Et de 21. Cette fois, la Première ministre Elisabeth Borne n’a pas laissé les débats commencer avant de recourir, pour la 21e fois depuis qu’elle est à Matignon, à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution ce jeudi 14 décembre. Elle fait ainsi passer sans vote pour cette nouvelle lecture la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, celle qui concerne les recettes.
«Notre pays a besoin d’un budget et les oppositions ne souhaitent pas trouver de compromis avec nous pour l’adopter», a déclaré Elisabeth Borne devant un hémicycle quasi désert.
Ces dernières heures ont été consacrées par les députés de la majorité spécialistes du budget à la réécriture du texte revenu du Sénat. Mardi 12 décembre, une version largement remaniée y a été adoptée par 191 voix contre 103, après presque trois semaines de débats. Pour cette première partie du PLF, les sénateurs, majoritairement de droite, avaient supprimé le bouclier tarifaire sur l’électricité pour le remplacer par des chèques énergie ciblés sur les plus modestes. Ils avaient également détricoté la réforme du prêt à taux zéro en votant leur maintien sur l’ensemble du territoire et rajouté des aides aux territoires. Le groupe centriste avait pu, lui, compter sur les voix de la gauche pour faire voter des mesures fiscales dont l’exécutif ne veut jamais entendre parler : hausse de la contribution des plus riches avec deux nouvelles tranches pour les plus hauts revenus ou encore la création d’un impôt sur la fortune «improductive».
Sans surprise, ces dernières dispositions ont été jetées dans les poubelles du Palais-Bourbon. La plupart des amendements du gouvernement et de la majorité ont consisté à revenir à l’état du texte avant son arrivée au Sénat. A quelques exceptions près tout de même, comme la rallonge de 100 millions d’euros pour la dotation globale de fonctionnement (DGF) annoncée par Elisabeth Borne aux premiers concernés lors du 105e congrès de l’Association des maires de France en novembre. Ou encore le relèvement des accises (des taxes indirectes) sur l’électricité qui avaient été abaissées pendant la crise énergétique, même si la trajectoire retenue est plus progressive que celle votée par le Sénat.
La majorité, en bonne entente avec le gouvernement, en a aussi profité pour rétablir des mesures supprimées par les sénateurs. Et notamment ce fameux «amendement Fifa», déjà arrivé à la surprise générale en première lecture (étonnant même le député qui l’avait déposé…), seulement quelques minutes avant le déclenchement du 49.3. Ces mesures fiscales ultra-avantageuses, qui visent à attirer les sièges des fédérations sportives internationales en France, ont été supprimées par les sénateurs, quasi unanimes pour dénoncer un «scandale». Mais l’exécutif semble y tenir. La majorité a donc rejoué ce jeudi la même scène, redéposant cet amendement qui n’a jamais été discuté en commission, en changeant seulement le nom du signataire (c’est désormais l’élu Renaissance du Val-de-Marne, Mathieu Lefèvre).
Dans la foulée, le président LFI de la commission des Finances, Eric Coquerel a annoncé le dépôt d’une motion de censure. Elle devrait être examinée ce week-end. Un 22e 49-3 devrait alors être déclenché pour la nouvelle lecture de la deuxième partie, celle consacrée aux dépenses.