Alexis Corbière sort du silence. Après François Ruffin, Clémentine Autain ou Raquel Garrido, voilà le tour du député de Seine-Saint-Denis de dénoncer la nouvelle coordination de La France insoumise – dont il ne fait pas partie – et la manière dont elle a été mise en place. Dans le Monde, l’ancien porte-parole de Jean-Luc Mélenchon lors de la présidentielle de 2017, auquel il est fidèle depuis leurs années communes au Parti socialiste, acte «un radical désaccord» avec la nouvelle direction de LFI. «Certains ont beau [se] réclamer [du consensus], il n’est pas là. Beaucoup de militants sont désarçonnés», regrette Alexis Corbière, ciblant très clairement Manuel Bompard, le nouveau numéro 1 des insoumis. Sous le feu des critiques après sa prise de pouvoir qualifiée de brutale par plusieurs déçus, ce dernier avait assuré préférer le «consensus» plutôt que les élections afin d’éviter «l’affrontement entre une majorité et des minorités».
Analyse
Auprès du Monde, Alexis Corbière estime que «cette situation insatisfaisante est le produit d’une méthode que [lui-même] a du mal à saisir». Elle est, selon lui, la «conséquence d’un processus qui ne joue pas collectif, n’associe pas assez les militants et n’intègre pas les différentes sensibilités de notre mouvement qui s’incarnent dans certaines personnalités». Pointant la présence de 18 parlementaires parmi les 21 membres de la nouvelle direction, le député de Seine-Saint-Denis dit regretter un manque de «parité sociale». L’ancien prof d’histoire aurait aimé voir «des dirigeants issus des zones rurales, des quartiers populaires, des militants syndicaux, associatifs et surtout issus des classes populaires», explique-t-il.
Interrogé sur sa mise sur la touche, (au même titre qu’Autain, Ruffin, Garrido ou Coquerel), Corbière assure que son problème «ne porte pas sur l’absence de tel ou telle». Il assure même que «si [sa] personne pose problème», il n’est d’ailleurs pas candidat pour rejoindre la nouvelle coordination. En revanche, le député insiste pour que sa ligne «républicaine, sociale, écologique, attachée à la laïcité émancipatrice authentique» ait un certain poids dans la nouvelle équipe dirigeante aujourd’hui composée exclusivement de très proche de Jean-Luc Mélenchon. Tout comme les lignes portées par Clémentine Autain et François Ruffin. «Tous ces tempéraments forts, et d’autres encore, doivent se retrouver dans une équipe de direction pensante», affirme Corbière.
Divergences avec Mélenchon
En «radical désaccord» avec la nouvelle direction, le député de Seine-Saint-Denis note également plusieurs divergences de point de vue avec Mélenchon. Contrairement au triple candidat à la présidentielle, Corbière estime que la coordination de La France insoumise n’est pas qu’«opérationnelle» mais qu’elle deviendra, par la force des choses, très «politique». Il ne partage pas son point de vue qui consiste à dire qu’être membre de la coordination du mouvement oblige «à la discrétion absolue». «La seule discipline que je connaisse en politique, c’est la discipline des consciences, pas celle des armées», grince Corbière. «Ma devise est “Unité dans l’action, liberté totale dans la discussion”. Mais je ne reprocherai jamais à mes amis d’avoir pris la parole, dans la presse», poursuit-il. Enfin, dernier désaccord : l’idée que le fonctionnement interne de LFI devrait servir de modèle pour la société que prônent les insoumis. Mélenchon ne le croit pas. Corbière oui.
Les divergences posées, Corbière veut désormais aboutir sur un accord avec Bompard et la nouvelle direction. Pour cela, un groupe de travail «de députés volontaires, de différentes sensibilités», dont il ne fait pas partie, s’est organisé et soumettra des propositions à la nouvelle coordination le 9 janvier, lors du séminaire de rentrée du groupe LFI. «Reprenons la discussion et évitons que notre mouvement dit “gazeux” ne devienne un mouvement brumeux», scande-t-il. De quoi animer un début d’année déjà bien chargé par la réforme des retraites. Et alimenter la fronde contre la nouvelle direction.