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Flou

«Nous sommes restés sur notre faim» : à la sortie de Matignon, la gauche regrette le flou de Sébastien Lecornu

Les socialistes étaient les premiers reçus ce mercredi 17 septembre par le nouveau Premier ministre, avant les autres représentants de la gauche - hors LFI, qui a refusé - puis le Rassemblement national.

Olivier Faure (au centre), Johanna Rolland (à droite) et Patrick Kanner (à gauche) à leur arrivée à Matignon ce mercredi 17 septembre 2025. (Stéphane de Sakutin/AFP)
ParSacha Nelken
Journaliste - Politique
Publié le 17/09/2025 à 11h50

Deux heures de rencontre pour finalement… peu d’informations. Premiers reçus ce mercredi 17 septembre par le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu dans cette journée de consultation des oppositions, les socialistes sont «restés sur leur faim», a affirmé le premier secrétaire Olivier Faure à la sortie de l’entrevue. A en croire les dirigeants roses, l’ancien ministre des Armées est resté particulièrement flou sur ses intentions. «Pour l’instant, nous ne savons rien [de ce qu’il compte faire]», a répété le chef du PS devant les caméras posées rue de Varenne.

Désormais rodés à l’exercice, les socialistes n’avaient pas vraiment l’intention d’entrer dans le dur des négociations dès ce mercredi matin. L’entrevue du jour était surtout l’occasion pour le PS d’évoquer à nouveau, auprès de Lecornu, ses «chantiers prioritaires» pour le budget 2026. «Nous avons mis en avant les besoins d’augmenter le pouvoir d’achat, d’une meilleure justice fiscale, parlé de relance, de croissance, de la réforme des retraites», raconte un participant. Lequel note qu’aucun des sujets n’a semblé froisser le Premier ministre. «En revanche, nous n’avons eu aucune réponse sur le “comment”, regrette la même source. C’est pourtant le principal…»

«Si Lecornu nous dit “allez vous faire voir”, il tombe»

Pour l’heure, impossible donc pour le parti au poing et à la rose de se prononcer sur une éventuelle censure. «On verra ce que le Premier ministre est prêt à entendre», a expliqué Faure. Pour autant, le PS insiste sur le fait qu’ils peuvent mettre fin au bail de Sébastien Lecornu à tout moment. Face aux journalistes, le député de Seine-et-Marne dit avoir prévenu le chef du gouvernement que si son passage à Matignon consistait à «refaire du François Bayrou, les mêmes causes produiront les mêmes effets». «Nous censurerions dès la déclaration de politique générale», a-t-il ainsi averti.

Pour tenter de mettre la pression sur le chef du gouvernement et le convaincre de reprendre les principales mesures de leur contre-budget présenté à la fin de l’été à Blois, les socialistes ont sciemment rendu public mardi un sondage montrant que leurs propositions sont plébiscitées par les Français. Selon l’enquête d’Ifop, diffusée par le Parisien, 86 % des personnes interrogées soutiennent l’instauration de la taxe Zucman de 2 % sur les patrimoines de plus de 100 millions d’euros. En outre, 79 % des sondés se disent favorables à une réduction des aides publiques «aux grandes entreprises». «A la veille du mouvement social du 18 septembre, le Premier ministre doit l’entendre», a appuyé Boris Vallaud, le patron des députés PS, à la sortie de Matignon.

En janvier, les socialistes s’étaient distingués du reste de la gauche en acceptant de négocier un accord de non-censure avec François Bayrou. Estimant avoir obtenu des «victoires» et notamment un conclave sur les retraites qui était censé permettre de rediscuter de l’âge de départ, les roses avaient permis au Béarnais de survivre aux motions de censure déposées contre lui en ne les votant pas.

Mal leur en a pris. Au fil des semaines, le PS a fini par déplorer que les engagements de Matignon n’eussent pas été respectés. Cette fois, avec Lecornu, on ne les y reprendra plus, martelaient-ils dans la foulée de sa désignation. «Bayrou a bénéficié du doute, mais là non ça ne sera pas le cas», assurait un haut dirigeant socialiste la semaine dernière. «On va demander beaucoup plus que la dernière fois. Lecornu n’a pas le choix, s’il nous dit “allez vous faire voir”, il tombe», poursuivait le même.

Ecologistes et communistes déterminés à censurer

Après le PS, Les Ecologistes ont rencontré Sébastien Lecornu en début d’après-midi. Et eux aussi ont trouvé le locataire des lieux bien trop flou. «On n’a pas eu de réponses très claires», a regretté leur secrétaire nationale Marine Tondelier après la réunion. Contrairement aux socialistes, les verts n’attendaient rien de ce Premier ministre qu’ils jugent «illégitime» et qu’ils promettent de censurer. Tondelier et les siens n’étaient donc pas à Matignon pour négocier mais par simple courtoisie républicaine. L’occasion de «parler cash» à l’ancien ministre des Armées et de faire part de leur «inquiétude pour le pays de voir la notion de front républicain abîmée» et d’aborder la question des «reculs environnementaux majeurs» a expliqué la cheffe du parti à la sortie.

Egalement reçus ce mercredi, les communistes attendent des vrais gestes de la part de Lecornu pour ne pas voter de motion de censure. «Il y a besoin de ruptures claires et franches et nous ne transigerons pas dessus. Sans cela, nous appuierons sur le bouton de la censure», a prévenu le secrétaire national du PCF Fabien Roussel lors de son discours à la Fête de l’Huma, samedi 13 septembre. Les insoumis, de leur côté, ont décidé de ne pas perdre leur temps du côté de la rue de Varenne. Contactés en début de semaine pour rencontrer le Premier ministre ce mercredi, les mélenchonistes ont refusé l’invitation. «Nous ne participerons pas à sauver ce qu’il reste de la macronie, a justifié mercredi Mathilde Panot, la présidente du groupe LFI à l’Assemblée, sur France Info. Tous ceux qui tenteront de sauver Macron tomberont avec lui.»

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