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Libération
Homard m'a tuer

L’ancien ministre François de Rugy se retire de la scène politique nationale

Le député LREM et ancien ministre de la Transition écologique, déchu par une affaire de dîners fastueux, annonce ce vendredi qu’il ne se représente pas aux élections législatives. Il conserve toutefois son mandat régional dans les Pays de la Loire et maintient son soutien à Emmanuel Macron.
François de Rugy à l'Hôtel du département de Loire-Atlantique à Nantes, le 4 mars 2022. (Loic Venance/AFP)
publié le 25 mars 2022 à 16h54

C’est une sortie par la petite porte. En annonçant qu’il laissera aux vestiaires son écharpe de député dans les prochaines semaines, François de Rugy clôt un chapitre ouvert il y a quinze ans quand, âgé de 34 ans, il faisait son entrée à l’Assemblée nationale. «Il est sain dans une démocratie que les fonctions soient limitées dans le temps», justifie-t-il aujourd’hui dans une interview au média en ligne Fondamental. Il entend désormais «agir dans la vie économique» voire «s’investir dans la vie citoyenne à travers une association ou un think tank». Il tente tout de même : «J’aime toujours la politique et je n’en suis pas dégoûté même si j’ai payé cher et injustement mon engagement et l’exercice des responsabilités». Il y a quelques mois, dans Libé, le député de Loire-Atlantique ne disait pas autre chose : «Le prix à payer est important, mais je ne suis pas dégoûté de la politique». Référence évidente au scandale des homards.

A l’été 2019, Mediapart révélait que jusqu’en juin 2018, De Rugy alors président de l’Assemblée nationale organisait des dîners privés sur fonds publics à l’hôtel de Lassay. L’une des photos, avec champagne et homards, prise lors d’un repas, avait particulièrement marqué les esprits, lui collant définitivement à la peau tel un sparadrap. L’affaire avait étonné : l’homme s’était jusque-là toujours montré soucieux de transparence et d’exemplarité. En 2007, tout jeune député Vert, tendance réalo-voynétiste, il avait tenu à publier l’ensemble de ses revenus et de ses indemnités sur son site Internet. Avec une poignée d’élus écolos, dont Noël Mamère, il demandait aussi que les parlementaires détaillent et rendent publiques l’ensemble de leurs dépenses, y compris leur frais de représentation.

«On démolit, on salit, on disqualifie»

L’affaire, dont il ne s’est jamais vraiment relevé -malgré un engagement à rembourser «chaque euro contesté»-, n’est pas la seule cause de son retrait de la scène nationale. Il s’estime d’ailleurs «blanchi» par les enquêtes du gouvernement et de l’Assemblée nationale. Pour autant, le souvenir est encore amer. «A force de s’en prendre aux élus, de les attaquer dès qu’ils sont désignés par le vote, on perd de vue leur utilité essentielle et le sens de la démocratie représentative. On démolit, on salit, on disqualifie plutôt que de contre argumenter», assure-t-il ce vendredi dans la presse. Contraint de démissionner du ministère de la Transition écologique le 16 juillet 2019, il dénonçait alors un «lynchage médiatique».

Si De Rugy tourne la page de la politique nationale, il n’en a pas fini avec ses mandats locaux. Il est, depuis le mois de juin, conseiller régional des Pays de la Loire et président du groupe macroniste composé de cinq élus. Opposant historique à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, l’ancien ministre de la Transition écologique de Macron est le tenant d’une ligne de centre-gauche, souvent plus au centre qu’à gauche. Lors de la primaire socialiste en 2017, à laquelle il a candidaté -ne réunissant au passage que 3,8% des voix-, les médias le disaient plus proche de Manuel Valls que de Benoît Hamon. Comme l’ancien Premier ministre, il avait ensuite succombé aux sirènes macronistes. Aujourd’hui, De Rugy se dit «toujours d’accord avec l’orientation» d’Emmanuel Macron. Quant aux Verts, ses anciens camarades, il estime qu’ils «ne croient pas» à la possibilité d’«insérer l’écologie dans le progressisme et faire confiance à la science». Ils sont «sur la défensive dès qu’on parle d’innovations technologiques», déplore-t-il dans Fondamental. En 2015, François de Rugy écrivait un livre intitulé Ecologie ou gauchisme, il faut choisir. Sept ans après, il semble n’avoir choisi ni l’un ni l’autre.