[Actualisé le 18 février : la garde à vue de Jean-Claude Gaudin a été levée mercredi soir après dix heures. Les magistrats instructeurs n’ont pas encore décidé de suites à lui donner. Son ancien directeur de cabinet, Claude Bertrand, a lui aussi été placé en garde à vue. Celle-ci se poursuit ce jeudi.]
Les mémoires de Jean-Claude Gaudin sont bouclées, prévues pour publication au printemps. Il va peut-être falloir y rajouter un nouveau chapitre, un épilogue judiciaire qui s’écrit depuis quelques semaines déjà pour celui qui a pris sa retraite en juin, après vingt-cinq ans à la tête de Marseille : ce mercredi matin, l’ex-maire LR a été placé en garde à vue dans les locaux de la gendarmerie dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour «détournements de fonds publics».
Une demi-surprise pour l’élu de 81 ans : la veille, comme le révélait la Provence, il avait reçu la visite des enquêteurs de la section de recherches de Marseille, qui ont perquisitionné ses deux domiciles personnels, sa maison de famille dans le quartier de Mazargues et sa villa de Saint-Zacharie, dans le Var. Leurs investigations portent sur le statut de plusieurs proches de l’ancien maire, embauchés au sein de son cabinet alors qu’il était encore à la tête de la ville. Sa garde rapprochée, qui accompagne l’élu depuis son accession à la mairie en 1995, mais qui avait pourtant largement dépassé depuis plusieurs années l’âge obligatoire de la retraite dans la fonction publique.
Cette enquête, ouverte en 2019 par le Parquet national financier et confiée à une juge d’instruction parisienne, découle d’une autre entamée deux ans plus tôt, toujours par le PNF, sur la gestion du temps de travail à la ville de Marseille époque Gaudin. En décembre, l’institution avait rendu un rapport édifiant sur des soupçons d’emplois fictifs, mettant à jour un «système généralisé» qui aurait duré des années et touché plusieurs services. Des «irrégularités» jugées suffisamment significatives pour que le PNF préconise le renvoi en correctionnelle pour «détournement de fonds publics par négligences» de l’ancien maire et de six autres hauts fonctionnaires, dont son directeur de cabinet Claude Bertrand, souvent qualifié de «maire-bis». Ce dernier a, selon la Provence, également été placé en garde à vue ce mercredi.
«La jeunesse n’est pas une simple affaire d’âge»
C’est dans le cadre de cette enquête que les gendarmes se sont intéressés à ces éminences un peu trop grises qui entouraient l’ancien maire. Parmi eux, d’anciens élus, fidèles de la première heure dépassant pour certains les 80 ans, désormais «chargés de mission» et dont le rôle réel au sein du cabinet avait également interrogé la chambre régionale des comptes, qui s’était intéressée au sujet dans son rapport sur la gestion municipale remis fin 2019. Outre l’âge avancé de ces collaborateurs, les magistrats de la chambre pointaient leur coût pour le contribuable marseillais, leurs émoluments représentant 5 millions d’euros sur la période couverte par le rapport (2012-2017). Dans la foulée d’une première perquisition menée par les gendarmes en 2019 dans les locaux de la ville, certains d’entre eux avaient été discrètement remerciés, comme l’avait révélé le site Marsactu. D’autres, comme Claude Bertrand ou le directeur général des services Jean-Claude Gondard, avaient pu se maintenir jusqu’à la fin du mandat du maire quelques mois plus tard.
A la suite du rapport de la chambre régionale des comptes, dans ses réponses aux magistrats au sujet de cette «vieille garde», l’équipe Gaudin avait posé un argument surréaliste pour se justifier : «La jeunesse, la vraie, n’est heureusement pas une simple affaire d’âge.» Devant les gendarmes ce mercredi, Jean-Claude Gaudin aura sûrement besoin d’un peu plus que d’une belle formule.