Censure totale de la loi Duplomb, partielle, ou pas de censure du tout ? Saisi mi-juillet par des députés et sénateurs de gauche, le Conseil constitutionnel rendra sa décision «a priori» dans deux semaines. Le 7 août. Autant dire que sa décision sur le texte, adopté au Parlement le 8 juillet, sera scrutée de très près, alors qu’une pétition déposée sur le site de l’Assemblée nationale demandant l’abrogation de la loi a recueilli un record de plus de 1,9 million de signatures.
Les parlementaires ayant requis l’avis des Sages arguent que la loi portée par le sénateur LR Laurent Duplomb est incompatible avec la préservation de l’environnement et le droit à la santé. Elle autorise notamment la réintroduction sous conditions de l’acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France mais autorisé ailleurs en Europe.
Ce produit, toxique pour la biodiversité et la santé humaine, est réclamé par les producteurs de betteraves ou de noisettes : ils estiment ne pas avoir d’alternatives contre les ravageurs et subir une concurrence déloyale des producteurs étrangers. Les requérants auprès du Conseil constitutionnel rétorquent que cette réintroduction contrevient aux principes de précaution et de non-régression environnementale.
Elevages intensifs et mégabassines
La loi, que ses défenseurs présentent comme une réponse aux manifestations agricoles de 2024, contient d’ailleurs d’autres mesures controversées. Par exemple le relèvement des seuils d’autorisation environnementale pour les élevages intensifs, ou la facilitation du stockage de l’eau pour l’irrigation des cultures (les mégabassines).
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Les députés dénoncent aussi les conditions d’examen du texte. Puisqu’il a été rejeté d’entrée par ses défenseurs pour contourner ce qu’ils avaient qualifié «d’obstruction» de la gauche, aucun amendement n’avait pu être débattu dans l’hémicycle de l’Assemblée.
Si le texte n’est pas censuré par le Conseil constitutionnel, la gauche appelle d’ores et déjà Emmanuel Macron à demander une nouvelle délibération de la loi au Parlement, comme le lui permet la Constitution - ce que la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, trouve «extrêmement périlleux». Si elle est bien promulguée par le président, plusieurs groupes de gauche, dont les socialistes, ont annoncé vouloir porter une proposition de loi abrogeant les dispositions du texte agricole.