En 2013, Laurent Fabius, alors ministre des Affaires étrangères, s’envole pour l’Amérique latine. Il passe une tête au Pérou et au Panama puis prend la route de la Colombie. Là, il rencontre le maire de Bogotá, Gustavo Petro, deuxième personnage de l’Etat. Rapidement, Fabius a les paupières lourdes. Sans doute les effets du décalage horaire. Il manque de répondant. Son interlocuteur s’emporte alors : «Ça fait longtemps qu’en France, vous ne comprenez plus ce qui se passe en Amérique latine. Ce n’est pas grave parce que la gauche française ne nous intéresse plus non plus.» La scène, quoique anecdotique, illustre le malaise qui anime la gauche française, souvent exaltée, parfois indifférente voire gênée par ce qui se joue outre-Atlantique du Sud.
Au début des années 60, à Cuba, la révolution vient de placer Fidel Castro à la tête du pays, envoyant à la gauche du monde entier la promesse de lendemains qui chantent… avant que le pays et la dictature mise en place ne viennent (déjà) fracturer communistes et socialistes, situés de part et d’autre du rideau de fer en matière de questions internationales. Quelques années plus tard, les regards se tournent vers le Chili, où Salvador Allende arrive au pouvoir par les urnes, avant d’en être chassé en 1973 par le coup d’Etat d’Augusto Pinochet. Dès lors, pour un militant de gauche, «la géographie de l’Amérique latine est très marquée par le Cuba et le Chili», observe David Copello, chercheur à Cergy Paris Université et spéc