Ara Toranian n’en est pas revenu. Déambulant un jour de 2020 avec sa compagne à Paris, dans le quartier Convention, il tombe nez à nez avec Rachida Dati. La maire du VIIe arrondissement mène alors campagne pour sa réélection aux élections municipales en 2020. Le journaliste, alors âgé de 66 ans, apostrophe l’ancienne garde des Sceaux, aujourd’hui la ministre de la Culture d’Emmanuel Macron. «Franchement, j’apprécie votre travail, lui dit-il. Mais votre proximité avec le régime d’Azerbaïdjan, une dictature, n’est pas acceptable.»
La réponse de Rachida Dati l’avait sur le moment scotché, confie Ara Toranian à Libération : «Mais pas du tout, je vais tout le temps en Arménie, j’y étais encore tout récemment», assène-t-elle au débotté à son interlocuteur, qu’elle n’a visiblement pas reconnu. Toranian n’est autre que le coprésident du Comité de coordination des organisations arméniennes françaises (CCAF) et le directeur de la revue Nouvelles d’Arménie, l’une des figures de la cause arménienne en France. Surtout, ce militant actif est l’un des hommes les mieux informés sur les voyages – et les absences – des élus français à Erevan. L’Arménie et l’Azerbaïdjan – qui conteste le génocide arménien de 1915 – se disputent violemment les montagnes du Haut-Karabakh, l’enclave sécessionniste située en territoire azerbaïdjanais mais peuplée d’Arméniens, jusqu’à sa reprise par Bakou