L’hypothèse n’était jusqu’alors pas à l’ordre du jour du RN, mais le scénario d’une censure du gouvernement par le parti d’extrême droite semble gagner du terrain. Ce lundi 18 novembre au matin, Laurent Jacobelli sur France Info a donné le ton : «Michel Barnier a enfreint toutes les lignes rouges», a estimé le porte-parole du RN, au sujet de l’examen du budget 2025. «Nous espérons qu’il va rester fidèle à sa promesse du début, écouter les oppositions. Nous, ce qu’on demande, c’est simple : pas de taxe sur l’électricité, l’indexation sur l’inflation des retraites dès le 1er janvier, ne pas attaquer fiscalement ni les classes moyennes, ni les PME, ni les TPE», a ajouté le député RN de Moselle, avant de se faire plus menaçant, affirmant que le Premier ministre avait «son sort entre ses mains». Et de conclure : «S’[il] n’évolue pas, effectivement il se dirige lentement mais sûrement vers la censure et la sortie.»
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Même ligne dure du vice-président du Rassemblement national, Sébastien Chenu, interrogé au même moment, par Europe 1 : «Michel Barnier crée toutes les conditions de la censure», a assuré le député du Nord, pointant un projet de budget pour 2025 jugé «très mauvais» et qui «va impacter les Français sans rien résoudre». «Nous avons dit qu’il faut faire des économies, non pas sur le dos des Français mais sur des politiques publiques qui sont menées, l’immigration, etc. Il n’y a rien qui a bougé, il n’y a rien qui a été retenu», a-t-il poursuivi. Selon lui, le probable recours du Premier ministre à l’article 49.3 pour faire adopter ce projet de loi de finances pour 2025 (PLF) pourrait sceller le sort du gouvernement avant l’hiver. «Moi, je plaide pour qu’on puisse censurer», a-t-il insisté, tout en renvoyant la décision finale à Marine Le Pen.
«Barnier est moins irritant que ses prédécesseurs»
Face à une Assemblée nationale éclatée sans majorité, Emmanuel Macron s’était assuré cet été que Marine Le Pen et les siens ne censureraient pas a priori Michel Barnier, une faveur qu’elle avait consentie. «Barnier est moins irritant que ses prédécesseurs», estimaient encore début octobre des cadres du parti d’extrême droite, décelant du «respect» à leur égard. Le ton aurait-il changé ? Le probable usage du 49.3 et le rejet d’amendements RN dans le budget ont en tout cas ravivé les hostilités. «On nous avait dit : “On va construire ensemble”», grinçait Marine Le Pen, la semaine dernière, pointant l’absence de dialogue avec Michel Barnier, tout en questionnant : «Est-ce qu’ils vont réimposer leurs 6 milliards de taxes sur l’électricité ? Est-ce qu’ils vont baisser la facture de carburant ? C’est ça, moi, qui m’intéresse.» Et d’ajouter, menaçante : «Si Michel Barnier pense qu’il bénéficie d’un avantage positif dans l’électorat du Rassemblement national, il commet une très lourde erreur d’interprétation.»
Dans son entourage, plusieurs de ses proches, dont le député Jean-Philippe Tanguy, plaident pour une motion de censure avant Noël. Marine Le Pen pourrait aussi regarder du côté de son corps électoral : selon un baromètre Ifop pour Ouest-France paru mardi 12 novembre, 73% des électeurs du RN «désapprouvent l’action du Premier ministre». La même proportion se dit «opposée» au PLF 2025.