Depuis que Laurent Wauquiez a renoncé à se porter candidat à la présidence du parti pour se concentrer sur l’élection présidentielle de 2027, un brouillard entoure le futur de la droite traditionnelle. LR se cherche un chef pour succéder à Christian Jacob, qui dirigeait le parti depuis près de trois ans, et en l’absence de «candidat naturel», la décision a été prise de repousser de deux semaines, soit début décembre, l’élection du futur président.
Ce temps-là, la jeune garde du parti compte bien en profiter pour gagner en légitimité. Aurélien Pradié, 36 ans, refuse pour l’instant d’officialiser sa candidature. Mais le député, fort de sa réélection dans le Lot en juin, ne cache pas ses ambitions. «Il ne s’agit pas pour moi d’occuper un poste, mais de tout rebâtir dans ma famille politique», a détaillé mardi le numéro 3 de LR sur Europe 1, invoquant sa volonté que «la droite populaire puisse à nouveau parler aux Français».
Idées droitières
Pradié a également profité de cette sortie médiatique pour ressortir l’idée droitière d’une «Cour de sûreté de la République» pour les dossiers de terrorisme : sa «mission sera de traiter en urgence des décisions d’expulsions de celles et ceux qui menacent la sécurité sur notre territoire», a-t-il plaidé, dans un contexte de suspension par la justice de l’expulsion de l’imam Iquioussen ordonnée par le ministère de l’Intérieur. Pradié reprend là une idée formulée en mai 2021 par un certain… Guillaume Peltier. L’alors numéro 2 de LR, parti depuis rejoindre Eric Zemmour, avait lui aussi promu le «rétablissement de la Cour de sûreté» créée par De Gaulle en 1963, afin de placer des terroristes présumés en rétention sans possibilité d’appel. Il avait alors été vivement critiqué et privé de son statut par Jacob quelques mois plus tard.
Discret à l’Assemblée sur les textes pouvoir d’achat, le secrétaire général de LR s’est surtout fait remarquer pour une réplique homophobe prononcée à l’Assemblée nationale début août. Alors que la députée écologiste Sandrine Rousseau défendait l’idée de changer le nom de l’épidémie de variole du singe, qui renvoie selon elle à «une histoire de la discrimination pour les personnes gays», il aurait rétorqué, selon le compte rendu des débats : «C’est surtout une honte pour les singes !» Pradié a formellement démenti avoir tenu ces propos et publié dès le lendemain sur Twitter non pas un message d’excuses, mais de regrets : «Imaginer une seule seconde que j’ai voulu dire une chose pareille est à vomir. A ceux qui ont pu le croire et être blessés, je dis ma profonde tristesse.» «Ce que j’ai voulu dire, c’est que je ne comprenais pas pourquoi on affublait cette maladie du nom d’un animal, mais jamais de la vie je n’ai voulu exprimer un lien entre les singes et une orientation sexuelle», s’est-il défendu sur RTL. Son image progressiste en est, en tout cas, ressortie abîmée.
«Une refondation en profondeur»
Un autre jeune loup LR tente de tirer profit du calme politique de ce début de mois d’août pour avancer son nom pour la tête du parti : Othman Nasrou, 35 ans. Vice-président de la région Ile-de-France et premier lieutenant de Valérie Pécresse, il invoque, lui aussi, «une démarche qui doit se mûrir» et entretient, pour l’instant, le flou sur son éventuelle candidature. «Il faut une refondation en profondeur de notre parti, revendique-t-il. Le fonctionnement interne doit être redynamisé, en tenant compte des échéances électorales qui viennent de passer.» Nasrou réclame que le futur président du parti «ne soit pas le candidat à l’élection présidentielle de 2027» pour se consacrer «à plein temps» à la refondation des LR. Libéral assumé, l’élu à Trappes (Yvelines) mise sur «la baisse des dépenses publiques», invoquant «un Etat qui doit remplir ses fonctions essentielles», pour se montrer crédible auprès de la base de son parti.
Une chose est sûre : s’ils vont au bout de leur démarche, Pradié et Nasrou devront affronter bien plus expérimentés qu’eux. Les noms de la tête de liste aux élections européennes de 2019, François-Xavier Bellamy, ou du maire de Cannes, David Lisnard, circulent. Seul le très à droite Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, a pour l’instant officialisé sa candidature fin juillet. A la tête de la puissante fédération des Alpes-Maritimes et fort de sa place de finaliste à la dernière primaire présidentielle, il sera le grand favori du congrès de décembre.