Une «mesure radicale», «circonscrite à Mayotte». A peine arrivé ce dimanche 11 février sur l’île de l’océan Indien confrontée à une grave crise migratoire, le ministre de l’Intérieur a annoncé «la fin du droit du sol». «L’inscription de la fin du droit du sol à Mayotte [se fera] dans une révision constitutionnelle que choisira le président de la République», a ainsi déclaré Gérald Darmanin. Il a également affirmé que le gouvernement va «diviser par cinq les regroupements familiaux».
Cette visite intervient trois semaines après le début d’un mouvement de colère contre l’insécurité et l’immigration à Mayotte, qui voit les rayons de ses supermarchés se vider et les risques de pénurie poindre, alors que la contestation s’amplifie. Des «collectifs citoyens» mahorais, exaspérés par l’insécurité permanente, l’immigration illégale et, selon eux, l’absence de réponse de l’Etat, ont érigé des barrages en plusieurs points de l’île, paralysant totalement la circulation.
Témoignages
Le ministre de l’Intérieur, accompagné de la nouvelle ministre déléguée aux Outre-mer, Marie Guévenoux, doit aborder sur place la crise sécuritaire et préparer une opération «Wuambushu 2», «contre la délinquance et l’immigration illégale».
«Il ne sera plus possible de devenir français si on n’est pas soi-même enfant de parent français», a précisé Darmanin, assurant que cela «coupera littéralement l’attractivité» que peut avoir Le 101e département français, confronté à une forte pression migratoire en provenance des Comores voisines.
Le ministre a affirmé que la suppression du droit du sol à Mayotte, ainsi que le durcissement du regroupement familial permis par la loi Immigration votée en décembre, permettront de «mettre fin au visa territorialisé», un dispositif empêchant les détenteurs d’un titre de séjour mahorais de venir dans l’Hexagone. Sa suppression est l’une des principales revendications des collectifs d’habitants en colère qui paralysent l’île depuis le mois dernier. «Puisque nous aurons beaucoup moins de titres de séjours et que nous n’aurons plus la possibilité d’être français lorsque l’on vient à Mayotte, les visas territorialisés n’ont plus lieu d’être», a
assuré le ministre de l’Intérieur.
Selon lui, la suppression de ce dispositif doit être actée dans un projet de loi Mayotte – annoncé de longue date et confirmé le 30 janvier par Gabriel Attal – qui sera déposé à l’Assemblée nationale «dans les semaines qui viennent».
«Kwassa-kwassa»
Département français le plus pauvre de France, Mayotte est peuplé de 310 000 habitants, selon l’Insee – probablement beaucoup plus selon la Chambre régionale des comptes –, dont 48 % d’immigrés comoriens ou d’autres pays d’Afrique. La plupart arrivent clandestinement à bord de barques de pêche traditionnelles, les «kwassa-kwassa», depuis l’île comorienne d’Anjouan, distante de seulement 70 kilomètres.
Dans le cadre de l’opération Wuambushu lancée au printemps 2023, des centaines de policiers et gendarmes supplémentaires avaient été déployés à Mayotte pour tarir le flux d’arrivées de migrants des Comores et combattre la délinquance et l’habitat insalubre. Mais nombre d’habitants ont jugé ses résultats décevants. Fin 2023, des affrontements violents entre bandes de jeunes de villages rivaux avaient notamment fait trois morts.
Gérald Darmanin et Marie Guévenoux doivent visiter ce dimanche 11 février le stade de Cavani, dans un quartier de Mamoudzou, où l’installation de migrants venus de l’Afrique des Grands Lacs cristallise les tensions depuis le début 2024.
Mise à jour : ajout à 11 h 05 de davantage de contexte.