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Libération
Saisine

La Nupes conteste la loi de finances rectificative devant le Conseil constitutionnel

Les députés de gauche dénoncent notamment la suppression de la redevance audiovisuelle. Pour le professeur de droit public, Serge Slama, les sages pourraient «saisir cette occasion» pour fixer des «exigences minimales » sur son financement.
Jeudi 4 août dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. (Magali Cohen/Hans Lucas. AFP)
publié le 5 août 2022 à 19h52

Bis repetita. Fin juillet, les députés insoumis avaient saisi le Conseil constitutionnel pour contester la loi sanitaire. Ce vendredi, tous les groupes parlementaires de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes) lui ont demandé de vérifier la conformité à la Constitution de la loi de finances rectificative 2022 (LFR), adoptée jeudi par le Parlement. Dans un communiqué, l’intergroupe de la gauche unie reproche au texte d’être «contraire à plusieurs principes constitutionnels».

Les élus insoumis, socialistes, communistes et écologistes soulèvent ainsi trois mesures qui, selon eux, posent problème : la monétisation des RTT, la suppression de la redevance audiovisuelle et une méconnaissance du principe de «sincérité budgétaire». Dans leur communiqué, il assurent ainsi que le rachat des RTT est un «cavalier budgétaire», c’est-à-dire une disposition législative qui n’a pas sa place dans le cadre d’une loi de finances.

Autre point soulevé : la coalition estime que la loi «méconnaît le principe de sincérité budgétaire en raison de la sous-évaluation chronique et manifeste des prévisions de recettes». Il cite tous les projets de loi de finances depuis 2017 pour attester de cette sous-évaluation qui permettrait au gouvernement d’«afficher en fin d’exercice un résultat bien meilleur que celui prévu dans les projets de loi de finances examinés par les chambres parlementaires».

«Atteinte» à l’indépendance de l’audiovisuel public

Enfin, les députés voient dans la suppression de la redevance audiovisuelle une «atteinte» à l’indépendance de l’audiovisuel public. Pour eux, le dispositif mis en place par le gouvernement, allouant une partie de la TVA aux budgets de France Télévisions et Radio France, ne suffit pas à assurer «la sécurité» de son financement. Pour le professeur de droit public à l’université Grenoble Alpes, Serge Slama, «le Conseil constitutionnel pourrait saisir cette occasion pour rendre une décision de principe sur l’indépendance de l’audiovisuel, sans nécessairement censurer le texte déféré, mais en fixant les exigences minimales s’agissant de son financement».

Insoumis et écologistes ont rédigé un second recours pour contester certaines dispositions de l’autre loi du «paquet pouvoir d’achat». Selon eux, ce texte adopté lundi contient plusieurs dispositions qui portent «une atteinte grave et manifeste à l’objectif constitutionnel de protection de l’environnement», issu de la Charte de l’environnement de 2004. Les projets attaqués sont ceux de la reprise d’activité de la centrale à charbon de Saint-Avold (Moselle) et de la mise en service d’un terminal méthanier sur l’eau au Havre qui permettra d’importer du gaz de schiste des Etats-Unis, soit deux énergies fossiles très polluantes.

Pour Serge Slama, la décision peut être rendue très vite : «La contestation par le droit par les groupes d’opposition est très fréquente. Le Conseil constitutionnel sait qu’il va y avoir une saisine, il prépare le travail en amont et peut même avoir des échanges informels avec les parlementaires sur les possibles saisines.» Pour la loi sanitaire, la saisine par les insoumis datait du 27 juillet et la décision – conforme à la Constitution – est tombée à peine trois jours plus tard. La gauche, qui n’a guère réussi à faire trébucher l’exécutif dans l’hémicycle, espère bien, avant ses congés, un coup de main des sages pour y arriver.