Toujours pas d’appel de François Bayrou. Olivier Faure, ouvert à un accord de «non-censure», n’avait toujours pas été contacté samedi soir par le nouveau Premier ministre, qui consulte depuis la veille pour former son futur gouvernement. Sans attendre, le dirigeant du Parti socialiste a choisi de s’exprimer dans la presse pour poser ses exigences. «La non-censure n’est pas un acquis. C’est à François Bayrou de nous donner des raisons de ne pas le censurer. La première, c’est de répondre aux Français, et donc de rouvrir le débat sur les chantiers prioritaires du NFP, sur les retraites, le pouvoir d’achat, les services publics locaux et nationaux, la transition écologique, la démocratie», a déclaré Olivier Faure. Et d’avertir que «toute forme de trahison du Front républicain en reprenant tout ou partie du programme de l’extrême droite sera sanctionnée».
Avec une première ligne rouge : l’abandon de la loi immigration annoncée par Michel Barnier pour 2025. «Se retrouver à discuter d’une nouvelle loi immigration dont Bruno Retailleau a dit qu’elle devait reprendre l’ensemble des sujets qui ont été censurés par le Conseil constitutionnel, c’est évidemment se mettre dans les roues de l’extrême droite. Dans une telle hypothèse, nous censurerons le gouvernement», souligne le leader socialiste. Bruno Retailleau ne doit d’ailleurs selon lui pas rester ministre de l’Intérieur.
François Bayrou semble persuadé du contraire : le ministre de l’Intérieur est la première personnalité qu’il a reçue, dès vendredi soir. Et Bruno Retailleau lui a réclamé, comme condition pour rester en poste, de poursuivre sa feuille de route sur l’immigration. Le maintien à Beauvau de l’homme fort de LR sera décisif pour obtenir le soutien de son parti. S’il veut le soutien à la fois du PS et de LR et éviter une censure, François Bayrou aura donc pour première tâche de concilier ces positions inconciliables,
Des concessions possibles sur la réforme des retraites
Autre point d’achoppement, la réforme des retraites, sur laquelle le leader PS se dit cependant prêt à quelques concessions. «Je souhaite en finir avec le recul de l’âge légal à 64 ans. Mais je ne suis évidemment pas indifférent à la question des déficits. Opérationnellement, je souhaite donc la suspension immédiate de cette réforme et parallèlement, la mise en place d’une conférence de financement avec les partenaires sociaux, pour décider des recettes alternatives. À l’issue nous abrogerons la réforme des retraites».
Olivier Faure martèle à nouveau qu’en ne choisissant pas un Premier ministre de gauche, Emmanuel Macron manifeste un «mépris démocratique» et qu’en faisant «le choix de la continuité en nommant celui qui l’accompagne avec le plus de constance depuis 2017, les mêmes causes produisant souvent les mêmes effets, il prend le risque d’installer une instabilité chronique à la tête de l’État.». Autrement dit, que François Bayrou finira censuré. «J’attends donc de savoir s’il y a en face de moi un interlocuteur ou s’il n’y en a pas. S’il y a un interlocuteur, je suis prêt à saisir l’occasion d’un dialogue constructif, mais s’il n’y en a pas, nous en tirerons les conséquences.» Une méfiance que partagent les écologistes : Marine Tondelier a assuré samedi ne pas vouloir censurer «a priori» le gouvernement Bayrou mais elle aussi pose ses conditions. Et juge aussi que Bruno Retailleau pose problème.
Les écologistes ne souhaitent pas «censurer a priori» François Bayrou, mais commencent déjà «à avoir des a priori de censure», menace ce samedi sur France Inter la secrétaire nationale des Ecologistes.
Quant aux Insoumis, qui ont annoncé d’emblée le dépôt d’une motion de censure, Olivier Faure reconnaît «une divergence stratégique profonde» et accuse ses partenaires du NFP de ne viser que l’Elysée pour Jean-Luc Mélenchon. «Les insoumis suggèrent la destitution du chef de l’État. Ils sont maintenant dans la recherche d’un blocage institutionnel pour conduire le chef de l’État à sa propre démission et permettre une quatrième candidature de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle. Ce n’est pas notre choix. Nous considérons que nous devons, dans un moment très compliqué pour le pays, lui assurer une stabilité.». L’ambition élyséenne de Jean-Luc Mélenchon n’est pour lui «pas conforme au projet politique du Front populaire». Le sort du NFP semble scellé.