Les autorités ne veulent pas d’une répétition des images de l’année dernière, quand 500 militants d’extrême droite radicale avaient défilé en rangs serrés, toutes croix celtiques dehors, dans les rues du VIe arrondissement de Paris. La préfecture de police de Paris a annoncé ce mard 7 mai à Mediapart qu’elle interdisait la manifestation dite du «Comité du 9-Mai», le rendez-vous annuel des néofascistes français qui devait se dérouler ce samedi 11 mai. «Il appartient à l’autorité de police compétente de prévenir les risques de désordre et les atteintes à l’ordre public», a-t-elle précisé. Les militants d’extrême droite qui ont déclaré la manifestation peuvent saisir le tribunal administratif dans le cadre d’un référé liberté.
L’an passé, les images très médiatisées de centaines de nervis vêtus de noir, la plupart masqués, en rang et slogans racistes aux lèvres, avaient choqué. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait été contraint d’annoncer «l’interdiction» de toutes nouvelles manifestations «d’ultradroite, d’extrême droite». Le contexte sécuritaire, avec un plan Vigipirate encore renforcé après l’attentat du 22 mars à Moscou, mais aussi l’organisation des élections européennes, tout comme les Jeux olympiques de Paris qui doivent se dérouler fin juillet et début août à Paris, ont probablement compté dans la décision des autorités. D’autant plus que, le même jour, «un village antifasciste», devait être organisé par des organisations de gauche (CGT, LFI, NPA, Solidaires et des mouvements antifascistes) devant le Panthéon, faisant craindre des risques d’affrontements, voire de descente des militants d’extrême droite, dont le cortège est censé passer à quelques rues.
Nouvelle génération
Chaque année au début du mois de mai, les radicaux manifestent ainsi en souvenir du décès accidentel d’un des leurs, Sébastien Deyzieu. Le 9 mai 1994, le jeune homme participait à un rassemblement anti-américain interdit par les autorités et organisé place Denfert-Rochereau à l’appel du GUD et des Jeunesses nationalistes révolutionnaires. Poursuivi par des policiers, il était tombé d’un toit rue des Chartreux, à quelques centaines de mètres de là. Dans la foulée, le Front national de la jeunesse (organisation de jeunesse du FN devenu RN) et le GUD fondent conjointement le Comité du 9-Mai (ou C9M, qui donne son nom à l’événement). L’une de leurs premières actions : faire irruption armes au poing dans les locaux de Fun Radio en 1994 pour réclamer la démission du ministre de l’Intérieur de l’époque Charles Pasqua, dont ils venaient d’échouer à investir le domicile… Dès l’année suivante, ils mettent sur pied la commémoration qui se termine généralement dans la cour de l’immeuble où Deyzieu a fait sa chute mortelle. Peu à peu tombé en désuétude, le rendez-vous est désormais repris en main par une nouvelle génération, qui en a fait une démonstration de force.
Cette édition marquait le trentième anniversaire de l’événement, faisant craindre une mobilisation encore plus forte que les années précédentes. Le GUD, ainsi que de nombreux groupuscules locaux de tendance nationaliste-révolutionnaire, s’étaient particulièrement mobilisés, multipliant les tractages et les collages dans leurs villes respectives pour appeler leurs troupes à se mobiliser.