Une lettre au vitriol et une convocation. L’ambassadeur américain à Paris, Charles Kushner, va faire une visite au ministre des Affaires étrangères, ce lundi à Paris, après sa missive à destination d’Emmanuel Macron, où il dénonce «l’absence d’action suffisante» du Président contre l’antisémitisme.
Des accusations «inacceptables», a réagi le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères en fin de soirée ce dimanche, qui les «réfute fermement», sur le fond et sur la forme : «Elles vont à l’encontre du droit international, en particulier du devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures des Etats […]. Elles ne sont par ailleurs pas à la hauteur de la qualité du lien transatlantique entre la France et les Etats-Unis et de la confiance qui doit en résulter entre alliés.»
La missive du représentant en France des Etats-Unis, par ailleurs père de Jared Kushner, qui n’est autre que le gendre de Donald Trump, mentionnait «sa profonde inquiétude face à la flambée de l’antisémitisme en France et à l’absence d’action suffisante de [son] gouvernement pour le combattre». Une adresse qui venait conclure une semaine marquée par une vive passe d’armes entre Emmanuel Macron et Benyamin Nétanyahou.
Dans un courrier officiel, mardi 19 août, le Premier ministre israélien s’en était à nouveau pris à la volonté du président français d’appeler à la reconnaissance internationale de l’Etat de Palestine, suggérant qu’une telle posture nourrissait l’antisémitisme. L’Elysée avait vivement répondu, dénonçant une accusation «erronée, abjecte».
Emmanuel Macron appelé «à agir avec résolution»
Dans sa lettre, datée de lundi, l’ambassadeur américain reprend l’argumentaire de Benyamin Nétanyahou. «Des déclarations qui vilipendent Israël et des gestes en reconnaissance d’un Etat palestinien encouragent les extrémistes, fomentent la violence et mettent en péril la judéité en France, estime Charles Kushner. Aujourd’hui, ce n’est plus possible de tergiverser : l’antisionisme, c’est l’antisémitisme, point.»
Selon l’ambassadeur, «il ne se passe pas un jour en France sans que des Juifs soient agressés dans les rues, des synagogues et des écoles dégradées, et des entreprises appartenant à des Juifs vandalisées. Le ministère de l’Intérieur de votre propre gouvernement constate que des écoles maternelles ont été ciblées par des dégradations antisémites».
Kushner s’indigne également que «presque la moitié de jeunes Français disent ne jamais avoir entendu parler de la Shoah». «La persistance d’une telle ignorance nous pousse donc à nous interroger sur le programme scolaire dans les écoles de l’Hexagone», ajoute-t-il. Vantant les actions du président Trump en la matière et la capacité à «combattre l’antisémitisme, tant que nos dirigeants ont la volonté d’agir», l’ambassadeur américain en France exhorte le président français «à agir avec résolution».
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Reconnaissance à venir de l’Etat palestinien
Fin juillet, Emmanuel Macron a annoncé que la France allait reconnaître l’Etat de Palestine à l’Assemblée générale de l’ONU en septembre. Dans la foulée, plus d’une dizaine de pays occidentaux parmi lesquels le Canada, ainsi que l’Australie, ont appelé d’autre pays du monde à faire de même.
L’Assemblée générale onusienne prévue en septembre prend fin précisément le 23, jour de la nouvelle année juive et date avant laquelle Benyamin Nétanyahou appelle Emmanuel Macron «à remplacer la faiblesse par l’action, l’apaisement par la volonté» dans la lutte contre l’antisémitisme.
Les actes antisémites sont en nette progression en France depuis le 7 octobre 2023, date des attaques du Hamas contre Israël et du déclenchement de la guerre à Gaza. Le contexte est particulièrement délicat puisque vit en France la plus grande communauté juive d’Europe occidentale, avec environ 500 000 personnes, en même temps qu’une très importante communauté arabo-musulmane, très sensible au sort des Palestiniens de Gaza.
Mise à jour à 7h17 avec la réaction du ministère des Affaires étrangères