au pouvoir, c’est Robert Lacoste et François Mitterrand en particulier, qui étaient de la gauche socialiste. […] François Mitterrand était garde des Sceaux […] au moment de la bataille d’Alger […] au moment où la torture et les exécutions sommaires ont été très nombreuses», a estimé Benjamin Stora.

Jean-Marie Le Pen est mort ce mardi 7 janvier, à l’âge de 96 ans, et doit être inhumé ce samedi à La Trinité-sur-Mer (Morbihan). Les obsèques, ont démarré en début d’après-midi, en présence de Marine Le Pen et de quelques proches. De nombreuses forces de l’ordre ont été déployées dans la commune d’environ 1 800 habitants. Une centaine d’entre eux, dont un escadron de gendarmes mobiles, ont été mobilisés pour éviter tout débordement.