Et le cordon sanitaire continua de lâcher pour une petite voix. Ce jeudi 30 octobre, le Rassemblement national est parvenu, pour la première fois, à faire passer un de ses textes à l’Assemblée nationale dans le cadre de sa niche parlementaire. En fin de matinée, les députés ont adopté par 185 voix contre 184, une proposition de résolution du groupe présidé par Marine Le Pen visant à «dénoncer» l’accord franco-algérien de 1968. «C’est une journée qu’on peut qualifier d’historique pour le RN», a fanfaronné celle-ci. N’oubliant pas, bien sûr, de «remercier les groupes d’Edouard Philippe et de Laurent Wauquiez qui ont voté en cohérence avec leurs opinions».
Vote «pour» des LR et d’Horizons
Car, les voix du RN et de leur allié de l’Union des droites pour la République (UDR) d’Eric Ciotti, qui se sont massivement mobilisés ce jeudi (2 absents seulement sur les 139 députés de la coalition), ne suffisaient pas pour gagner. Si le parti lepéniste a obtenu sa première victoire à l’Assemblée, c’est parce que des membres d’autres groupes ont donné leur aval au texte. C’est le cas des députés Les Républicains tout d’abord. Sur les 50 membres du groupe présidé par Laurent Wauquiez, les 26 présents – dont l’ex-Premier ministre Michel Barnier ; le rapporteur général du budget Philippe Juvin ; ou encore la questeure de l’Assemblée et conseillère spéciale de Bruno Retailleau au parti Michèle Tabarot – ont voté le projet de résolution. «Quand le RN porte des projets ou des convictions que nous partageons, il n’y a aucune raison d’être dans des postures politiciennes», avait prévenu Laurent Wauquiez à la tribune plus tôt dans la matinée.
Mais Les Républicains n’ont pas été les seuls alliés de circonstance du Rassemblement national. Horizons, le parti d’Edouard Philippe a aussi approuvé massivement le texte. Sur ses 34 députés, les 17 présents dans l’hémicycle – dont leur président Paul Christophe et l’ex-ministre de la Santé Frédéric Valletoux – l’ont tous voté. Tout comme deux élus du petit groupe hétéroclite Liot. Mais l’adoption d’une petite voix a aussi été permise par quelques abstentions dans les partis du bloc central. Trois élus, dont Karl Olive, se sont abstenus au sein du groupe Ensemble pour la République (EPR). Deux du côté du Modem de François Bayrou.
Enervement à gauche… et dans le bloc central
A l’issue du vote, la gauche qui a, sans exception (pour les présents), voté contre le texte a dénoncé la faible mobilisation du parti présidentiel dans l’hémicycle pour empêcher la victoire de l’extrême droite. Sur les 92 membres du groupe EPR, 30 seulement étaient là pour s’opposer au projet de résolution. Et 10 sur 36 du côté du Modem. «Où est Gabriel Attal ? Où sont les députés macronistes ? Ce qu’on vient de vivre dans l’hémicycle, c’est inacceptable», s’est agacée la cheffe de file écologiste Cyrielle Chatelain devant la presse. Un énervement partagé même au sein du bloc central. «Horizons respecte la position initiale d’Edouard Philippe. Mais c’est coupable», a grincé le député Modem Bruno Fuchs, soulignant le fait que les élus EPR étaient «très peu nombreux».