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En résumé

«Menace russe», incertitude américaine, défense européenne, pas de hausse d’impôts… Ce qu’il faut retenir de l’allocution d’Emmanuel Macron

A la veille du sommet de l’UE sur l’Ukraine, le président de la République s’est adressé aux Français dans une allocution diffusée à 20 heures, ce mercredi 5 mars. Il est revenu sur les menaces qui planent sur l’Europe et comment les Etats membres s’organisent pour les contrer.
Emmanuel Macron, ce mercredi 5 mars 2025 à Paris. (Boby/Libération)
publié le 5 mars 2025 à 21h35

«Nous entrons dans une nouvelle ère». L’allocution d’Emmanuel Macron, diffusée ce mercredi 5 mars au soir, a permis d’en apprendre plus sur le cap emprunté par la France dans un contexte d’escalade des tensions entre la Russie, les Etats-Unis, et l’Ukraine. Et ce, la veille du sommet de l’Union européenne, où se réunissent les Vingt-Sept en présence de Volodymyr Zelensky pour confirmer leur soutien financier et militaire à Kyiv, abandonné par Donald Trump. Il en a profité pour demander aux citoyens français leur engagement, alors que des efforts économiques vont être nécessaires pour aider les Ukrainiens et par répercussion, garantir la paix en Europe.

Libération vous résume l’essentiel des informations à retenir de cette intervention d’une quinzaine de minutes.

Le portrait de la Russie, façon Emmanuel Macron

Histoire de bien planter le décor, le président de la République a dépeint une Russie particulièrement angoissante, lui permettant de dérouler le reste de son discours sur les besoins de réarmer l’Europe. La «menace russe» ne touche pas que l’Ukraine, mais aussi «les pays d’Europe». Elle «nous touche» également, a-t-il affirmé avant de dérouler de nombreux exemples d’ingérences russes sur le territoire européen. «La Russie du président Poutine viole nos frontières pour assassiner des opposants», cela a été le cas, en février 2024, d’un pilote russe qui avait déserté l’armée et avait été retrouvé mort en Espagne. Autre constat : «elle manipule les élections en Roumanie, en Moldavie». Au point qu’une nouvelle élection présidentielle roumaine aura lieu, en raison de soupçons sur ces ingérences. «Elle organise des attaques numériques contre nos hôpitaux pour en bloquer le fonctionnement», comme le piratage, à Cannes, en mai 2024. «La Russie tente de manipuler nos opinions avec des mensonges diffusés sur les réseaux sociaux», conclut-il, affirmant qu’en clair, «cette agressivité ne semble pas connaître de frontières».

Les Etats-Unis, «notre allié» incertain

Au cours de son allocution, Emmanuel Macron n’a eu de cesse de prôner l’indépendance européenne vis-à-vis des Etats-Unis, sur lesquels nous ne pouvons plus nous reposer. Il regrette le changement de braquet de «notre allié» américain, qui a «changé de position» sur la guerre en Ukraine, en se rapprochant de la Russie, et qui «laisse planer le doute sur la suite». «Je veux croire que les Etats-Unis resteront à nos côtés, mais il faut être prêt si cela n’était pas le cas», dit le chef de l’Etat, qui appelle à investir davantage dans la défense européenne. D’autant plus que la menace de taxes douanières plane sur l’Europe. Il faut «nous préparer à ce que les Etats-Unis décident de tarifs douaniers sur les marchandises européennes», comme ils viennent de le confirmer à l’encontre du Canada et du Mexique. «Cette décision, incompréhensible tant pour l’économie américaine que pour la nôtre, aura des conséquences sur certaines de nos filières», a-t-il prévenu, et «ne restera pas sans réponse de notre part», en disant espérer «convaincre» Donald Trump que «cette décision nous ferait du mal à tous» et «l’en dissuader».

Sommet européen et convocation à Paris de chefs d’état-major prêts à aider l’Ukraine

En avant-première, le président français a dévoilé plusieurs engagements qui seront pris, jeudi 6 mars, lors de la réunion extraordinaire européenne. À l’occasion de ce sommet européen extraordinaire où seront présents les 27 dirigeants des pays membres de l’Union européenne, il affirme : «Nous franchirons des pas décisifs». A savoir, les Etats membres de l’Union européenne pourront désormais accroître leurs dépenses militaires sans que cela soit pris en compte dans leur déficit et l’adoption d’un financement commun massif pour l’achat et la production sur le sol européen de munitions, chars, armes et équipements innovants.

En parallèle, la France réunira la semaine prochaine à Paris les chefs d’état-major des pays prêts à garantir une future paix en Ukraine, car, selon lui, «l’avenir de l’Europe ne doit pas être tranché à Washington et Moscou». La paix en Ukraine «passera aussi, peut-être, par le déploiement de forces européennes. Celles-ci n’iraient pas se battre aujourd’hui, elles n’iraient pas se battre sur la ligne de front, mais elles seraient là, au contraire, une fois la paix signée, pour en garantir le plein respect. Dès la semaine prochaine, nous réunirons à Paris les chefs d’état-major des pays qui souhaitent prendre leurs responsabilités à cet égard», a déclaré le chef de l’Etat.

Pour Emmanuel Macron, l’Union européenne a «les moyens» de se comparer «aux Etats-Unis et a fortiori à la Russie». «Notre Europe possède la force économique, la puissance et les talents pour être la hauteur de cette époque», martèle-t-il. Et d’annoncer que la France, bien lotie grâce à la dissuasion nucléaire, pourrait un jour élargir cette protection à «nos alliés du continent européen».

Plus d’investissements, mais pas d’augmentation d’impôts

Dans la droite lignée de ces annonces, et prônant toujours l’indépendance de l’Europe vis-à-vis «du reste du monde», Emmanuel Macron a annoncé que «de nouveaux choix budgétaires et des investissements supplémentaires» vont être nécessaires. Bien que la France ait «presque doublé» son budget de l’armée durant ses deux mandats présidentiels, le chef d’Etat veut aller plus loin, afin de garantir la défense du pays. Ces efforts économiques mobiliseront «des financements privés mais aussi publics», mais il se veut rassurant : tout cela se fera «sans que les impôts ne soient augmentés». «Pour cela il faudra des réformes, des choix, du courage». Il en a profité pour faire tout un laïus jouant sur le pathos des Français : «La patrie a besoin de vous et de votre engagement». «Les décisions politiques, les équipements militaires, les budgets sont une chose, mais ils ne remplaceront jamais la force d’âme d’une nation. Notre génération ne touchera plus les dividendes de la paix. Il ne tient qu’à nous que nos enfants récoltent demain les dividendes de nos engagements», a solennellement déclaré le chef de l’Etat.