Chauffés à blanc par les images impressionnantes de la procession de camionneurs opposés à l’obligation vaccinale au Canada, les anti-pass français se mobilisent. Sur Facebook, Twitter, Telegram et d’autres réseaux encore, ils s’organisent. Leur objectif : monter des convois au départ de toutes les régions françaises en direction de Paris et les faire converger pour bloquer la capitale. Puis repartir vers Bruxelles, où ils espèrent rejoindre des manifestants venus des quatre coins de l’Europe.
Le projet a pris de l’ampleur notamment avec des partages de figures de la complosphère française. L’essayiste et fer de lance de la désinformation sur la pandémie, Idriss Aberkane, a été l’un des premiers à dégainer vendredi dernier. «Vous le saviez, vous, qu’un convoi de la liberté allait s’organiser en France ?» a lancé l’«hyperdoctor» à ses 172 000 abonnés. Depuis, il multiplie les messages de soutien au mouvement qui a rassemblé dimanche une foule d’opposants aux mesures sanitaires à Ottawa, la capitale canadienne. La police a ouvert «plusieurs enquêtes criminelles» en lien avec la profanation de monuments nationaux, des comportements «menaçants, illégaux et intimidants» à l’endroit notamment de policiers ou encore la présence de drapeaux à croix gammées dans les cortèges. Le Premier ministre, Justin Trudeau, et sa famille ont même dû être exfiltrés et conduits dans un lieu tenu secret. Cible de la vindicte, Trudeau avait été menacé sur les réseaux sociaux.
40 000 tweets
«Routiers canadiens : allez chercher Trudeau il se cache ! “Qu’ils viennent me chercher !” dit-il comme son copain français. Alors allez-y !» a tweeté Florian Philippot, reprenant une phrase lancée par Emmanuel Macron au moment de l’affaire Benalla. Moteur de la contestation «covidosceptique» française, le président des Patriotes s’est également réjoui : «Il semble bien que le château de cartes mondial de la corruption ait commencé de s’écrouler, et ça part du Canada ! Trudeau se cache ! La vague va déferler sur la France !»
De son côté, Jean-Frédéric Poisson appelle plus explicitement encore à reproduire ici le mouvement. «Après le Canada, les routiers français et européens se mobilisent. Soutien au #ConvoidelaLiberte ! #TousAParis», a tweeté lundi matin le président du petit parti VIA, également soutien d’Eric Zemmour. Accompagnant son message d’une carte faite à la va-vite et reliant des grandes agglomérations françaises à Paris. Mais aussi à Bruxelles, sans que l’on sache bien si la ville abritant le siège du Parlement européen est au départ ou à l’arrivée…
En vingt-quatre heures, ce sont plus de 40 000 tweets qui ont utilisé le hashtag #ConvoidelaLiberte pour appeler, dans leur grande majorité, à la mobilisation. Parmi les principaux relais du mot d’ordre, on trouve le compte d’un certain Marcel Dubreuil (un pseudo) qui anime le site conspirationniste «le Media en 442» ainsi que des comptes dénonçant à la fois «le pass vaccinal» et le «wokisme».
Débats sur la date
Un certain flou artistique règne dans les conversations des internautes qui s’enthousiasment à l’idée de reproduire en France un «Convoi de la liberté». Le principal groupe Facebook hexagonal du mouvement, lancé le 26 janvier, réunit déjà, ce lundi, près de 90 000 membres.
Dans les centaines de messages quotidiens qui s’enchaînent, rappelant les grandes heures des gros groupes de gilets jaunes, règne la confusion. La question la plus débattue, et de fait la plus importante, reste celle du jour de la mobilisation. En effet, au niveau européen les différents convois doivent relier Bruxelles le 14 février si l’on en croit un tract diffusé par la chaîne Telegram World Freedom Convoy, qui semble agréger les initiatives sur le Vieux Continent. Pour autant, la date de convergence vers Paris semble continuer à faire débat. Certains avancent le 5 février pour converger avec la manif anti-pass et appellent à paralyser pendant une semaine les rues de la capitale avant de partir pour la Belgique.
D’autres, dont notamment un certain Rémi Monde qui s’est proclamé porte-parole du «Convoi de la liberté France», évoquent la date du 11 février pour rallier Paris. Sur l’application cryptée Telegram, Rémi Monde tient une chaîne dédiée qui cumulait 11 000 abonnés lundi. Certains évoquent aussi le 6 février, sans visiblement saisir la symbolique de cette date qui vit les ligues d’extrême droite tenter de renverser la République en 1934.