Une réunion qui lui reste en travers de la gorge. Le leader des insoumis Jean-Luc Mélenchon a dit tout le mal qu’il pensait de la présence de ses alliés du Nouveau Front populaire à Bercy, mercredi 8 janvier, dans le cadre de négociations sur le budget avec le ministre de l’Economie Eric Lombard et sa comparse du Budget Amélie de Montchalin. «Cette façon de négocier dans le dos du NFP et contre son programme est une forfaiture d’un irrespect total pour notre alliance, a-t-il cinglé sur X. La petite gauche traditionnelle n’a rien à offrir et ses négociateurs sont juste ridicules de servilité.»
Les représentants des Ecologistes et du PCF, qui font dépendre une partie de leur non-censure de la volonté du gouvernement à accepter l’abrogation de la réforme des retraites, s’étaient joints mercredi aux socialistes pour une réunion à Bercy. Les insoumis avaient pour leur part refusé d’entamer à ce stade des concertations avec les ministres, préférant attendre la déclaration de politique générale de François Bayrou.
«Sujets peu clivants»
On ignore si cela apaisera l’ire insoumise, mais les trois formations de gauche n’ont pas relevé quoi que ce soit permettant d’aller dans le sens d’une non-censure. «Il n’y a absolument, à ce stade, rien de conclusif», a déclaré au micro de BFMTV le premier secrétaire du PS Olivier Faure au sortir de cette réunion qui s’est terminée peu après 23 heures. «Rien n’est achevé et c’est une vraie négociation. […] On continuera à défendre nos positions, mais pour qu’il n’y ait pas de censure, ça suppose qu’il y ait une inflexion forte sur la politique qui est conduite jusqu’ici, a-t-il ajouté. On continuera à travailler ardemment.»
«Les discussions ont été limitées à des sujets peu clivants. La question centrale des retraites, de la justice fiscale et de la fonction publique ont été remises à plus tard», a assuré à l’AFP un socialiste, mentionnant toutefois une «réunion utile et constructive» avec «les trois partis de gauche […] bien autour de la table et alignés».
Côté écologistes, on note qu’«il y a encore un sacré boulot pour ne pas aboutir à la censure». Plus tôt mercredi, la délégation communiste avait indiqué vouloir mettre «en tête de gondole» de ses demandes l’abrogation de la réforme des retraites, «en tout cas trouver le moyen de suspendre la mesure d’âge», a expliqué le secrétaire national du PCF Fabien Roussel. «Aujourd’hui, ce n’est pas oui, ce n’est pas non, c’est en discussion», a-t-il noté, marquant l’intention de «mettre le pied» dans «cette porte entrebâillée».
«Solutions exceptionnelles»
Faut-il y voir un véritable bougé du gouvernement ? Lundi, après la réception de la délégation socialiste emmenée par Olivier Faure, le président du groupe socialiste au Sénat Patrick Kanner s’était félicité «d’une proposition de modification, d’évolution de la réforme de la retraite» faite par Amélie de Montchalin, mais sans préciser laquelle. Mardi, le Premier ministre avait indiqué à la numéro 1 de la CFDT, Marylise Léon, n’avoir «aucun tabou» sur tous les sujets liés aux retraites, «y compris sur l’âge légal», avait rapporté la responsable syndicale.
Les partis de gauche reçus à Bercy depuis lundi ont salué, plus ou moins explicitement, la qualité d’écoute des ministres. «En termes de méthode, il est en train de se passer des choses qui ne se sont jamais passées en France. […] A circonstances exceptionnelles, solutions exceptionnelles», a estimé Marine Tondelier.
LFI était la grande absente de la réunion de mercredi soir. Interrogée à ce sujet, Marine Tondelier a remarqué que le président LFI de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Eric Coquerel, serait néanmoins reçu, seul, jeudi. «S’il y avait un boycott intégral et très strict comme ils savent l’organiser, il ne viendrait pas demain», a-t-elle glissé, observant que La France insoumise avait souhaité «des rendez-vous après le débat de politique générale» : «Dans la situation politique où on est, on voit que les lignes, les attitudes bougent, rapporte la cheffe des Ecologistes. Tout le monde a envie de trouver des solutions.»