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Réactions

La pression se maintient sur le gouvernement dans l’affaire Abad: «On oublie souvent la présomption de sincérité» des plaignants

Violences sexuellesdossier
Aux micros des matinales, les réactions gênées ou carrément révoltées se sont succédé ce mercredi matin alors que le ministre des Solidarités reste solidement accroché à son poste malgré les accusations de viol qui le visent.
La ministre de la Santé, Brigitte Bourguignon, et le ministre des Solidarités, Damien Abad, accusé de viol, samedi à Paris. (Geoffroy van der Hasselt/AFP)
publié le 25 mai 2022 à 10h23

La pression se maintient sur le gouvernement après la mise au jour samedi par Mediapart des accusations de viol visant le nouveau ministre des Solidarités, Damien Abad. L’ex-chef de file de LR à l’Assemblée nationale fait l’objet d’une plainte pour viol pour des faits datant de 2011 et classée sans suite en 2017. Il est visé par un autre témoignage, l’accusant de faits identiques survenus en 2010 et transmis le 13 mai à l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique. Chez RTL, le journaliste Benjamin Sportouch a mis les pieds dans le plat ce mercredi matin, en interrogeant la ministre de la Santé, Brigitte Bourguignon :

«Soutenez-vous Damien Abad ?

— Je ne me prononcerai pas là-dessus. Ça ne m’appartient pas…

— Mais c’est votre ministre ?

— Ce n’est pas mon ministre, c’est un ministre du gouvernement. Je n’ai pas à soutenir ou à ne pas soutenir, je ne me prononcerai pas.»

La veille, quelque 300 manifestants se sont rassemblés à Paris, répondant à l’appel lancé par l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, pour dénoncer un «gouvernement de la honte». France Info venait de révéler que Matignon avait pris connaissance des informations du site d’investigation «plusieurs heures» avant leur publication. Une version qui s’oppose à celle mise en avant par la Première ministre. Elisabeth Borne a en effet soutenu dimanche lors d’un déplacement dans le Calvados où elle est candidate aux législatives qu’elle «n’était pas au courant» de l’affaire, «découverte dans l’article de Mediapart». «Je vais être très claire : sur tous ces sujets de harcèlement, d’agressions sexuelles, il ne peut y avoir aucune impunité», a-t-elle alors déclaré. Et pourtant, trois jours plus tard, malgré les exhortations à la démission de la gauche et des associations féministes, Damien Abad est toujours en poste, fort du soutien du gouvernement. «La justice est la seule à devoir ou à pouvoir trancher», a notamment déclaré la porte-parole de l’exécutif, Olivia Grégoire.

L’ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, ex-LR désormais soutien d’Emmanuel Macron, a plaidé sur Europe 1 pour l’instauration d’une «nouvelle loi» pour répondre aux situations d’accusations de ministres en exercice. «Je crois qu’il faut une règle de droit parce qu’on ne peut avoir des règles qui relèveraient d’une justice politique ou d’une justice médiatique», a-t-il affirmé. Et d’ajouter: «Pour le moment, la règle de droit, c’est la présomption d’innocence. C’est la procédure de justice.» Selon lui, «tant qu’il n’y a pas de procédure de justice, il ne faut pas démissionner».

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«Présomption de sincérité»

L’affaire s’est également immiscée dans l’interview matinale de Philippe Martinez sur France Info. Interrogé sur la question, le secrétaire général de la CGT a regretté le fait qu’«on oublie souvent la présomption de sincérité», tout en appelant à la «suspension» du ministre. «Pourquoi on croirait plus quelqu’un qui se défend que quelqu’un qui accuse ?» «Vous imaginez les femmes qui ont été agressées et qui continuent à voir leur agresseur circuler, avoir des responsabilités ? a-t-il ajouté. C’est à leur place qu’il faut se mettre.»

Même son de cloche du côté de Julien Bayou, secrétaire national d’Europe Ecologie-les Verts, candidat de la 5e circonscription de Paris. «Je crois qu’on confond la présomption d’innocence et le fait de promouvoir des personnes mises en cause», a-t-il déclaré, en pointant la connaissance de la situation par une grande partie de LR. «Aujourd’hui, on a un nombre de ministres mis en cause incroyable, a regretté Julien Bayou. Pour être chauffeur de bus, enseignant… il faut présenter un casier [judiciaire] vierge. Pour être candidat aux législatives, ce n’est pas le sujet […]. L’élection n’est pas un droit.»