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Censure

La loi immigration est «mort-née» pour la droite et l’extrême droite, une «véritable leçon d’Etat de droit» pour la gauche

Loi immigrationdossier
Le Conseil constitutionnel a censuré ce jeudi 25 janvier de nombreuses mesures du projet de loi immigration. De quoi énerver la droite qui accuse les sages d’avoir fait de la politique et «soulager» la gauche, qui voit les dispositifs les plus droitiers retirés.
Pour Eric Ciotti, ici à Paris en décembre, «une réforme constitutionnelle apparaît plus que jamais indispensable». (Albert Facelly/Libération)
publié le 25 janvier 2024 à 18h14

Le couperet est tombé ce jeudi 25 janvier 2024. Saisi par le président de la République, la présidente de l’Assemblée nationale et les députés et sénateurs de gauche, le Conseil constitutionnel a décidé de censurer largement le projet de loi immigration adopté dans la douleur le 19 décembre dernier. Les sages ont notamment jugé inconstitutionnels le délit de «séjour irrégulier» pour les étrangers, l’instauration de quotas migratoires fixés par le Parlement ou plusieurs mesures censées restreindre le droit du sol. «Le Conseil constitutionnel valide l’intégralité du texte du Gouvernement : jamais un texte n’a prévu autant de moyens pour expulser les délinquants et autant d’exigence pour l’intégration des étrangers !» fanfaronne le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, sur X, dans la foulée de la publication de la décision.

Car finalement, seules des mesures ajoutées au texte initial à la demande de la droite n’ont pas passé le tamis de la rue de Montpensier. Ce que ne manquent pas de souligner les macronistes et notamment les plus irrités par la version très droitière sortie de la commission mixte paritaire. «Le Conseil constitutionnel valide le projet de loi initial du gouvernement qui peut désormais expulser les délinquants, régulariser les travailleurs et mettre en œuvre les procédures simplifiées», écrit le président macroniste de la commission des Lois de l’Assemblée Nationale, Sacha Houlié, qui avait voté «contre» le texte, malgré les pressions d’Emmanuel Macron.

«Cette censure était attendue»

Sans surprise, le président du parti Les Républicains, Eric Ciotti fait, lui, grise mine. «Le Conseil constitutionnel a censuré la loi immigration. Ils ont jugé en politique plutôt qu’en droit. Cette censure était attendue par Emmanuel Macron et la gauche», a-t-il grincé sur les réseaux sociaux. Pour que la France se dote des moyens nécessaires – à ses yeux – pour lutter contre l’immigration, le député des Alpes-Maritimes estime qu’«une réforme constitutionnelle apparaît plus que jamais indispensable». Et d’ajouter : «Cette censure est une capitulation : elle abandonne de nouveau la France à tous les vents de l’immigration massive et va en sens contraire des volontés nettement exprimées par le peuple français et par ses représentants.» Dans la foulée, LR exige du gouvernement de reprendre les dispositions censurées dans un nouveau texte.

Après ce retrait des propositions les plus radicales de la loi, les représentants de l’extrême droite martèlent, eux, par la voix du président du RN, Jordan Bardella, sur X, que «la seule solution, c’est le référendum sur l’immigration». L’eurodéputé dénonce également «un coup de force des juges, avec le soutien du président de la République lui-même». «Le Conseil constitutionnel censure les mesures de fermeté les plus approuvées par les Français : la loi immigration est mort-née», ponctue-t-il.

Une «baffe monumentale pour le gouvernement»

A l’inverse, la gauche, à l’instar de la présidente du groupe écolo à l’Assemblée nationale, Cyrielle Chatelain, a rapidement fait part de son «soulagement» devant cette censure partielle. «L’infâme loi immigration largement censurée par le Conseil constitutionnel. Les fondamentaux de notre République rappelés à Macron et son gouvernement ! Une véritable leçon d’Etat de droit envoyée par le Conseil», se félicite la secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier, promettant de «continuer à lutter pour que la loi ne soit pas promulguée». «Satisfaction après la décision du Conseil constitutionnel, abonde le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure. Le gouvernement portera comme une tache indélébile l’appel à voter une loi s’alignant sur les positions historiques de l’extrême droite sous la pression de LR.»

Pour Ian Brossat, sénateur PCF, c’est une «baffe monumentale pour le gouvernement sur la loi immigration. La démonstration de leur incompétence, de leur lâcheté, et de leur rupture avec les valeurs de notre République. Quand on joue avec le feu, on se brûle». Le coordinateur de La France insoumise, Manuel Bompard, estime, lui, que «la loi est totalement amputée et qu’elle n’a aucune légitimité». Pour lui, comme pour le PS, il ne reste donc qu’une seule solution : qu’elle soit «retirée».